Replacé à l’arrière pour ce premier test-match à Dunedin après le forfait de Tiberghien, Théo Attissogbe a encore réalisé une prestation majuscule. Brillant en attaque et sauveur en défense, il a encore prouvé combien son talent savait s’exprimer sur la scène internationale.
Jeudi soir, au moment de commenter la composition d’équipe qu’il venait d’annoncer pour ce premier test-match face aux All Blacks, Fabien Galthié fut évidemment amené à évoquer le forfait de Cheikh Tiberghien, lequel était prévu avec le numéro 15 dans le dos pour débuter au Forsyth Barr des Dunedin. Le sélectionneur s’était alors attardé sur la titularisation à l’aile de Tom Spring : « Au départ, il ne devait pas être sur la feuille de match mais Cheikh a été victime d’une déchirure à l’ischio-jambier, ce qui nous a obligés à remodeler l’équipe et à décaler Théo Attissogbe en 15. » Le technicien a poursuivi son laïus sur l’ailier bayonnais, évoquant aussi au passage son alter ego Gabin Villière, mais n’a pas jugé bon de revenir sur le repositionnement d’Attissogbe. Voilà qui peut largement se comprendre, tant le Palois n’inspire aujourd’hui pas la moindre crainte aux membres du staff et tant il est déjà considéré comme une valeur sûre à leurs yeux. D’autant plus dans ce genre de tournée avec un effectif extrêmement remanié et inexpérimenté. Et, sur la pelouse néo-zélandaise, le champion du monde U20 (en 2023) a encore démontré à quel point il était digne de la confiance qui lui est accordée.
Option de premier choix
Attissogbe n’a pourtant qu’une seule année de vécu avec les Bleus. Mais quelle année… Déjà, il avait été une des immenses satisfactions de la tournée estivale en Argentine en 2024, laquelle l’avait vu démarrer les deux tests à l’aile et inscrire un essai à chaque fois. Des performances remarquées qui lui avaient permis d’enchaîner en novembre dernier face au Japon, quand il avait remplacé Damian Penaud au pied levé. Puis dans un Tournoi des 6 Nations au cours duquel il était dans le XV de départ face au Pays de Galles et en Italie, marquant la bagatelle de trois essais sur ces deux rendez-vous. Ce qui en a définitivement fait une option de premier choix sur le triangle d’attaque tricolore, avec les Ramos, Penaud, Bielle-Biarrey et Barré. Les deux Bordelais et le Toulousain n’étant pas du voyage en Nouvelle-Zélande, et l’arrière parisien étant trop juste pour postuler à ce premier duel, le protégé de Sébastien Piqueronies est logiquement apparu comme le nouveau taulier d’un secteur dégarni. À seulement 20 ans, il devait assumer au pays du rugby. Il l’a fait.
Décisif sur tous les fronts
Déjà aligné à l’arrière deux semaines auparavant en Angleterre, un poste qu’il a occupé à huit reprises avec la Section paloise cette saison, l’intéressé avait réalisé une excellente prestation avant de céder sa place à la mi-temps en raison de points de suture, et avait apporté de sérieuses garanties à Galthié. Ce samedi, il a d’entrée affiché son autorité en allant capter un ballon chaud dans les airs à la 5e minute, avec sa technique de « basketteur » (les bras tendus vers le ciel) décryptée par nos soins vendredi. Il a également prouvé ses qualités de lecture en interceptant une passe adverse sur ses trente mètres (16e), alors que la situation était très dangereuse en bout de ligne pour le XV de France. Et que dire de ses incroyables qualités offensives ? Avec des miettes, puisque les Bleus ont bénéficié de beaucoup moins de munitions que les All Blacks, il a su se montrer décisif. En effet, c’est lui qui, d’une accélération dévastatrice (18e) sur une action en première main, a déchiré le rideau et déposé les flèches néo-zélandaises grâce à sa vitesse, avant de servir son pote Émilien Gailleton à son intérieur. Une séquence qui a terminé par le premier essai français de Mickaël Guillard. Pour le reste ? Attissogbe s’est évertué à couvrir avec efficacité le fond du terrain, rattrapant plusieurs coups en défense et sauvant les siens malgré la pression noire. Si les Bleus ont été héroïques à Dunedin, il fut de son côté un exemple de talent et d’abnégation. Le retour de Barré, pour le deuxième test, devrait le déporter à l’aile. Mais peu importe sa position, après avoir encore marqué les esprits dans ce rendez-vous majeur, Attissogbe est un grand parmi les grands.