C’est un visage peu connu du grand public, mais un nom qui revient avec insistance dans les couloirs du pouvoir britannique et dans les colonnes des rapports publics. Graham King, 57 ans, patron de l’entreprise Clearsprings Ready Homes, est devenu en 2025 le premier « milliardaire de l’asile » au Royaume-Uni. Son ascension fulgurante doit tout… à l’immigration massive et à l’incapacité chronique de l’État britannique à traiter les demandes d’asile dans des délais raisonnables.
De vendeur de caravanes à milliardaire
L’histoire commence dans les années 1990, sur l’île de Canvey, dans l’Essex. Graham King gère alors, avec son frère, un parc de caravanes familial, hérité de leur père. C’est à cette époque qu’il entend parler d’un hôtelier qui facture au gouvernement des chambres mises à disposition de demandeurs d’asile. Flairant un créneau juteux, il se lance.
En 1999, il fonde Clearsprings Ready Homes, qui deviendra l’un des principaux prestataires du ministère de l’Intérieur pour l’hébergement des migrants. Son modèle : acheter ou louer des bâtiments — anciens hôtels, casernes désaffectées, immeubles vétustes — et les mettre à disposition contre paiement public. Le tout, sans grand souci de qualité, selon de nombreux rapports d’inspection.
Une manne financée par les contribuables
Clearsprings, ainsi que deux autres sociétés (Serco et Mears Group), opèrent sous contrat avec le Home Office. Le contrat initial de Clearsprings, estimé à 1 milliard de livres pour dix ans, a été réévalué à… 7,3 milliards. Soit plus de 4 millions de livres versées chaque jour par les contribuables pour loger des demandeurs d’asile — dont 38 000 dans des hôtels et 66 000 dans d’autres formes d’hébergement.
En 2024, l’entreprise a dégagé un bénéfice de près de 120 millions de livres, et a distribué 90 millions de dividendes à ses actionnaires — Graham King possédant plus de 99 % de l’entreprise. Sa fortune personnelle, estimée à 1,015 milliard de livres, l’a propulsé à la 154e place du classement des plus grandes fortunes du Sunday Times.
Des conditions d’hébergement dénoncées
L’explosion des profits n’a pas été suivie d’une amélioration des conditions d’accueil. Plusieurs inspections ont mis en lumière des sites décrits comme « insalubres », « délabrés » ou « indignes ». En 2023, plus de 70 migrants avaient dormi dehors à Londres pour protester contre leurs conditions d’hébergement dans des hôtels gérés par Clearsprings.
En 2021 déjà, les anciens camps militaires de Napier (Kent) et Penally (Pays de Galles), exploités par l’entreprise, avaient été épinglés pour leur vétusté. Le Home Office avait reconnu des « manquements graves » tout en affirmant que des améliorations étaient en cours.
La fortune de Graham King est directement liée à l’arrivée continue de migrants au Royaume-Uni. Chaque traversée illégale de la Manche, chaque retard administratif, chaque embouteillage judiciaire est une garantie de revenu pour son entreprise. Un député britannique s’interrogeait récemment : « Comment peut-on devenir milliardaire en logeant des réfugiés ? »
Les critiques ne viennent pas seulement de la droite anti-immigration. Même au sein du gouvernement, des voix s’élèvent pour dénoncer l’inefficacité d’un système qui privilégie l’externalisation à la sous-traitance plutôt que le traitement rapide et rigoureux des demandes. Un audit du National Audit Office a récemment évoqué de possibles surfacturations et des failles dans le contrôle des dépenses.
Une vie de jet-set sur fonds publics
Pendant que les demandeurs d’asile s’entassent dans des chambres exiguës ou attendent dehors, Graham King vit entre Mayfair, Monaco et les Caraïbes. Avec sa compagne lettone de 18 ans sa cadette, il navigue en jet privé, participe à des courses automobiles, loge dans les palaces tropicaux et finance les études artistiques de sa fille dans un pensionnat de luxe à 44 000 livres par an.
Sur son compte Tripadvisor, il raconte ses balades équestres dans les eaux turquoise des Antilles, tandis que les contribuables financent sans le savoir ses aventures. Un contraste qui alimente l’indignation croissante de nombreux Britanniques.
Alors que les travaillistes de Keir Starmer promettent un « livre blanc » pour reprendre le contrôle des frontières, la montée fulgurante de la fortune de Graham King est devenue un symbole gênant. Elle incarne une politique migratoire à bout de souffle, où les « devoirs moraux » se heurtent à une réalité financière accablante : 15,3 milliards de livres dépensés en dix ans pour loger des personnes souvent sans avenir légal au Royaume-Uni.
Plutôt que d’accélérer les procédures, on enrichit des prestataires privés. Plutôt que d’expulser les déboutés, on les parque dans des hôtels de banlieue. Et pendant ce temps, le « roi de l’asile » continue d’engranger.
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