Il représentait une avancée importante dans la prise en compte de la santé des femmes au travail. Mais voilà que le congé de santé gynécologique testé par Strasbourg pour ses agentes a été suspendu par le tribunal administratif ce mardi 24 juin. Lequel estime que la loi ne permet pas à une collectivité de mettre en place un tel dispositif. Il a donc annulé les délibérations par lesquelles la ville et l’Eurométropole avaient décidé cette expérimentation.
Depuis septembre, les agentes de la ville et de l’Eurométropole de Strasbourg souffrant de douleurs menstruelles, d’endométriose ou de symptômes de la ménopause pouvaient disposer de 13 jours annuels d’absence exceptionnelle, sur présentation d’un certificat médical. 118 disposaient de ce document, 67 en ont véritablement bénéficié (sur 3 500 salariées).
Mais la préfecture du Bas-Rhin avait attaqué ce congé spécial devant la justice administrative, en faisant valoir que sa création, sous la forme d’une autorisation spéciale d’absence (ASA), était «dépourvue de toute base légale». Le tribunal lui a donc donné raison.
«C’est une grande déception», a regretté la maire écologiste, Jeanne Barseghian. Elle a annoncé faire appel de cette décision. Car le bilan de cette expérimentation est, selon l’édile, «très positif».
La possibilité de prendre des jours est pour le moment suspendue, mais d’autres volets du dispositif sont maintenus. Comme l’aménagement des conditions de travail ou la sensibilisation des managers – tout aussi importants pour adapter le travail à la santé des travailleuses.
Strasbourg n’est pas la seule collectivité à se heurter à une telle décision. Une circulaire du 21 mai de la direction générale des collectivités locales, relayée par Maire-info, a appelé les préfets à s’opposer aux délibérations des communes créant des autorisations spéciales d’absences pour les agentes souffrant de règles douloureuses. «En l’absence de base légale, de telles délibérations sont illégales», souligne cette circulaire, qui appelle les préfets à adresser aux collectivités concernées «un recours gracieux, puis, le cas échéant, déférer la décision au tribunal administratif».
Or, depuis 2023, pour pallier l’absence de légalisation du congé menstruel, de nombreuses collectivités ont mis en place des expérimentations. Plusieurs d’entre elles ont donc été attaquées par l’Etat devant la justice administrative, sur le même motif. Comme à Toulouse, en novembre, ou à Grenoble en février, où ces dispositifs similaires ont été suspendus. Contrairement à ces deux villes, le tribunal de Strasbourg a examiné l’affaire sur le fond et non en référé (qui est une procédure d’urgence). «Ce dispositif est utilisé avec beaucoup de discernement et sans abus, insiste Jeanne Barseghian. On va se mobiliser avec les autres collectivités et avec les parlementaires, il faut faire évoluer la loi.»