Star de la télé américaine, anniversaire, seringues, meilleure version de soi-même, renaissance… On va évidemment vous parler de The Substance ! Les Français découvrent le film de Coralie Fargeat en novembre 2024. Dans les salles obscures, les spectateurs sont bouche bée devant ce film coup de poing. Le pitch ? Elisabeth Sparkle est une vedette américaine qui donne des cours d’aérobic à la télé. Le jour de ses 50 ans, elle est virée par son patron qui la trouve trop vieille pour continuer sa carrière sur le petit écran. Déprimée, la star déchue reçoit une proposition inattendue pour tester une substance soi-disant miraculeuse. En se l’injectant, elle deviendra une meilleure version d’elle-même : plus jeune, plus belle, plus parfaite. La seule contrainte ? Respecter les instructions coûte que coûte… Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?

Au casting : Demi Moore dans le rôle d’Elisabeth Sparkle, Margaret Qualley dans le rôle de Sue et Dennis Quaid dans le rôle d’Harvey. Dans l’Hexagone, le film fait plus de 587.000 entrées. Un très beau succès pour un film de body horror féministe ! Surtout, The Substance, présenté au Festival de Cannes 2024, électrise la Croisette et obtient le Prix du Meilleur Scénario. Le long-métrage de cette frenchy reçoit également 1 Golden Globes, 1 BAFTA et 1 Oscar, entre autres. Et si vous l’avez vu, vous vous souvenez encore sans doute de la mythique et dégoûtante scène des crevettes… Mais alors, combien de crevettes Dennis Quaid a-t-il mangé pour sa scène au restaurant avec Demi Moore ?

The Substance, un film gore, drôle et féministe qui n’a pas vocation à être subtil

Pour le dossier de presse du film, la réalisatrice française Coralie Fargeat raconte son projet, et l’idée qu’elle défend à travers son long-métrage si particulier. « En faisant ce film sans retenue, j’ai voulu libérer mon monstre intérieur », argumente-t-elle. « Ou plutôt, ce que la société m’a fait prendre pour un monstre : cette partie imparfaite/ vieillissante/ changeante de moi-même et qu’on m’a appris à cacher car, en tant que ‘femme’, ce n’est pas à ça qu’on est censées ressembler / ce n’est pas comme ça qu’on est censées se comporter… Et c’est pour cette raison que j’ai imaginé cette histoire. Jouer avec la destruction du corps des femmes pour faire voler en éclat ces contraintes et carcans qui emprisonnent les femmes depuis si longtemps. Ce film est extrêmement gore. Et il est extrêmement drôle en même temps. Car je ne connais pas d’arme plus puissante que la satire pour renvoyer la société à l’absurdité de ses propres règles. »

Ainsi, la scène génialissime du restaurant avec la crevette est à la fois drôle, triste, grotesque et tout simplement… nauséabonde. Coralie Fargeat explique pourquoi : « La violence des injonctions dont parle le film n’a rien de subtil. Elles sont aussi violentes et dégoûtantes que ces crevettes en gros plan, ou que tout ce qu’il y a dans le film, et c’est là que se trouve mon propos. Pour moi, cette non-subtilité assumée est un miroir tendu à toutes ces injonctions, et tout ce que ces mécanismes ont de grossier, d’écrasant et d’énorme (…). Dans mon cinéma, il y a peu de dialogues, et ce qui m’intéresse effectivement, c’est vraiment la symbolique. Je cherche toujours le symbole qui sera le plus fort, le plus simple, le plus direct, et presque le plus exagéré pour représenter mon idée. Et je veux que ces symboles soient aussi visuels que sonores, pour être ressentis plutôt qu’intellectualisés. Le symbole n’a pas vocation à être subtil. »

Pourquoi la réalisatrice Coralie Fargeat a dû se battre pour garder la scène des crevettes au montage final de son film The Substance

La réalisatrice a d’ailleurs dû se battre pour garder cette scène au montage final. « Je n’aurais jamais pensé que la crevette serait un tel cheval de bataille », avoue-t-elle. « Ce qui a été le plus difficile, en fait, c’est le côté extrême du film, l’excès, la non-subtilité, le lâcher-prise. Le film est, je pense, tout ce que l’on ne s’autorise pas dans la vraie vie, notamment en tant que femmes, où l’on doit être policées, souriantes, délicates, en contrôle, de bon goût. C’était vraiment ça que je voulais envoyer valser. Et c’est ça qui peut secouer et heurter, en effet, mais je me suis dit ‘si je m’ampute de ça, je m’ampute de la raison pour laquelle j’ai fait le film. »

Bien sûr, cette scène est caricaturale et le personnage d’Harvey, merveilleusement interprété par Dennis Quaid (mythique papa de Linsay Lohan dans À nous quatre), remplaçant de Ray Liotta après son décès, l’est aussi. D’ailleurs, s’il s’appelle Harvey, comme le producteur Harvey Weinstein, tristement connu pour être à l’origine d’un des plus grands scandales sexuels déboulant sur le mouvement MeToo, Coralie Fargeat se justifie : « J’entends souvent que le personnage de Harvey dans le film est une grosse caricature, et au début j’ai envie de dire ‘Oui oui, bien sûr que c’est une caricature’, et après je me dis… mais non pas du tout. En fait non, malheureusement, ne serait-ce que Harvey Weinstein, c’est une personne réelle, et ses comportements étaient cent fois plus terribles que ce que je représente à l’écran. En post-production, je ne vous dis pas le nombre d’hommes qui ont été dérangés par la scène avec les crevettes. Et ça, ça m’interpelle. C’est fou à quel point des crevettes peuvent mettre mal à l’aise. Chacun s’exprime avec les moyens qui sont les siens, et ça c’est mon mode à moi. Je confronte, je symbolise un comportement et des excès qui sont malheureusement loin de ne pas exister. C’est un miroir qui, j’espère, fera réagir (…). Les Harvey du monde, avec leurs comportements ignobles de domination, oui, ils existent. Je montre tout ce que moi, en tant que femme, je ressens comme des comportements misogynes, inégalitaires, et je les mets en scène, c’est ma manière de les dénoncer. »

Près de deux kilos de crevettes avalés par Dennis Quaid sur le tournage de The Substance !

Okay, mais combien de crevettes Dennis Quaid a-t-il donc avalées ? Dans une interview accordée à Collider, Demi Moore, interrogée aux côtés de Coralie Fargeat se souvient à propos du tournage de cette scène : « Pendant le tournage, Dennis Quaid était tellement investi, tellement investi. Je ne sais pas combien de crevettes il a réellement mangées ce jour-là, mais… » Et Coralie Fargeat de répondre : « Il en a mangé deux kilos, pour de vrai ! » Demi Moore ajoute : « Dennis est arrivé après la mort de Ray Liotta. Il était tellement à fond, intrépide. Il nous a donné un boost d’énergie par injection. » Au Los Angeles Time, Demi Moore précise en riant : « La scène la plus violente de tout le film, c’est de loin quand je suis assise en face de Dennis Quaid en train de manger des crevettes. Sa bouche en train d’arracher les têtes… Il illustre exactement ce qu’il fait aux gens. Il leur arrache la tête, leur arrache les queues, les recrache. » Coralie Fargeat conclut : « Je dois dire que j’ai été choquée par ce que cette scène a provoqué (…). Elle est devenue assez puissante par ce qu’elle symbolisait. »