Les niveaux de pollution de l’air constatés en 2024 poursuivent la baisse enregistrée depuis vingt ans en Île-de-France. D’après le dernier bilan publié ce mercredi 9 avril par Airparif, organisme de surveillance de la qualité de l’air dans la région, elle aurait même été divisée par deux durant ce laps de temps.
Selon Antoine Trouche, ingénieur chez Airparif, l’amélioration globale des taux de pollution serait essentiellement due « aux réglementations et politiques publiques » ainsi qu’aux conditions météorologiques « favorables à la dispersion de la pollution ».
Baisse drastique de la voiture à Paris
D’après les relevés de l’association indépendante, entre 2005 et 2024, « les concentrations des polluants de l’air réglementés les plus nocifs pour la santé humaine, à savoir les particules fines et le dioxyde d’azote, ont été divisées par deux (respectivement -55 % et -50 %). » Leur inhalation augmente le risque de maladies cardiovasculaires et respiratoires et impacte la santé périnatale.
Les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) – un gaz polluant qui aggrave notamment le risque de mortalité lié au diabète et aux AVC – ont, elles, baissé en moyenne de 50 % entre 2004 et 2024. Malgré tout, en 2024, 800 Franciliens étaient encore exposés à des concentrations supérieures à la valeur limite réglementaire depuis 2008, indique le bilan.
« Sur la région, les niveaux moyens en dioxyde d’azote sont largement supérieurs au niveau des axes routiers les plus fréquentés, notamment autour du périphérique, axe le plus dense de toute l’Europe, mais aussi des grands boulevards et autoroutes. Les personnes qui habitent à 50 m de ces routes sont bien plus exposées à la pollution », constate Antoine Trouche.
D’après lui, Paris reste d’ailleurs le seul endroit en France avec Lyon à présenter des zones qui dépassent encore les normes européennes. Pour autant, « la pollution de l’air dans la capitale s’améliore beaucoup plus vite à Paris que dans le reste de l’Île-de-France », révèle l’ingénieur Airparif. D’abord parce que la capitale « partait de plus loin » mais aussi grâce à un report massif des usagers de la voiture vers les mobilités douces.
« Le nombre de kilomètres parcourus en voiture à Paris intra-muros a été divisé par deux en 20 ans et, si on y inclut le périphérique, ça a été divisé par un quart, indique Antoine Trouche. Au niveau de la région, cette baisse n’est que de quelques pourcents. »
« La pollution de l’air a baissé à Paris de 40% en dix ans grâce à une baisse équivalente du trafic automobile liée à notre politique en faveur des transports en commun et des mobilités actives, se félicite ainsi Dan Lert, adjoint (EELV) d’Anne Hidalgo chargé du plan climat. Il est simple de comprendre que moins de voitures, c’est moins de pollutions. »
De quoi inciter la Ville à poursuivre sa politique, pour le périphérique notamment. « Pour les enfants qui vivent à proximité de cette autoroute urbaine, les études scientifiques sont claires : c’est +30% de cas d’asthme. Il s’agit d’un véritable scandale sanitaire. Nous irons donc plus loin pour protéger la santé des habitants. En transformant le périphérique et en soutenant le maintien des ZFE supprimées en commission à l’Assemblée nationale mais qui sauvent des vies », poursuit Dan Lert.
Seulement 3 épisodes de pollution en 2024
À l’échelle régionale, la diminution globale de la pollution se poursuit grâce à une « imbrication des réglementations européennes, nationales et locales » et aux « politiques publiques mises en place pour réduire les émissions de polluants de l’air liées notamment au trafic routier, au chauffage et aux activités industrielles ».
Parmi celles-ci, on peut citer le renouvellement du parc de voitures anciennes et diesel en voitures plus récentes et électriques grâce aux aides de l’État, les vignettes Crit’Air, la limitation de la vitesse et les contraintes à l’usage de la voiture, le développement des infrastructures pour les vélos, la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP) sur les entreprises, les aides pour passer à la géothermie ou encore la mise en place des zones à faibles émissions en 2017… « Depuis que les ZFE existent, on observe une baisse des émissions d’oxyde d’azote de 42 % dont 6 points sont liés à ces zones », ajoute encore Antoine Trouche.
Seule exception à toutes ces baisses : les indicateurs d’impact sur la santé de l’ozone de basse altitude (O3) – nocif pour le système respiratoire – ont globalement stagné entre 2004 et 2024. « Les baisses des émissions locales des gaz polluants précurseurs de l’ozone sont contrebalancées par le réchauffement climatique, qui favorise sa formation », indique Airparif. Les taux montrent donc des variations fortes d’une année sur l’autre en fonction des conditions météorologiques.
Trois épisodes de pollution, un aux particules et deux à l’ozone, ont été enregistrés en 2024 en région parisienne, contre 10 l’année précédente. Il s’agit du nombre de journées de pollution par an le plus bas jamais enregistré.
10 mois d’espérance de vie en moins
Une amélioration notable qui s’accompagne d’une baisse des décès prématurés liés à la pollution de l’air. En 10 ans, ce chiffre a diminué de 40 %, passant de 10 000 à 6 200 entre 2010 et 2019. « Ces travaux mettent en évidence une baisse attendue d’encore un tiers d’ici 2030 », prévoit Airparif.
La pollution de l’air n’en reste pas moins un problème de santé publique majeur. « Elle causait encore en 2019 une perte moyenne de l’ordre de 10 mois d’espérance de vie par adulte, et était responsable de 10 à 20 % des nouveaux cas de maladies chroniques respiratoires (asthme, cancer du poumon, BPCO), ainsi que de 5 à 10 % des pathologies cardiovasculaires et métaboliques (infarctus, AVC, diabète de type 2) », souligne l’association.
En 2024, plus de 2,6 millions de Franciliens respiraient un air dont les concentrations de polluants étaient supérieures aux seuils de la nouvelle directive européenne, à respecter en 2030. « Il faut absolument que les politiques publiques pour la réduction des émissions de polluants de l’air se poursuivent et s’intensifient pour atteindre ses seuils », insiste Antoine Trouche. Y parvenir « permettrait d’éviter 7 900 décès prématurés », anticipe Airparif.