Par
Laurène Fertin
Publié le
1 juil. 2025 à 16h46
C’était la première fois, lundi 30 juin 2025, que participaient le préfet de Bretagne et d’Ille-et-Vilaine Amaury de Saint-Quentin et le procureur de la République, Frédéric Teillet, au conseil municipal de la Ville de Rennes. L’objectif d’une telle invitation par la maire de Rennes, Nathalie Appéré ? Que les principaux responsables de l’action publique exposent les actions et dispositifs mis en œuvre pour lutter contre le trafic de drogues dans la métropole rennaise.
Tour à tour, préfet et procureur se sont exprimés au micro avant de répondre aux questions des différents partis politiques : Libres d’agir pour Rennes, Génération.s, Groupe écologiste et citoyen, Parti Radical, Groupe communiste, Révéler Rennes.
Sur le fond du sujet : chacun était « tout à fait clair » quant à la volonté de « combattre » le narcotrafic dans Rennes et sa métropole. Sur la forme : chiffres, faits, enquêtes, moyens ont été égrenés. Rien que nous ne sachions déjà.
Toutefois, un point moins usuel a été soulevé par Honoré Puil, vice-président de Rennes Métropole en charge de l’habitat et président du Parti Radical à la Ville de Rennes : l’impact du narcotrafic sur le parc social et, plus précisément, sur les bailleurs sociaux.
« Un manque de moyens structurels »
Président d’Archipel Habitat, Honoré Puil s’est exprimé au nom des bailleurs sociaux, « aujourd’hui [acteurs] en première ligne face au fléau du narcotrafic ».
Les bailleurs sociaux ne sont pas, par définition, des acteurs de la sécurité publique. Mais ils sont des partenaires engagés. Et, à ce titre, ils ont aujourd’hui le sentiment de buter sur les limites des outils à leur disposition comme sur le manque de moyens structurels pour lutter durablement contre le trafic.
Honoré Puil
Vice-président de Rennes Métropole en charge de l’habitat et président du Parti Radical à la Ville de Rennes
Honoré Puil se désole par ailleurs que « les procédures de résiliation de bail [soient] trop longues – même dans les cas de complicités avérées avec des réseaux de stupéfiants » et qu’il est « anormal que la procédure de conciliation préalable à la résiliation expose [les] collaborateurs à des individus liés au trafic », mettant « leur sécurité en péril ».
L’élu demande, en bref, un « engagement total, des réponses concrètes, d’un État pleinement mobilisé à [leur] côtés ».
« Un phénomène bien réel »
Selon Amaury de Saint-Quentin, il n’y a pas « d’explosion de la délinquance à Rennes », en revanche, « la ville fait face à une croissance préoccupante de trafics de stupéfiants ».
La consommation, importante, concerne essentiellement les usagers précaires et les consommateurs lors des événements festifs.
Les faits liés à la consommation de stupéfiants ont été multipliés par 3,5. Rennes est passée de 532 faits en moyenne annuelle pour la période 2016-2019 à 1 920 en 2024.
Les faits liés au trafic de stupéfiants ont plus que doublé depuis 2016, passant d’environ 200 faits par an en 2016/2017 à environ 500 faits par an en 2023/2024, précisément 492 en 2024 et 517 en 2023.
« Régler une question de badge »
Questionné sur de nombreux sujets par les différents partis, Amaury de Saint-Quentin n’a pas manqué de répondre précisément à l’interrogation de l’élu :
Vous avez dit que les bailleurs sociaux n’étaient pas des acteurs de la sécurité publique. Ce ne sont effectivement pas des policiers, bien sûr, mais ils font pleinement partie du continuum de sécurité : ils ont des gardiens, des caméras, des capacités d’adaptation des bâtiments, des remontées d’informations. Ils peuvent s’organiser sur les questions de sécurité en groupements inter-bailleurs. Cela existe dans d’autres villes.
Amaury de Saint-Quentin
Préfet de Bretagne et d’Ille-et-Vilaine
« En tout état de cause il est important qu’ils nous soutiennent, acteurs de l’action publique », a souligné le préfet, visiblement en désaccord.
« Une question de badge »
Le préfet a ensuite abordé une autre question, « anecdotique » :
Nous devons régler une question de badge pour que toutes les unités de police puissent accéder aux halls d’immeuble. J’en profite d’être dans ce conseil municipal pour le dire : j’ai pu m’étonner qu’au regard des enjeux, les bailleurs ne trouvent pas les ressources pour les fournir, sans entrer dans des considérations budgétaires qui paraissent souvent décalées par rapport aux enjeux.
Amaury de Saint-Quentin
Préfet de Bretagne et d’Ille-et-Vilaine
« J’entends que les procédures de résiliation de bail sont longues et complexes, mais sont-elles pour autant ouvertes en nombre suffisant par les bailleurs ? Je pose la question », s’est-il interrogé.
Au regard des nuisances que vous avez décrites, j’ai aussi été étonné d’entendre dire que le stockage de cocaïne dans un appartement n’était pas une source suffisante pour fonder la résiliation du bail. Je suis aussi surpris d’entendre parfois que la résiliation de bail de parents dont le fils stocke des stupéfiants en quantité très importante dans sa chambre ne peut être tenté au motif que les parents n’étaient pas au courant.
Amaury de Saint-Quentin
Préfet de Bretagne et d’Ille-et-Vilaine
« Nous serons aux côtés des bailleurs », tempère Amaury de Saint-Quentin, « n’en doutez pas ; nous attendons aussi d’eux qu’ils soient à l’initiative pour proposer des adaptations […] à la nouvelle donne du narcotrafic. »
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