De sa toile intitulée Moïse brisant les Tables de la Loi, peinte à l’âge de 16 ans, aux décors des plateaux des élections présidentielles de 1981, en passant par sa première sculpture monumentale, Le Monstre, une pièce novatrice composée de bois, métal, plexiglas et verre, Raymond Moretti est un artiste polymorphe, génial touche-à-tout. Jusqu’à sa montre Kallista, l’une des plus chères au monde, dessinée pour Vacheron Constantin.
Un talent et une personnalité qui lui ont valu l’estime et l’amitié de Cocteau, Picasso et de Kessel. Pourtant, rien ne prédestinait ce garçon issu d’une famille modeste d’immigrés transalpins, qui avaient fui l’Italie de Mussolini pour trouver refuge à Nice, comme nous l’a révélé Marc Dimech, commissaire d’exposition et agent artistique, à s’illustrer d’une façon aussi remarquable. Si ce n’est le fait qu’il soit devenu apprenti boulanger à quatorze ans. Cette formation, marquée par des nuits courtes, a forgé son caractère et fait de lui le noctambule qu’il restera toute sa vie.
Faune de la nuit et spiritualité
C’est en 1955, comme le rappelle la frise monumentale de 12mètres qui retrace sa vie via des archives et une iconographie rares, que l’artiste s’installe à la villa Paradiso, à Cimiez. C’est l’époque où ses amis, le photographe Raph Gatti et Louis Nucéra avec lequel il a une passion commune pour les chats, y entraînent systématiquement les stars pour qu’elles se fassent croquer le portrait. Et où cet expert du trait fait la rencontre de Jeanne et Paul Augier, les propriétaires du Negresco.
Qui lui feront une place de choix dans leur galerie d’art unique en son genre, comme en témoigne l’important prêt grâce auquel cette exposition a pu notamment voir le jour, avec celui effectué par Marie-France Moretti, la veuve de l’artiste. En 1962, il déménage à la villa Rex Ingram au cœur des studios de la Victorine. Si sa période parisienne, qui débute en 1971 – abordée dans la partie intitulée « La rue Saint-Denis » – révèle son goût pour une certaine faune de la nuit, Raymond Moretti, fasciné aussi par les clowns, a toujours entretenu par ailleurs une relation inspirante avec la religion.
Durant son service militaire au Maroc, il apprend l’hébreu et étudie la Torah. En 1980 et 1982, il illustre deux livres de Georges Israël qui donneront lieu à des expositions, et réalise en 1988 la Yona, une colombe biblique stylisée à l’aide de caractères de l’alphabet hébreu. Il marquera aussi, comme on le découvre dans les salles supérieures de l’exposition, l’espace public toulousain avec deux œuvres monumentales: La croix occitane, place du Capitole, et la galerie des arcades, une fresque de 29 tableaux en sérigraphie, qui retrace les grandes heures de la Ville rose.
Espace culturel départemental Lympia. 2, quai Entrecasteaux à Nice. Ouvert de 10h à 17h du mercredi au dimanche. Gratuit. Rens. 04.89.04.53.10. www.espacelympia.departement06.fr
Raymond Moretti, » Marianne 1980 « , gouache sur papier, 55 x 65 cm. Collection Marie-France Moretti. ©Adagp, Paris, 2025. Photo Espace culturel départemental Lympia/Frédéric Joncour.
Raymond Moretti, » Variations « , de la série Jazz 1984 Lithographie, 54 x 69 cm. Collection privée de l’hôtel le Negresco. © Adagp, Paris 2025..
Raymond Moretti. » Louis Nucéra et divine 1973 « , lithographie, 65 x 50 cm. Collection Louis et Suzanne Nucéra. © Adagp, Paris, 2025. Photos Espace culturel départemental Lympia/Frédéric Joncour.