Depuis cinq ans maintenant, l’association Tunaweza crée du lien entre Strasbourgeois(es) et personnes réfugiées. De nombreux ateliers sont organisés pour permettre à ces dernier(e)s de mieux s’intégrer.
Trouver un toit, apprendre la langue, décrocher un emploi : pour les réfugié(e)s, l’intégration se résume souvent aux urgences matérielles. Pourtant, s’installer dans une nouvelle ville, c’est aussi se sentir accueilli et retrouver une place dans la société. À Strasbourg, l’association Tunaweza s’efforce de combler ce besoin invisible mais essentiel, en créant du lien entre nouveaux/elles arrivant(e)s et habitant(e)s.
« À l’origine, avec des amis, on avait monté un réseau d’hébergement dans les familles strasbourgeoises : JRS Strasbourg », explique Thomas Chandesris, aujourd’hui coordinateur de Tunaweza. Mais une évidence s’impose : au-delà d’un logement, les personnes exilées ont besoin de repères, de rencontres, d’ancrage. Face à ce constat, Tunaweza voit le jour, pour aider les réfugié(e)s à surmonter les barrières linguistiques et culturelles, et ainsi faciliter leur intégration à Strasbourg.
© Mélanie Berbach / Pokaa
À ses débuts, l’association fonctionne surtout grâce aux bénévoles, avec un mantra : « nous pouvons », traduit par « Tunaweza » en swahili. Des prestataires sont appelés en cas de projets subventionnés. « Ensuite, quand on est devenu plus solides, avec des partenaires réguliers, on s’est dit que c’était l’occasion d’embaucher quelques personnes », retrace Thomas, désormais salarié aux côtés d’Omaid Zazai, responsable communication, et Issa Magamaev, jardinier.
© Association Tunaweza / Document remis
Les aides de l’Union européenne, de l’État, des collectivités dont la Ville de Strasbourg, et de la Fondation de France, associées aux ressources humaines, offrent un terreau propice au développement des projets.
Cultiver les liens au jardin
Au Jardin Mélanie, niché à la Robertsau, l’association organise régulièrement des ateliers et des formations. De nombreux arbres fruitiers et quelques espaces potagers permettent aux habitant(e)s et nouveaux/elles arrivant(e)s de découvrir ensemble l’arboriculture, du soin des plantes à la transformation des récoltes. Les pommes sont pressées en jus avec l’association IES, et de la gelée est confectionnée avec la conserverie Les Retoqués.
© Mélanie Berbach / Pokaa
Le verger accueille aussi la fête de la cerise puis de la pomme, la semaine des réfugié(e)s, et en mai, la maire de Strasbourg assistera à l’inauguration du Jardin Mélanie. « Ça va s’enchaîner prochainement », annonce Thomas.
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Des sorties cueillette de plantes sauvages complètent les ateliers jardiniers. Au printemps, l’ail des ours était à l’honneur. « Selon les pays, les personnes ont différentes connaissances et utilisations des plantes. »
Thomas cite des ravioles à l’ail des ours, une recette de Tchétchénie où toute la plante est utilisée ; des noix vertes au sirop préparées par une participante arménienne ; ou encore le tkemali, un condiment géorgien à base de prunes vertes. Ces recettes et instants partagés sont autant d’occasions de découvrir d’autres traditions et nouer des relations.
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S’améliorer en français
Si les réfugié(e)s peuvent bénéficier de cours de français, l’association est convaincue que pour progresser, il faut converser. Or les nouveaux/elles arrivant(e)s n’ont pas toujours des ami(e)s français(es). Trois projets pour favoriser l’apprentissage et le perfectionnement linguistique ont donc été montés.
Un café-discussion se tient chaque jeudi après-midi, dans le quartier de Koenigshoffen. Une quinzaine de personnes, dont quelques francophones, sont réparties sur trois-quatre tables pour discuter en français. Un sujet est donné en amont. Récemment, le thème du voyage était au centre de la conversation.
© Association Tunaweza / Document remis
Pour compléter ces rendez-vous réguliers, le projet Paroles vise à former des binômes pour discuter. « Pendant trois mois, une heure par semaine, une personne francophone et une personne réfugiée se rencontrent », développe Omaid. Thomas complète : « Une petite formation et un kit pédagogique sont proposés par Agata et Lise qui portent ce projet, afin d’alimenter la discussion et rassurer les participants ».
Ce projet rend l’engagement simple et accessible à tou(te)s, affirme Thomas : « Beaucoup de Strasbourgeois veulent aider ces publics sans savoir comment. Avec Paroles, c’est facile, on donne une heure de son temps pour discuter ! » La quatrième édition démarre en mai.
© Association Tunaweza / Document remis
Pour progresser et s’amuser, Tunaweza organise aussi des soirées jeux de société les lundis soir, à Koenigshoffen, en lien avec l’association de quartier Par Enchantement. Les règles sont bien expliquées pour que tou(te)s les participant(e)s, y compris celles et ceux peu à l’aise en français, puissent jouer sans difficulté.
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Faciliter l’accès à l’information
Grâce au recrutement récent d’Omaid, un projet cher au cœur de l’association a pu voir le jour : Haut-Parleur. « Il se passe beaucoup de choses à Strasbourg : des concerts gratuits, des ciné en plein air, des activités sportives… Mais pour les personnes réfugiées, l’accès à ces infos est compliqué », explique Thomas.
Pour y palier, Tunaweza a ouvert quatre groupes WhatsApp portant sur : l’emploi-formation, l’apprentissage du français, les loisirs, et les bons plans. Des informations y sont partagées régulièrement, version simplifiée pour en faciliter la compréhension. Une formule qui plaît, puisque près de 200 personnes suivent les actualités liées à l’insertion professionnelle.
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En plus du volet numérique, le projet Haut-Parleur facilite aussi la rencontre physique. Un forum de bienvenue, organisé le 15 mai au Foyer Saint-Arbogast, réunira près de 30 structures associatives pour accompagner les publics réfugiés dans la recherche d’emploi ou encore de loisirs. Une petite fête clôturera l’événement, car « la convivialité, c’est important pour construire des connexions », assure Thomas.
En intervenant là où les politiques publiques s’arrêtent, l’association Tunaweza répond à ce que les dispositifs officiels ne prévoient pas : le besoin d’exister aux yeux des autres.
Association Tunaweza
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33a Rue de la Tour, 67200 Strasbourg