Par

Isabelle Villy

Publié le

9 juil. 2025 à 18h12

Il n’y avait pas assez de places pour s’asseoir le jeudi 26 juin à l’occasion du conseil municipal de Bihorel (Seine-Maritime). Conséquence, à n’en pas douter, du dernier courrier envoyé par le maire Pascal Houbron (sur ses propres deniers, a-t-il précisé) à tous les Bihorellais, dans lequel il annonce son engagement pour les municipales 2026, avec une liste « à 90 % renouvelée ». Une annonce qui a terminé de faire exploser la majorité municipale.

Un nouveau groupe baptisé « Bihorel en commun » a été créé par dix-sept élus, mettant le maire en minorité jusqu’à la fin de son mandat. Le public était donc venu compter les points. Nous vous résumons ici ces débats houleux.

La charge de Nathalie Lecordier

C’est la première adjointe Nathalie Lecordier qui a ouvert les doléances. « Je suis prise directement à partie dans le courrier que nous recevons actuellement. Permettez-moi de vous faire une remarque : vous indiquez que je vous dois tout. Vous niez donc purement et simplement que j’ai pu construire mon parcours par mes propres compétences, mes convictions, mon engagement ou encore mon intelligence. Vous sous-entendez que je ne suis le fruit que de votre volonté, comme si vous aviez le pouvoir de faire ou défaire les individus à votre guise, tel un monarque distribuant les faveurs », a lancé l’élue.

« Plus troublant encore, cette affirmation va à l’encontre de l’image que vous aimez tant renvoyer de vous-même. Celle d’un défenseur de l’égalité entre les femmes et les hommes », a poursuivi Nathalie Lecordier, constatant que « réduire une femme à votre seule bienveillance, c’est perpétuer le schéma de domination. C’est nier aux femmes leur capacité d’exister et de réussir par elles-mêmes, donc de disposer des mêmes droits et mêmes opportunités que leurs homologues masculins ».

Pascal Houbron a préféré attendre la première délibération pour répondre, car la nomination des élus au sein des commissions permanentes ne présageait rien de bon. Effectivement, certains ont décidé de sortir du groupe majoritaire, Bien ensemble à Bihorel, et de créer un groupe dissident intitulé, Bihorel en commun avec dix-sept élus. C’est Patrice Renault, conseiller municipal, porte-parole du nouveau groupe politique qui a détaillé leurs motivations.

Un groupe de dix-sept élus

« Cette création marque une nouvelle étape dans la vie municipale de notre commune. Fort de dix-sept élus, le groupe représente dorénavant la majorité municipale. Nous sommes les plus nombreux à siéger. Dès lors, prétendre que notre groupe se situe dans l’opposition serait une contre-vérité politique », a constaté Patrice Renault.

Puis, s’adressant à Pascal Houbron, il a asséné : « c’est vous, Monsieur le Maire, avec votre nombre restreint de soutiens qui vous retrouvez minoritaire. Une réalité arithmétique autant que démocratique. C’est le jeu normal des institutions locales et ce basculement doit être respecté. Ce respect, nous le souhaitons, car il semble perdre tout son poids dans vos récents propos ».

« Nous n’avons trahi personne »

Enfonçant un peu plus le clou, le porte-parole du nouveau groupe politique s’est fait encore plus cassant : « Monsieur le maire, les insultes que vous avez proférées à l’encontre de certains d’entre nous, tel que le qualificatif de traître, est indigne d’un élu de la République. Nous n’avons trahi personne. Nous refusons simplement de cautionner une méthode. Une manière d’exécuter le pouvoir devenue inacceptable. La trahison, c’est celle qui consiste à mépriser ses collègues et à piétiner les principes élémentaires du débat démocratique, comme ce soir où les adjoints que vous avez nommés ne peuvent pas présenter les délibérations. »

« Je vais apporter mon expérience » 

Acculé, Pascal Houbron est revenu, pour toute réponse, sur les arguments de sa lettre dont « cette tentative de me déstabiliser et de me dire plusieurs fois de rester chez moi ». Il a mis en cause des élus proches il y a encore quelques semaines et surtout affirmé que « depuis la diffusion de ma lettre aux Bihorellais, je reçois énormément de messages bienveillants. D’ailleurs, certains souhaitent s’investir dans la commune. Je leur dis que je les recevrai dans la deuxième quinzaine de juillet pour une liste que sera renouvelée à 90 %. Je vais apporter mon expérience », a riposté Pascal Houbron.

L’opposition regarde et écoute…

C’est ensuite dans le public que la tension est montée d’un cran. On a ainsi pu entendre : « vous n’êtes pas en campagne », et avec les oppositions : « si vous aviez l’honneur et la dignité, vous attendriez la campagne des municipales. »

La conseillère municipale d’opposition, Aude Erragne, a d’ailleurs déclaré : « concernant cette délibération dans laquelle nous avons entendu pendant plusieurs minutes les distensions au sein de ce qui fut la majorité, notre groupe va s’abstenir, car ces querelles internes qui nuisent à la cohésion et à la hauteur de vue, qui ne permettent pas aussi de conduire les affaires municipales, ne nous regardent pas ! ».

Les autres délibérations

Pascal Houbron a constaté qu’en ce soir de conseil, les adjoints, dans un autre groupe, ne permettaient pas de « participer sereinement à la séance et vont peut-être faire des choix différents de ceux du maire ». Et d’entrée, il a d’ailleurs été mis en échec sur le lancement de la procédure de concession de service du mobilier urbain par l’entreprise JC Decaux.

Il a, en revanche, obtenu l’accord pour faire une demande de subventions au titre du FACIL (Fonds d’aide aux communes pour l’investissement local culture), pour la restauration de l’orgue de l’église Notre-Dame des Anges (49 240 euros) et pour l’achat d’instruments de musique pour l’école de musique BBI (19 545 euros).

Reprise de concessions en état d’abandon : nouvelle passe d’armes

Autre délibération et deuxième rejet concernant la délibération de reprise de concessions en état d’abandon au cimetière et surtout, sur la volonté du maire de restaurer celle d’Eugène Lecoq, personnage généreux qui a déjà une rue dans la ville. « En commission, nous avons proposé une solution moins onéreuse. Celle d’une plaque sur le mur du cimetière ou dans la rue. Je suis déçu que le rôle des commissions soit rendu à la portion congrue », a déploré l’opposant Gilles Thomas.

Jocelyne Brochard, adjointe au patrimoine, désormais dans le groupe Bihorel en commun, a indiqué, à l’attention du maire : « Si les membres de la commission n’ont pas reçu le compte rendu du 23 avril, c’est parce que vous avez voulu le modifier, alors que vous n’étiez pas présent. Par conséquent, je ne l’ai pas signé, ni diffusé. Vous nous proposez de garder cette sépulture qui est juste votre décision ou celle de votre groupe. Nous allons voter contre. » Une délibération rejetée, avec seulement quatre voix pour.

Suivez l’actualité de Rouen sur notre chaîne WhatsApp et sur notre compte TikTok

Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.