Fondé en 1991, Interaction (230 agences, 1 200 salariés et 504 M€ de chiffre d’affaires en 2024) a vu arriver Zalina Digourova à la vice-présidence du groupe. Que faut-il voir dans cette nomination ? Qu’à bientôt 68 ans, vous pensez à la transmission ?
Loïc Gallerand : La transmission, c’est la chose la plus difficile à réaliser pour une entreprise. Il y a plusieurs possibilités. Soit je vends. Soit j’embauche un directeur général qui rachète mes parts et se fait accompagner par un fonds. Soit – et c’est la solution la plus recherchée de tous les chefs d’entreprise – je fais une transmission familiale. Mes enfants n’ont pas l’âme de chefs d’entreprise et évoluent dans des domaines qui n’ont strictement rien à voir. Je suis content pour eux. L’important, c’est qu’ils aient trouvé leur chemin et qu’ils soient heureux.
Votre regard s’est donc tourné vers Zalina Digourova, votre belle-fille, qui occupait jusqu’ici un poste de directrice administrative et financière au sein du groupe parisien de services numériques Neurones…
L.G. : Je suivais sa carrière depuis un moment. On échangeait beaucoup sur l’économie, sur Interaction… Je la trouvais pertinente. Et elle connaît bien le digital, que je veux développer. Un jour, je lui ai donc proposé de me rejoindre. On en a discuté et nous nous sommes entendus sur un poste de vice-présidente. Je l’ai annoncé au comité stratégique en septembre dernier.
La transmission, c’est la chose la plus difficile à réaliser pour une entreprise.
Zalina Digourova, qu’est-ce qui, à 35 ans, vous a conduit à accepter cette offre ?
Zalina Digourova : Pour être honnête, j’ai hésité au début ! Pas tant sur le projet ou la société, mais à cause du lien avec Loïc Gallerand. J’ai toujours avancé par moi-même et le fait d’intégrer un groupe familial me faisait un peu peur. Je craignais d’être réduite au statut de belle-fille et que ça mette de côté tout mon parcours, tous les efforts que j’ai faits jusqu’ici. Mais, après coup, je me suis dit que ça pourrait être une belle aventure. Je pense que Loïc a beaucoup de choses à m’apprendre et à transmettre professionnellement. Le projet sur le développement digital est intéressant, il y a un gros potentiel.
Comment ce côté « belle-fille de » a-t-il été perçu en interne ?
Z.D. : Je ne sais pas vraiment, mais ce genre de réflexe est humain et normal. À moi de prouver que je ne suis pas là juste parce que je suis la belle-fille. C’est le début de l’aventure. Un début assez intense, d’ailleurs.
Pourquoi ?
L.G. : Parce que le départ de Vincent Poussier [le directeur général du groupe, nommé en 2022, NDLR] n’était pas prévu.
Remplacé en mai par deux nouveaux directeurs généraux, Vincent Poussier était, pour beaucoup, un successeur potentiel à la tête d’Interaction. Son départ est-il lié à l’arrivée de Zalina Digourova ?
L.G. : C’est vrai qu’il n’était pas très content quand j’ai annoncé la nomination de Zalina, mais ce n’est pas directement lié.
Z.D. : La nouvelle organisation le prouve, d’ailleurs, puisque je ne prends pas de poste de directrice générale. Dans les entreprises, les changements de gouvernance sont naturels. À un moment, on se rend compte que le monde et les enjeux évoluent, on doit donc s’adapter.
Nous avions envie d’instaurer un management plus horizontal, plus collectif. J’y crois beaucoup.
Faut-il voir dans la nomination de deux directeurs généraux (au lieu d’un) le signe d’éventuels dysfonctionnements à corriger ?
Z.D. : Il n’y a pas de manquements quelconques à corriger. Plutôt une envie d’instaurer un management plus horizontal, plus collectif. J’y crois beaucoup. Nous avons profité des changements récents pour mettre ça en place.
Comment se partagent les tâches entre le président, la vice-présidente et les directeurs généraux ?
Z.D. : Avec les deux DG, nous fonctionnons à trois au quotidien. Loïc est toujours au courant de ce qu’il se passe et est toujours le valideur final des décisions importantes et stratégiques. C’est notre garde-fou.
L.G. : Depuis 2023, j’ai décidé, pour me préserver, de prendre du champ au moins deux semaines par mois. Zalina est donc là pour faire le relais et pour avoir une vision à 360° qui manquait jusqu’ici.
L’idée est-elle de lâcher complètement les rênes prochainement ?
L.G. : Non, parce que je suis passionné par ce que je fais : accompagner les gens dans leur cheminement et les voir grandir. Chez Interaction, on recrute, on comprend et on accompagne la personne pour qu’elle soit là où elle se sente le mieux. Les résultats viennent après.