Rois des cuisines, les réfrigérateurs ouvrent leurs portes sur nos habitudes alimentaires, nos gourmandises et nos modes de vie. Autant de choses qui intéressent Pokaa quand cela concerne les Strasbourgois(es). Petit tour d’horizon.

Emily, 25 ans

Plat de la flemme : le Dahl de lentilles
Plats signature pour recevoir les copain(e)s : salade, pois chiches, feta, concombre ou nectarines à la mozzarella et à la menthe
Plaisir coupable : le coca zéro après l’entrainement, parfois
Le produit coûteux qui ne quitterait ses placards pour rien au monde : l’huile d’olive

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

Dans le frigo d’Emily, un mur de tupperwares distingue l’étage de la jeune femme de ceux de ses colocataires. Il faut y regarder à deux fois pour remarquer quelques produits issus de la grande distribution. « J’essaie vraiment de cuisiner maison le plus possible, explique cette habitante du quartier gare. Je fais beaucoup de sport et lorsque je rentre de la boxe ou de la musculation vers 21h ou 21 h 30, ce n’est plus le moment de faire tinter les casseroles. » Plutôt celui de réchauffer ce qui a déjà été préparé.

Cuisiner plutôt que manger transformé

En matière d’alimentation, Emily s’est fixée pour règle de « manger le moins de trucs transformés possible ». Le fruit d’une lente évolution. « Avant d’être étudiante, je ne savais pas cuisiner », pose en préambule celle qui a appris petit à petit.

« Lorsque j’ai commencé le sport il y a trois ans, je me suis intéressée à la nutrition et je me suis beaucoup renseignée sur les additifs. C’est là que je me suis éloignée des aliments transformés, même si c’est parfois un luxe quand on est étudiant d’acheter des produits frais. »

La jeune femme a également réintroduit un peu de viande dans son alimentation, alors végétarienne : « au bout de deux ans, j’étais très fatiguée et j’étais tombée dans les troubles du comportement alimentaire.»

Aujourd’hui, celle qui vient de finir son cursus en communication cuisine tout ce qu’elle peut faire elle-même. Sur son étagère frigorifique, un petit bocal en verre contient des cornichons fait maison : « Ce n’est pas très compliqué. C’est juste des concombres pas encore mûrs qu’on laisse mariner. » Dans une petite boîte, des dattes lui serviront à faire des Snickers maison avec du beurre de cacahuète. Au fond du réfrigérateur, un pot de fromage blanc lui permet de remplacer le Skyr dans ses préparations et petits déjeuners.

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires

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© Adrien Labit / Pokaa

« J’essaie également de manger aussi peu de sucres rapides que possible », poursuit la sportive en ouvrant son placard. À l’intérieur : des flocons d’avoine qui servent d’ingrédient pour des Carrot cakes légers, du café, des épices et du miel de la région.

« Cest aussi un objectif à long terme pour moi de manger local », poursuit celle qui y est particulièrement attentive pour le peu de viande qu’elle achète. À côté des fruits secs et des oléagineux, quelques emballages colorés attirent l’œil : du collagène, des protéines en poudre et du pré-workout pour ses nombreux entrainements. Les seuls produits transformés ayant le droit de cité.

Végétarisme, légumes secs et sauces piquantes

Esther, 29 ans

Plat fétiche : le Dahl de lentilles avec des haricots rouges dedans ou légumes rôtis au Tahini
Plats signatures : fajitas ou hot dogs végé – avec des knacks oui oui
Plaisir coupable mais délicieusement régressif : les bonbons qui piquent
Les trucs qui coûtent cher mais qu’elle achète quand même : huiles de noix et de noisette et pâte de pistache.

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

Dans le frigo d’Esther, on trouve beaucoup de légumes et de sauces piquantes, mais pas de viande. Cette jeune salariée du secteur associatif y a renoncé il y a cinq ans : « avant, j’étais très viandarde, explique cette habitante de l’hypercentre. Mais petit à petit, je me suis interrogée sur mon empreinte écologique. Pendant mes études, je suis partie à San Diego, aux États-Unis. Là-bas, c’est un peu n’importe quoi en matière de viande, il y en a partout. Mais en même temps il y a énormément d’option végétariennes ou véganes. Ça m’a montré que ça pouvait être facile.»

Sauf, peut-être, en société : « je suis toujours surprise de voir à quel point c’est quelque chose dont tout le monde me parle tout le temps. C’est tout de suite un sujet. Quand je dis que je suis végétarienne, les gens me répondent souvent qu’ils font gaffe à leur consommation de viande sans que je demande rien. Comme si mes choix alimentaires étaient culpabilisants pour eux. »

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© Adrien Labit / Pokaa

Pour couper court aux questions de type « mais qu’est ce qu’on va te faire à manger pour [insérer ici un repas de fête quelconque ] » , Esther s’est mise aux fourneaux. « À Noël, j’ai cuisiné du faux gras – une alternative au foie gras [NDLR] – et un faux pâté en croûte avec des légumes. » De manière générale, le végétarisme l’a poussée à chercher de nouvelles recettes et à faire plus attention à son alimentation.

« Avant, je mangeais beaucoup de trucs préparés… Des cordons bleus, des bâtonnets de poissons, des steaks surgelés… Maintenant, je cuisine presque tous mes repas et je fais attention aux aspects nutritifs. J’avais beaucoup de carence en fer : je n’en ai plus du tout. » Esther voit également des effets bénéfiques sur son budget : « J’ai remplacé la viande par des légumineuses : ça coûte pas cher et ça tient longtemps. Du coup, je dépense moins quand je fais des courses. »

Manger sur le pouce mais pas sans saveur

Célia, 28 ans

Plat doudou : les knackis purée mousseline
Plat de la flemme : les pâtes au pesto
Plaisir coûteux : tout ce qui contient de la truffe
Ce qu’elle cuisine quand elle reçoit : le risotto aux champignons

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

Dans le frigo de Célia, chaque chose est à sa place : « en haut, j’ai des boissons Lisbeth et de la bière locale que je me fais livrer par le système de consignes YSE », détaille cette habitante de l’hypercentre.

Au milieu, des courses commandées sur Hello Fresh une fois par semaine : « Je choisis mes recettes et je reçois tous les ingrédients pour les faire avec une petite fiche détaillant les préparations, poursuit la jeune femme. Ça m’évite de faire les courses : je n’aime pas trop ça, car je ne sais jamais quoi prendre. » Quand elle y va, c’est pour prendre des petits trucs ponctuels. Comme des yaourts Nesquik, un souvenir d’enfance. « Globalement, on peut le dire, j’ai vraiment le palais d’un enfant de 5 ans », glisse-t-elle en riant.

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires

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© Adrien Labit / Pokaa

Travailleuse indépendante dans le secteur de la communication, Célia cuisine peu. « Sauf pour les autres. Pour moi seule, je n’ai pas la patience de passer des heures en cuisine. J’ai tendance à préférer ce qui est prêt rapidement. Surtout le midi. Je n’aime pas couper ma journée et je mange souvent dehors. »

La jeune femme avoue être « une adepte » des plats surgelés Picard et en possède toujours quelques-uns en réserve dans son congélateur. « Quand j’y vais, j’y croise essentiellement des trentenaires ou des jeunes actifs en pause dej, comme moi. » Une fois par mois, cependant, Célia passe au marché de la place Brooglie pour faire provision de légumes locaux. « J’ai un blender mixeur chauffant. L’hiver, je fais des soupes. » Rapidement, encore et toujours.

Le mieux du moins cher

Adrien, 37 ans

Plat doudou : le gratin de pâtes avec beaucoup d’emmental
Ce qu’il cuisine quand il reçoit : welsh, feijoada ou carbonnade
Plaisirs régressifs : les crêpes maison et les bonbons
Le truc un peu trop cher mais qu’il achète quand même : l’huile d’olive

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

Dans le frigo d’Adrien, il n’y a pas grand-chose. Du beurre salé – must have de tout français de l’ouest en exil – un peu d’emmental, du jambon et de la crème. « Je n’ai pas eu le temps de faire les courses cette semaine », s’excuse-t-il presque devant les étagères à demi vides.

Depuis le confinement, ce n’est pas au frais que le jeune homme stocke la plus grande partie de ses provisions, mais dans un placard où deux étagères lui servent à stocker boites de conserve, soupes en briques, pommes de terre et confiseries.

« Lorsque nous avons été confinés, j’ai réalisé que je n’avais quelques jours de réserves alimentaires à la maison. J’avais surtout du frais. Depuis, j’ai pris l’habitude de stocker. » Pour ce journaliste indépendant résidant dans les quartiers sud de Strasbourg, la crise sanitaire a marqué un tournant en matière d’habitudes alimentaires.

« Comme on ne pouvait plus sortir, j’ai pas mal décompensé sur la bouffe. J’ai commencé à m’acheter des produits un peu plus chers, comme de la viande de bonne qualité, ou des produits dans les épiceries fines du centre-ville. J’ai upgradé mes courses alimentaires pour me faire plaisir. »

Mais l’inflation qui a suivi a changé la donne. « C’est arrivé en même temps qu’une baisse de mes revenus, alors j’ai coupé dans mes dépenses. Aujourd’hui, je prends le mieux du moins cher et je regarde si tous mes achats sont nécessaires. Si tous les produits que j’utilise régulièrement sont absolument nécessaires. Je suis presque revenu aux habitudes d’achat que j’avais quand j’étais étudiant. Je regarde à nouveau les prix au kilo dans les rayonnages. »

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

Côté cuisine, le jeune homme privilégie des recettes « qui calent le ventre ». « J’essaie de faire un gros plat qui va me faire plusieurs repas, comme une tartiflette, un gratin ou des pâtes bolo. » Doucement, mais sûrement, Adrien a perdu l’envie de cuisiner pour lui. « Avant, je pouvais passer une journée à me réjouir de ce que j’allais me cuisiner le soir. Maintenant, c’est une servitude. »

« Je pense que c’est en lien avec l’emprise du travail et de la connexion aux réseaux sociaux le soir. Quand j’étais étudiant, je n’avais pas internet chez moi et je ne binge-watchais pas des séries », glisse-t-il dans un rire. Reste la cuisine pour les ami(e)s, pour lesquel(le)s Adrien peut en revanche passer beaucoup de temps devant les fourneaux. La plupart de ses recettes stars étant des plats qu’il faut laisser mijoter.

Cuisiner parfois, mais local

Arthur, 32 ans

Plat doudou : les pâtes à la carbonara – avec de la crème.
Pour recevoir : le poulet au curry ou les pâtes bolognaises
Plat de la flemme : les pâtes au ketchup

Frigo alimentation cuisine habitudes alimentaires © Adrien Labit / Pokaa

À l’étage d’Arthur, dans le frigo de sa colocation des Contades, il y a des champignons et un sachet d’emmental râpé. « En ce moment, je ne cuisine pas beaucoup, détaille le trentenaire en recherche d’emploi. Cela vient beaucoup par période. Parfois, je vais préparer beaucoup de chose à la maison. Parfois, j’ai la flemme de cuisiner. »

Quand il fait les courses cependant, Arthur veille à acheter des produits locaux, issus si possible de l’agriculture raisonnée ou bio. « Je vais à la Coopalim. J’essaie d’éviter la grande distribution et son greenwashing, ses emballages trompeurs. »

Sur ses étagères, des pâtes, du riz et du sucre en vrac, des conserves de légumes et des purées d’oléagineux. Mais pas de produits transformés. « J’évite au maximum.» Petit budget oblige, le Strasbourgeois a réduit sa consommation de viande et de fromage. Afin de pouvoir continuer à acheter des produits frais de qualité.