Par

Paul Varenguin

Publié le

26 mai 2025 à 17h58

Il y a presque un an et demi, en janvier 2024, il était mobilisé sur le barrage monté sur l’autoroute A4, à hauteur de Jossigny. Et sa colère était déjà grande. Aujourd’hui, Clément Torpier, agriculteur à Sourdun (Seine-et-Marne) et président des Jeunes agriculteurs d’Île-de-France, reste mobilisé. Il témoigne.

En 2024, vous étiez mobilisé sur les barrages. Des promesses avaient alors été faites par l’État. Où en est-on aujourd’hui ?

Aujourd’hui, le bilan est très mitigé. Il y a eu un premier élément, la loi d’orientation, qui est sorti, sur des questions d’installation, de transmission des exploitations agricoles, la notion de souveraineté alimentaire, ce qui est plutôt positif.

Ensuite, il y avait cette fameuse proposition de loi sur le sujet des entraves (la PPL Duplomb, N.D.L.R.) portée par deux sénateurs, qui permettait de redonner une vision stratégique aux agriculteurs, de pouvoir redonner les moyens de production. Elle était extrêmement attendue, favorable à la production agricole. Elle répondait aux attentes des agriculteurs suite aux mobilisations d’il y a un an. Elle est passée au Sénat, partie à l’Assemblée nationale pour une première commission, où elle s’est fait détruire, et vidée de tout son sens. On est passé à quelque chose qui ajoute des contraintes supplémentaires. C’est clairement une trahison, on nous a pris pour des cons.

Plus tard, elle est repassée en commission, où les choses ont évolué dans le bon sens, mais de façon légère. Pourtant, l’avenir de l’agriculture française en dépend.

Parmi les revendications d’alors, certaines portaient aussi sur la charge de l’administratif…

Les choses évoluent, si je puis dire. Il y en a une partie dans la loi sur les questions de l’accès à l’eau ou sur les exploitations et bâtiments classés vis-à-vis de l’élevage. Ce sont des points travaillés aussi localement, avec les directions départementale et régionale.

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Quelles sont vos attentes aujourd’hui ?

Ce que l’on souhaite, c’est le vote et l’approbation du texte initial, sorti du Sénat, avec l’ensemble de ses articles. Il est hors de question que l’on supprime un ou des article(s) de cette proposition de loi. Il y avait eu des engagements du gouvernement, ils doivent être tenus. On est très inquiets, mécontents, et on va se mobiliser pour que cette loi puisse être votée.

Autour de vous, voyez-vous des jeunes dégoûtés de ce métier ?

C’est bien beau d’avoir fait une loi sur l’installation et la transmission des exploitations agricoles en donnant une vision, mais l’avoir faite sans conserver nos moyens et outils de production, sans pouvoir donner aux agriculteurs les moyens de produire, ça ne sert à rien. Évidemment, aujourd’hui, c’est un frein à l’installation des jeunes.

Des agriculteurs qui en ont marre, et qui aimeraient que les choses évoluent, j’en connais. Aujourd’hui, tous les agriculteurs ont beaucoup d’espoir dans ce texte.

Certains identifient aussi la différence de législation entre la France et les autres pays européens comme une difficulté. Que pouvez-vous en dire ?

La notion de souveraineté alimentaire et énergétique est un enjeu majeur, et l’agriculture peut être en capacité d’y répondre, mais il faut qu’on puisse conserver nos moyens de production. Si demain, les agriculteurs n’ont plus la capacité de produire leurs cultures, on les importera d’autres pays qui ne respectent pas le même cahier des charges, avec des conditions moins bien que les nôtres.

Il faut savoir ce que l’on veut.

Clément Torpier,président des JA Île-de-France

En France, il y a de la surtransposition, et on arrive à une forme de concurrence déloyale, même au sein de l’Union européenne. On n’a pas les mêmes outils et moyens de production, ce qui pose un gros problème.

Aujourd’hui, l’acétamipride est autorisé dans l’ensemble de l’Europe, sauf en France. Et on n’a pas les moyens de pouvoir protéger correctement nos cultures face aux ravageurs, et on a des rendements beaucoup plus faibles que nos voisins. Il faudrait qu’on ait la même règle pour tout le monde.

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