«C’est un nouveau chapitre pour des partenaires naturels, qui partagent les mêmes valeurs», s’est félicité Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, à l’issue du premier sommet de ce type depuis la sortie du voisin britannique de l’Union.


Au palais londonien de Lancaster House, les deux parties ont ainsi lancé la «réinitialisation» de la relation avec les Vingt-Sept prônée depuis juillet 2024 par le Premier ministre travailliste Keir Starmer, présent aux côtés de l’Allemande, et du président du Conseil européen, le Portugais Antonio Costa.


Succès français sur la pêche


C’est en matière de défense que les pas accomplis ce lundi ont été les plus palpables : Britanniques et Européens ont signé un traité pour multiplier les coopérations entre armées, dans des opérations ou des entraînements communs, ou bien sur les fronts de la cybersécurité, de la protection des infrastructures critiques, et de l’espace. Un «deal» conclu au forceps, tard dans lu 18 au 19 mai. La France avait conditionné tout accord sur la défense à un compromis dans le domaine de la pêche. Succès tricolore : l’Hexagone a obtenu pour les chalutiers de l’UE la prolongation du généreux accès actuel aux eaux britanniques, qui devrait expirer en 2026, pour 12 ans, soit jusqu’en 2038.


L’accord reste cependant incomplet à bien des égards. Le gouvernement de sa Majesté n’a pas encore décroché la participation des firmes industrielles britanniques, tant souhaitée par Keir Starmer, au programme «SAFE» de 150 milliards d’euros d’investissements dans le réarmement de l’UE. Le texte agréé y ouvre certes la porte, mais les conditions demeurent floues, et davantage de discussions seront nécessaires. Et pour obtenir un feu vert définitif, Londres devra accepter d’ouvrir son propre marché et de contribuer à l’effort budgétaire. Pas évident pour Keir Starmer, qui se voit accusé outre-Manche de revenir subrepticement sur l’issue du référendum de 2016.


Retour du Royaume-Uni dans les normes de l’UE


En matière commerciale, le Premier ministre a néanmoins pu brandir ce lundi un précieux accord «sanitaire et phytosanitaire» devant alléger drastiquement les contrôles aux frontières de l’UE, et autres «procédures administratives» (« red tapes ») qui pénalisent les entreprises exportatrices britanniques de biens agroalimentaires depuis 2020. A rebours des promesses initiales des «Brexiteers», son gouvernement s’est engagé à respecter les normes édictées par l’UE, et à se plier aux verdicts de la Cour de Justice de l’Union, en cas de litiges. Mais là aussi, les modalités devront être finalisées dans les prochaines semaines.


«C’est un accord gagnant-gagnant entre une Grande-Bretagne indépendante et nos alliés de l’UE», a martelé Keir Starmer, jurant être «resté fidèle aux lignes rouges de [son] programme : ne pas rejoindre le marché unique ni l’union douanière, et ne rétablir la libre circulation des personnes». Dès lors, les engagements de Londres espérés par Bruxelles pour que les jeunes de l’UE – étudiants et travailleurs – puissent plus facilement s’installer outre-Manche sont finalement restés très modestes.


Parmi les autres avancées : la participation du Royaume-Uni au marché européen de l’électricité «comme avant le Brexit», ou encore davantage de coopération sur les investissements dans les énergies renouvelables en mer du Nord.


L’UE et le voisin britanniques refusionneront enfin leurs bourses du carbone (ETS, pour Emissions Trading System) afin, notamment, que les industries concernées (ciment, métallurgie, engrais ou l’électricité) se voient exemptées de leurs «mécanisme d’ajustement carbone aux frontières» respectifs.


Clément Solal et Alexandre Gilles-Chomel