La troisième édition du baromètre des territoires d’Elabe a livré ses résultats : seuls 57% des Centraises et des Centrais se disent attachés à leur région et 43% des 800 personnes interrogées dans cette enquête (pour la seule région Centre-Val de Loire, parmi les 10 000 Français interrogés en ligne du 9 octobre au 5 novembre 2024) expriment leur pessimisme concernant l’avenir de leur région.
Le déficit de services publics arrive en tête des points noirs relevés dans ce sondage, tandis que 55% des sondés estiment que le territoire est mal desservi par les transports publics. Sans surprise, la question des déserts médicaux revient aussi avec acuité. Une majorité des habitants (54%) se sent « exposé et vulnérable au risque d’avoir des difficultés à me soigner en cas de maladie par manque de soignants », soit neuf points de plus que la moyenne nationale. Autre indicateur : le Centre-Val de Loire arrive en tête des régions où les jeunes ressentent du désœuvrement. Plus d’un Centrais sur deux assure qu’il n’y a « pas grand-chose à faire pour les jeunes » et qu’ils s’ennuient ». Dans ce tableau sombre, une éclaircie, toutefois : 77% des habitants du Centre-Val de Loire interrogés disent « se sentir heureux ».
Un sentiment d’exclusion qui diminue
En dépit des politiques culturelles et touristiques régionales (l’année Viva Leonardo, les Nouvelles Renaissances, le développement de la Loire à Vélo), le sentiment d’appartenance au territoire est encore très perfectible. Dans certains territoires, notamment en Eure-et-Loir, la population se sent exclue de l’axe ligérien (Orléans, Blois, Tours), la vitrine économique et sociale de la région, dont Nicolas, un habitant de Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir) méconnaît le périmètre exact. « Quand je vais dans une plus grande ville pour faire des courses en famille ou pour sortir avec mes amis, c’est au Mans (Sarthe) que je pense en premier. Pas à Tours ou Orléans. Et je n’ai jamais mis les pieds à Châteauroux et à Bourges », reconnaît ce plombier-chauffagiste.
« On peut se sentir Breton ou Normand mais on ne sent pas habitant du Centre-Val Ligérien. Il n’y a même pas de terme pour qualifier la population. Pour qu’il y ait un sentiment d’appartenance, il faut une histoire commune. Ce n’est pas le cas. »
Christophe Le Dorven, président du conseil départemental d’Eure-et-Loir
Christophe Le Dorven, le président du conseil départemental d’Eure-et-Loir, où s’exerce un fort tropisme francilien dans les principales agglomérations (Chartres et Dreux, reliées par le train à Paris, mais à aucune des grandes villes de la région), n’est pas surpris par cette confession : « Qu’y-a-t-il de commun entre le Berry et le Drouais Thimerais ? », s’interroge-t-il. « On peut se sentir Breton ou Normand mais on ne sent pas habitant du Centre-Val Ligérien. Il n’y a même pas de terme pour qualifier la population. Pour qu’il y ait un sentiment d’appartenance, il faut une histoire commune. Ce n’est pas le cas. Ça ne veut pas dire que les choses n’auront pas évoluées dans 100 ans. Mais pour cela, il faut arrêter de bouger les frontières. »
Ce sentiment d’exclusion, exprimé par les Euréliens, tend néanmoins à se tarir. De l’aveu de Christophe Le Dorven, « les politiques patrimoniales, touristiques et culturelles, très tournées il y a une dizaine d’années d’abord vers la vallée de la Loire, nous considèrent davantage. La région soutient des dispositifs, portés par les associations et les collectivités d’Eure-et-Loir ». Il y voit la reconnaissance que l’Eure-et-Loir n’est pas seulement « une terre où pousse du blé ».