Des astronomes ont récemment identifié une nouvelle étoile pas comme les autres qui semble transgresser un certain nombre de règles, et pourrait être la première représentante d’une nouvelle catégorie de corps célestes.

Cet objet étrange a été localisé grâce à Chandra, un illustre télescope spatial spécialisé dans le domaine des rayons X, et à l’ASKAP, un radiotélescope basé en Australie. En combinant des observations de ces deux engins, une équipe d’astronomes a mis le doigt sur un objet appelé ASKAP J1832−0911 – et ils ont rapidement compris que ce dernier allait leur donner du fil à retordre.

Les sources radio transitoires de longue durée, un mystère tenace

Il s’agit en effet de ce qu’on appelle une source radio transitoire – un objet qui émet périodiquement des salves d’ondes radio. Les signaux de ce genre sont souvent associés à des pulsars, des étoiles à neutrons qui tournent sur elles-mêmes à une vitesse ébouriffante tout en émettant un puissant flux de particules accélérées par leur champ magnétique très intense. À cause de cette vitesse de rotation énorme, les signaux issus des pulsars ont tendance à être très proches les uns des autres; l’intervalle peut varier de quelques millisecondes à une poignée de secondes.

Mais ces dernières années, les astronomes ont aussi repéré d’autres sources transitoires radio à la période nettement plus importante, parfois jusqu’à plusieurs dizaines de minutes. Une durée que l’on pensait autrefois impossible, et pour cause : selon la théorie traditionnelle, les objets en rotation si lente ne devraient pas être capables de maintenir les conditions nécessaires à l’émission d’ondes radio !

Les sources de ce genre se sont donc retrouvées au coeur d’une grande quête scientifique qui est encore loin d’avoir abouti. À ce jour, nous ne savons toujours pas exactement quel type d’objet est capable de produire ce genre de signal. S’agirait-il de magnétars ralentis par un phénomène inconnu ? De naines blanches appartenant à un système binaire ? Pour l’instant, le mystère reste entier – et il continue même de s’épaissir à mesure que les astronomes découvrent des signaux à la période de plus en plus importante.

Des émissions d’ondes radio… et de rayons X

La découverte de J1832−0911 ajoute une nouvelle pièce à ce grand puzzle scientifique. Sa période, mesurée par l’ASKAP, atteint en effet 44 minutes, ce qui en fait l’une des sources radio transitoires les plus lentes jamais identifiées. Même s’il ne s’agit pas d’un record absolu (cet honneur revient à GLEAM-X J0704-37, un objet identifié en 2024 dont le signal nous parvient toutes les… 174 minutes), ce chiffre suffit déjà à en faire une cible particulièrement intéressante pour les astronomes.

Mais ces derniers n’étaient pas au bout de leurs surprises, car leur nouvelle trouvaille présente une autre particularité encore plus enthousiasmante. Grâce au télescope Chandra, ils ont constaté que l’objet ne se contente pas d’émettre des ondes radio : il émet aussi un signal similaire dans le domaine des rayons X, ce qui n’avait jamais été observé auparavant.

Pour couronner le tout, l’intensité des émissions associées à J1832−0911 ont chuté de manière dramatique après plusieurs mois d’observation, et ce dans les deux domaines à la fois. Et là encore, c’est une grande première. Cet étrange mélange d’impulsions à court terme et de changements à long terme ne ressemble à rien de ce qui a été observé dans notre galaxie à ce jour.

Askap J1832−0911 Zoom© X-ray: NASA/CXC/ICRAR, Curtin Univ./Z. Wang et al.; Radio: SARAO/MeerKAT; Image processing: NASA/CXC/SAO/N. Wolk

Comme à l’accoutumée, les astronomes à l’origine de cette observation ont donc tenté de déterminer quel genre de corps céleste pourrait se comporter de manière aussi atypique. Et comme pour les autres sources radio transitoires à longue période, ils se sont d’abord retrouvés face à un mur. Les caractéristiques du signal radio, par exemple, semblent incompatibles avec la piste du magnétar.

Celle du pulsar ou de la naine blanche appartenant à un système binaire semble également improbable. L’intensité des signaux associés à ces couples est généralement bien plus importante que ce que les auteurs de l’étude ont observé dans le cas de J1832−0911. Pour rendre ce scénario cohérent, il faudrait en effet que J1832−0911 dispose du champ magnétique le plus puissant jamais observé chez une naine blanche dans notre galaxie.

Un phénomène encore jamais identifié ?

En conclusion, il est donc possible qu’un phénomène inconnu vienne affecter le comportement de l’objet à l’origine de ce signal… ou même que nous soyons en présence d’un nouveau type de corps céleste encore jamais documenté. 

Il sera donc intéressant de se pencher sur les prochains travaux que cette découverte fascinante va sans doute susciter. Avec un peu de chance, J1832−0911 permettra enfin aux astrophysiciens de mieux comprendre l’origine de ces signaux radio si étranges, et par extension, de récolter de nouvelles informations précieuses sur le fonctionnement de notre univers.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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