INTERVIEW – Qu’elle nous embarque dans un road trip fantasmagorique avec Last Paradise ou dans les aventures d’une cougar godiche dans sa série The Tourist, la photographe star canadienne nous plonge dans l’étrangeté. Rencontre.
Palette pop, atmosphère surréaliste, humour trash… Avec les séries Last Paradise et The Tourist, respectivement présentées cet été à Tours et à Arles, la photographe et réalisatrice canadienne revisite ses classiques. Dans ces histoires au glamour désenchanté, la star de l’autofiction, 43 ans, incarne une bimbo en vacances. Entre clichés kitsch et images mélancoliques, Kourtney Roy tue le temps, et cherche l’amour.
Madame Figaro . – Quel est votre état du moment ?
Kourtney Roy. – Fatiguée. Je travaille sur le scénario de mon prochain long-métrage avec un écrivain. Les débuts sont toujours excitants, mais aussi très prise de tête.
Parler de vous en promo, une corvée ?
Je n’aime pas parler de moi, mais de mes projets, j’adore.
La question que vous redoutez ?
«Raconte-moi ton parcours», et «Que signifie cette photo ?». Je n’aime pas les monologues, et je n’ai aucune leçon à donner.
Votre actu ?
Les expositions The Tourist, à Arles, et Last Paradise, à Tours, dans le cadre du prix Swiss Life à 4 mains. Et la sortie de Kryptic, mon premier long-métrage, aux États-Unis et au Canada, en attendant de trouver un distributeur en France…
Une actu plus importante que la vôtre ?
Gaza-Israël, Ukraine-Russie, Trump… Je n’ai pas assez d’ego pour oublier que le monde est en train de s’écrouler.
Votre dernière lubie ?
Écrire mes rêves au réveil.
Votre personnage dans The Tourist ?
Une cougar inculte aux cheveux peroxydés et aux ongles longs, qui aime l’argent. Elle veut s’entourer de beaux hommes, de piscines, mener une vie facile où tout est en plastique.
On rapproche toujours mon travail de celui de Cindy Sherman, ce qui me flatte. Mais l’analogie est facile…
Kourtney Roy
Vos points communs avec ce rôle ?
Il y a toujours une part de moi dans les personnages que j’incarne. Je ne les juge jamais. Cette touriste est peut-être superficielle, mais après tout, pourquoi pas ? Elle est heureuse, et s’assume telle qu’elle est, sans se triturer l’âme ou la cervelle. Ce que j’admire.
Un de vos éléments de langage ?
«Vulgaire.» Comme cette touriste dont les vacances sont celles qu’on ne fera jamais.
Ce que vous vous dites quand vous vous regardez dans le miroir le matin ?
Rien. Quand je me prépare, je fais le vide, comme si j’étais ailleurs.
Pourquoi faut-il aller voir vos expos Last Paradise et The Tourist ?
Pour rire, se faire plaisir, oublier un instant le réel en basculant dans la fiction.
Un malentendu vous concernant ?
On rapproche toujours mon travail de celui de Cindy Sherman, ce qui me flatte. Mais l’analogie est facile : certes, elle se met en scène, mais ses intentions sont différentes des miennes. Ses autoportraits cherchent à déconstruire les stéréotypes dans une forme de critique sociale. Tandis qu’à travers les miens, je crée des mondes imaginaires dans lesquels je voudrais habiter. Tout est fondé sur le fantasme, l’évasion, l’humour et le plaisir du jeu, pas sur la théorie du genre. Mon travail n’a rien de féministe.
Sur le tournage de mon dernier film, qui était très stressant, les équipes m’ont remerciée de ne jamais avoir piqué de crise
Kourtney Roy
Ce que vous aimez qu’on dise de vous ?
Que je suis calme. Sur le tournage de mon dernier film, qui était très stressant, les équipes m’ont remerciée de ne jamais avoir piqué de crise. Sous pression, je sais garder la tête froide.
Votre charge mentale du moment ?
Mon solo show à la Galerie Les Filles du Calvaire, à Paris, en octobre-novembre. Tout est possible et rien n’est encore décidé… Un challenge assez intimidant.
La dernière fois où vous avez été fière de vous ?
Hier, quand j’ai réussi à installer un nouveau filtre pour ma douche, alors que je ne suis pas du tout bricoleuse.
La critique qui vous fait plaisir ?
Qu’on ne comprenait rien à mon dernier film. Ce qui est vrai ! Il faut aimer l’ambigu, le bizarre pour pouvoir l’apprécier.
Qu’allez-vous faire après cette interview ?
Passer au laboratoire Picto récupérer un tirage photo.
«Kourtney Roy, The Tourist», du 7 juillet au 5 octobre, aux Rencontres d’Arles. rencontres-arles.com
«Last Paradise», jusqu’au 20 septembre, au Jeu de Paume-château de Tours. jeudepaume.org