Ce n’est pas tous les jours que l’on inaugure une infrastructure d’une telle ampleur. Quoique, sur la base navale de Toulon, l’exercice deviendrait presque une habitude.

Cinq ans après la restructuration du bassin de maintenance des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) Missiessy n°1, le deuxième, livré au printemps, a été inauguré le 4 juillet par Sébastien Lecornu.

« Construire un bassin de sous-marin nucléaire d’attaque, dans ses différents composants nécessite un savoir-faire unique », rappelle le ministre des Armées, depuis le bassin dont aucune image n’a pu filtrer en raison du caractère hautement confidentiel de cette infrastructure militaire.

Trois bassins restructurés sur la base navale de Toulon

Depuis 2019, les équipes du Service d’infrastructure de la défense (SID) ont piloté la restructuration du MY02, c’est son nom, pour qu’il puisse accueillir les nouveaux SNA de type Suffren, issus du programme Barracuda, qui remplacent les sous-marins Rubis des années 70/80.

© K. Sarrazin – Le ministre est arrivé par la rade, salué par le sous-marin Améthyste et son équipage.

Les principaux changements résident dans la mise aux standards parasismiques, l’amélioration de l’alimentation en électricité, qui se fait de manière plus poussée et simultanée, ou encore l’installation d’un masquage, ces grandes bâches blanches situées juste au-dessus du bassin. « Elles ont pour unique fonction de masquer les sous-marins : avant, on pouvait tout voir depuis le Faron ! ».

Ce n’est plus le cas pour les bassins MY01 et 02 et d’ici 2030, le troisième et dernier bassin va connaître la même évolution. « Le quai sera terminé au premier trimestre 2026 ensuite nous passerons à la partie équipement », indique le SID.

Fin de la restructuration des bassins Missiessy pour 2030 

Contrairement aux deux autres, le n°3 permettra de réaliser des entretiens lourds, sur la partie propulsion notamment.

Pour « bien comprendre ce qui a été un des plus grands chantiers hors norme du ministère des Armées de ces six dernières années, avec des vitesses d’exécution remarquables », Sébastien Lecornu illustre son propos de chiffres :

« On parle de 29 000 m3 de béton, 55 kilomètres de câble électrique, de 450 millions d’euros d’investissement. »

Les évolutions technologiques des nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque

Actuellement, Missiessy n°2 accueille pour un arrêt technique le SNA Tourville, officiellement entré au service actif ce 4 juillet également « après une longue année de différents tests », précise le ministre placé juste à l’avant du bâtiment qu’il a pu visiter durant quelques dizaines de minutes. Il partira en opération dès cet été.

Construit par Naval Group et ses sous-traitants, il s’agit du troisième de la série des six nouveaux SNA, après le Suffren et Duguay-Trouin, et avant le De Grasse, en septembre 2026, le Rubis, en décembre 2027, et enfin le Casabianca, en décembre 2029.

© K. Sarrazin – Les équipages bleus et rouges des sous-marins partent en opération tour à tour.

« Le SNA qui se trouve derrière mois présente des sauts technologiques prodigieux », se félicite le ministre avant d’énumérer : un déploiement deux fois plus long, certaines vitesses tactiques également multipliées par deux, « de meilleures capacités d’armements, de pénétration, de frappe et donc d’intensité. Sans oublier la mer des batailles sur les sous-marins : la question de la discrétion acoustique ».

Des sous-marins qui arrivent dans un contexte géopolitique bouleversé

Surtout, dans le contexte géopolitique actuel, la mise au service actif de ce SNA montre qu’il faut « prendre des risques » et que « ces aventures industrielles et militaires nécessitent du temps long ».

« D’aucuns disaient, à l’époque, que c’était superflus, que cela coûtait trop cher, que c’était inutile. » Or, selon lui, il est « heureux que nos anciens aient tenus un niveau d’ambition important » car la classe Suffren « arrive au moment où le Pentagone se pose la question de débrancher un certain nombre de moyens maritimes du continent européen pour les basculer sur l’indopacifique. Il faudra donc bien que des pays décident de mettre plus de bateaux et de sous-marins pour défendre notre continent ».

Par ailleurs, « un certain nombre de compétiteurs sur la trame sous-marin ne nous ont pas attendus. Si la Fédération de Russie n’a pas toujours brillé par l’efficacité de sa marine et de ses bateaux de surface, il faut reconnaître que sa sous-marinade est dépositaire d’un savoir-faire qui vient de la Guerre froide. »

Quel avenir pour le futur porte-avions ?

« Ce que nous faisons ce matin n’a rien de banal », tient à rappeler le ministre devant un parterre de représentants militaires, étatiques ou politiques.

© K. Sarrazin – Un événement double à Toulon.

« La base navale de Toulon a une grande histoire, une grande actualité mais je viens aussi réaffirmer qu’elle a un grand avenir », poursuit-il, faisant référence à la demande de certains députés de décaler la construction du porte-avions nouvelle génération (PANG), en remplacement du Charles-de-Gaulle. « Cela n’aurait pas de sens », indique-t-il, réfutant l’idée.

La livraison du PANG est prévue pour 2038 sur la base navale de Toulon, qui devra pour cela faire l’objet de nombreux aménagements.