« Je me pose la question de revendre de la villa Romaine ». Lors du point presse qu’il tenait mercredi pour faire le point sur la situation de la Villa Noailles, Jean-Pierre Giran n’a pas caché avoir des réserves sur le « rendement » de la maison, propriété de la Métropole, mise à disposition de l’association pilotant le centre d’art.

« La revendre pourrait être un signal important », explique-t-il en faisant référence à la dette accumulée par l’association pourtant largement subventionnée par les acteurs publics (nos précédentes éditions).

Autre possibilité à l’étude du côté de TPM, changer la destination de la bâtisse et son jardin.

En clair, la conserver dans le patrimoine, – ce qui présente l’avantage de ne pas avoir à chercher un acquéreur -, mais récupérer les clés pour y loger une autre activité… permettant au passage d’ouvrir davantage l’extraordinaire site au public.

La fermeture quasi permanente du lieu fait en effet partie des critiques qui se font le plus entendre.

À l’heure actuelle, la maison sert en effet principalement de lieu de stockage. Toutes les collections des festivals de mode et de photos s’y entassent au fil des ans. Un entrepôt de grand luxe où le public n’est invité qu’à de rares occasions, comme lors des rendez-vous aux jardins, ou des journées du patrimoine.

Idem pour le parc arboré et fleuri, dont les jeux de miroirs, fresques, alcôves et statues s’ennuient, faute de promeneurs.

Interrogée sur l’hypothèse d’avoir à se défaire de la villa Romaine, l’association Villa Noailles « ne fait pas de commentaire ».

TPM peut-elle revendre ?

Question subsidiaire, mais pas totalement anodine, la Métropole a-t-elle les mains libres pour se défaire du bâtiment ?

Son rachat en 2018 avait fait l’objet d’un partenariat public-privé. Chez le notaire, pour signer le chèque de 1,5 million d’euros, TPM avait débloqué 300 000 € et obtenu des subventions de l’État (400 000 €), la Région (283 000 €), le Département (280 000 €) mais aussi les maisons Chanel et Hermès, accompagnées par les fondations Fiorucci et Carmignac.

Autant d’acteurs qui ont mis la main à la poche, il y a moins de 10 ans pour sponsoriser la création et la mode. Seront-ils d’accord pour une revente ? À ce stade pas de certitude. « Je ne suis pas seul décideur », concède le président de la Métropole.

Un autre obstacle se présente également à une mise sur le marché. Jean Joeriman, l’ancien propriétaire a certes légué sa propriété au Château de Versailles (lire ci-dessous), mais laissé l’usufruit d’une dépendance à sa gouvernante historique. Une dame aujourd’hui âgée et sous tutelle qui conserve tous ses droits sur le bien. Une situation qui pourrait compliquer l’affaire.

Le drôle de destin d’une villa pas comme les autres

Bâtie dans les années 1880 dans le quartier Châteaubriand, la villa Romaine doit son nom et sa réputation à l’exubérance avec laquelle Jean Joeriman, qui fut son propriétaire pendant 60 ans, a su la décorer et l’arborer dans un style évidemment antique.

À sa mort en 2012, il la lègue au Château de Versailles… qui manifestement ne sait pas trop quoi en faire et cherche rapidement à s’en séparer.

Poussé par François Hollande, qui vient d’accorder le titre de centre d’art à la Villa Noailles, TPM la rachète en 2018 et la met à disposition de l’association. Objectif affiché alors : en faire un espace de conservation et y accueillir des artistes en résidence. Elle fait ensuite scandale en 2019 en proposant une expo polémique (célébrant sans pudeur l’homosexualité) interdite aux mineurs. « Une exposition durant laquelle la liberté frôlait la licence », s’étouffe encore Jean-Pierre Giran en avouant « être sorti en courant ».