Si le titre français du nouveau roman de Sefi Atta, Made in Nigeria, n’est pas terrible, on comprend vite qu’il est plus sensé qu’il n’en a l’air. Le narrateur, Lukmon Karim, vient d’arriver à New York avec sa femme et leurs deux enfants, Taslim, bientôt 17 ans, et Bashira, 14. Nous allons les accompagner jusqu’à l’automne 2001. On est en 1999. Ils s’installent d’abord chez un cousin, un type pénible qui ne cesse de dénigrer leur pays et de s’en prendre aux noirs, «feignants de nature» – inutile de lui faire remarquer qu’il est noir. Un soir qu’il les a mis au défi de citer un seul produit que le Nigeria soit capable de fournir, Lukmon, qui ne répond jamais, songe au moment de se coucher à une repartie. Le cousin voulait un exemple ? Eh bien, «il lui suffisait de regarder autour de sa table. Ma famille en était un, avec le respect immérité que nous lui témoignions et notre extrême aptitude à la tolérance. Nous étions les produits de notre pays, conçus par la tradition, conditionnés par l’adversité et oblitérés par les régimes militaires.»

Le titre original, The Bad Immigrant, aurait aussi bien convenu. Pour le cousin, le mauvais immigrant est celui qui se montre incapable de saisir sa chance. Lukmon Karim pense autrement. Le jour où Bashir