Le nucléaire, choix des Gafam.

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Le nucléaire, choix des Gafam.

ÉNERGIE – Mauvais pays, mais la formule est la bonne. Mardi 3 juin, Meta a annoncé avoir conclu un accord sur vingt ans avec la société américaine Constellation pour bénéficier de l’énergie de l’une de ses centrales, dans l’État de l’Illinois. Mais il ne s’agit pas, pour alimenter les serveurs qui font tourner l’intelligence artificielle de plus en plus gourmande de Facebook, Instagram et WhatsApp, de n’importe quelle centrale : le Clinton Clean Energy Center est un réacteur nucléaire. De quoi apporter de l’eau au moulin de la conception macronienne de l’attractivité française.

Plusieurs fois, depuis le tournant du président sur la question du nucléaire entre 2020 et 2022, il a vanté cette énergie comme un avantage clef de l’hexagone, en particulier pour les entreprises de la cyberéconomie. En février dernier, lors du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle de Paris, il vantait ainsi la France comme « l’un des rares pays au monde où les exploitants de data centers peuvent sécuriser à long terme l’accès à une électricité fiable, à des prix attractifs et connus », tout cela grâce à « l’avantage unique au monde de l’énergie décarbonée nucléaire ». La formule faisait face au « Drill baby, drill » de Trump et son appétit pour les énergies fossiles.

Il faut bien avouer que l’idée ne sort pas de l’Élysée ou des tiroirs de la French Tech. En septembre dernier, Microsoft annonçait un accord avec la centrale de Three Mile Island, en Pennsylvanie. Le géant de la tech va tout simplement permettre de redémarrer l’un de ses réacteurs à l’arrêt depuis 2019, et dont le démantèlement total était attendu vers 2079.

Mini-réacteurs et fusion nucléaire

D’autres dans les Gafam, et plus généralement dans la tech, ont fait le choix de l’atome avec des méthodes différentes, comme l’expliquait il y a quelques mois un rapport de l’Institut de Recherches Internationales et Stratégiques (IRIS). Si Oracle, Microsoft et Meta ont investi directement « des centaines de millions de dollars » dans la construction mini-réacteurs, OpenAI, l’entreprise de ChatGPT, prend des parts dans des sociétés d’énergies nucléaires. Parmi elles, la très futuriste Hélion, qui promet des réacteurs non pas à fission, mais à fusion nucléaire…

« Ce que nous constatons, c’est que l’énergie nucléaire présente de nombreux avantages », déclarait Michael Terrell, directeur principal de l’énergie et du climat chez Google à la chaîne CNBC en décembre. « C’est une source d’électricité sans carbone. C’est une source d’électricité qui peut fonctionner en permanence. Et elle a un impact économique considérable. »

Si cette fièvre de l’atome, poussée par les besoins gargantuesques en énergie de l’IA, a bien été diagnostiquée par Emmanuel Macron, pourquoi ne pas « Choose France », du nom du sommet instauré en 2018 ? D’abord parce que l’administration Biden, poussée par ces mêmes Gafam, a relancé le secteur moribond du nucléaire en États-Unis en facilitant la construction de nouveaux réacteurs.

Mais l’ampleur du changement en cours dépasse peut-être le simple contexte législatif. Comme le fait remarquer l’IRIS, les investissements combinés des géants américains sont sur le point d’en faire non plus des consommateurs, mais bien des acteurs du marché de l’énergie, notamment aux États-Unis. Si la France a bien un atout avec le nucléaire, l’argument de « l’avantage unique au monde » perd de sa superbe auprès des Gafam, qui prennent eux-mêmes en charge la construction de leurs réacteurs.