Arnaud Dupleix a « le seum ». Celui-là même qui avait servi à créer l’acronyme du Collectif des écoles de Marseille (Cem) qu’il a cofondé avec d’autres parents d’élèves, enseignants et agents des écoles de Marseille il y a cinq ans. Ce mercredi 18 juin, ce parent d’élève soucieux de la bonne utilisation de l’argent public a pris connaissance avec un brin d’amertume, de l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Marseille.
Deux semaines après l’audience des parties, la cour a suivi les conclusions du rapporteur public en annulant le jugement du tribunal administratif du 20 janvier qui avait retoqué l’accord-cadre concernant le plan écoles. D’abord parce que le jugement « omet d’admettre l’intervention du ministre de l’Économie », qui aurait dû être considéré comme partie et n’a pas pu réaliser de contradictoire. Ensuite parce que, comme le relevait le rapporteur public, les requêtes n’ont pas été déposées dans les délais impartis.
En janvier, le juge avait donné raison aux citoyens qui faisaient valoir en justice l’illégalité d’un accord-cadre signé entre la Ville et la Société publique des écoles marseillaises (Spem) qui confiait à la Spem l’entretien et la maintenance des nouvelles écoles construites dans le cadre du plan à 1,5 milliard d’euros.
Les magistrats avaient laissé à la Ville de Marseille jusqu’au 1er août pour se mettre en règle, ce qui n’a pas empêché la commune, l’État et la Spem d’interjeter appel. « On est dégoûté parce qu’on est retoqué pour une question d’irrecevabilité, confie Arnaud Dupleix. On se laisse le temps de réfléchir, mais sur le fond, le rapporteur public nous donnait raison, cela signifie que le risque contentieux est énorme pour chaque marché subséquent qui sera passé en s’appuyant sur l’accord-cadre. »
« Un intérêt général qui dépasse Marseille »
La cour administrative d’appel s’appuie sur la date de publication au bulletin des marchés publics pour considérer que les citoyens ont attaqué tardivement l’accord-cadre et le marché subséquent. « Ils ont d’abord attaqué la délibération, en méconnaissance de la jurisprudence de l’arrêt Tarn et Garonne de 2014 qui permet aux tiers de recourir non plus contre les délibérations mais contre les contrats de marché et quand ils ont finalement attaqué l’accord-cadre, c’était trop tard », explique leur avocat en appel Me Benoît Candon.
« On nous dit qu’on aurait dû prendre un avocat en première instance, mais nous ne sommes que des citoyens avec peu de moyens, rappelle Arnaud Dupleix. Nous n’attaquons pas pour le plaisir, on espère que la stratégie de la Ville de Marseille sera revue pour ne pas confier à du privé l’entretien de bâtiments publics. Déjà, dans ses derniers marchés globaux de performance, elle a rendu optionnelle la partie entretien. »
Au niveau national, un projet de loi est en discussion pour rendre légal le fait de remettre la gestion de l’entretien des équipements qu’elle construit à une Société publique locale d’aménagement d’intérêt national comme la Spem. « C’est un sujet peut-être trop technique pour intéresser le grand public, mais il en va de l’argent du contribuable, insiste Arnaud Dupleix. On ne fait que défendre un intérêt général qui dépasse Marseille. »