Le nombre d’Américains déposant de nouvelles demandes d’allocations chômage a reculé de manière inattendue à un creux de sept semaines la semaine dernière, signe que les employeurs semblent conserver leurs salariés malgré d’autres indicateurs suggérant un ralentissement du marché du travail. Cette tendance ne crée donc aucune urgence pour la Réserve fédérale à reprendre sa politique de baisse des taux d’intérêt.
Les demandes initiales d’allocations chômage ont diminué pour la quatrième semaine consécutive lors de la semaine se terminant le 5 juillet, reculant de 5 000 pour atteindre un total ajusté en fonction des variations saisonnières de 227 000, a indiqué jeudi le département du Travail. Les économistes interrogés par Reuters tablaient sur 235 000 nouvelles demandes pour la période. Ces chiffres incluent le jour férié du 4 juillet, période traditionnellement marquée par une volatilité accrue des statistiques.
Des facteurs saisonniers ont également influencé les données. Les demandes non ajustées ont augmenté de plus de 10 000, principalement dans des États industriels comme le Michigan, l’Ohio et le Tennessee, où les arrêts techniques pour la réorganisation des usines automobiles sont courants à cette période de l’année.
Cependant, ces licenciements temporaires n’ont pas été aussi importants que les près de 15 000 prévus par le modèle d’ajustement saisonnier du département du Travail. Cette dynamique continuera d’influer sur les chiffres au cours des prochaines semaines.
Les demandes d’allocations ajustées, considérées par les économistes comme l’un des indicateurs les plus réactifs de la santé du marché de l’emploi, avaient atteint début juin leur plus haut niveau depuis octobre, mais reculent chaque semaine depuis.
« Les entreprises du secteur privé ont réussi à préserver leurs marges en réduisant les coûts salariaux par l’attrition, la réduction du temps de travail et l’emploi à temps partiel… pour atténuer la sous-activité, plutôt que par des licenciements massifs », analyse Thomas Simons, chef économiste États-Unis chez Jefferies, dans une note. « Nous pensons que cette tendance va se poursuivre, mais cette stratégie pourrait bientôt atteindre ses limites. »
Tendance à la baisse des embauches
La tendance observée dans les données sur les demandes d’allocations est en phase avec l’avis des économistes et des banquiers centraux américains, qui considèrent le marché de l’emploi comme solide, bien que s’affaiblissant quelque peu. Le rapport mensuel sur l’emploi publié la semaine dernière illustre cette évaluation mitigée : le taux de chômage a légèrement reculé à 4,1 % en juin, principalement en raison d’une contraction de la population active, le taux de participation tombant à son plus bas niveau depuis deux ans et demi. Et si 147 000 nouveaux emplois ont été créés, un chiffre supérieur aux attentes, ces postes étaient concentrés dans quelques secteurs seulement.
Le président de la Fed, Jerome Powell, a souligné que dans un contexte de faibles embauches et de faibles licenciements, toute hausse des suppressions de postes pourrait rapidement faire grimper le taux de chômage.
Cela ne s’est pas encore produit, même si près de 100 entreprises américaines ont annoncé des licenciements ce mois-ci, dont Microsoft et Intel. Les économistes estiment que la politique tarifaire incertaine du président Donald Trump complique la planification des entreprises. Cette semaine, Trump a adressé des lettres à plus de 20 partenaires commerciaux pour les avertir d’une forte hausse des droits de douane sur leurs produits, passant du taux de base actuel de 10 % à des niveaux bien plus élevés, a annoncé une taxe de 50 % sur les importations de cuivre, et a prévenu de nouvelles taxes à venir sur les produits pharmaceutiques et les semi-conducteurs.
Face à une incertitude généralisée sur la politique économique, la dynamique des embauches s’est essoufflée ces derniers mois, compliquant la tâche des demandeurs d’emploi. La moyenne sur 12 mois des créations d’emplois avoisine 150 000, soit l’un des niveaux les plus bas depuis la pandémie et environ 35 000 de moins que la moyenne des années précédant la crise sanitaire.
Le rapport sur l’emploi de la semaine dernière indique que la durée médiane du chômage est passée de 9,5 à 10,1 semaines entre mai et juin, ce qui suggère que ceux qui perdent leur emploi mettent davantage de temps à en retrouver un. Cette tendance est confirmée par une hausse du nombre de personnes percevant des allocations chômage après une première semaine d’indemnisation, un indicateur de la difficulté à retrouver un emploi. Ce chiffre a augmenté de 10 000 pour atteindre 1,965 million lors de la semaine se terminant le 28 juin, son plus haut niveau depuis novembre 2021, selon le dernier rapport sur les demandes d’allocations.
« Malgré un certain bruit saisonnier, les données sur les demandes d’allocations racontent une histoire familière du marché du travail, à savoir qu’il reste caractérisé par un faible rythme de licenciements et un faible taux d’embauche, ce qui complique la réinsertion des chômeurs », souligne Nancy Vanden Houten, économiste en chef États-Unis chez Oxford Economics. « Nous anticipons une légère hausse des licenciements à mesure que l’économie ralentira et que l’impact complet des droits de douane se fera sentir, mais nous ne prévoyons qu’une hausse modérée du taux de chômage. »
Le mois dernier, la Fed a maintenu son taux directeur dans la fourchette de 4,25 % à 4,50 % où il se trouve depuis décembre, les banquiers centraux attendant de voir si les droits de douane font grimper l’inflation avant d’envisager une baisse des taux. Les marchés à terme anticipent une reprise des baisses de taux dès septembre, avec deux réductions d’un quart de point de pourcentage d’ici la fin de l’année selon les prix des contrats.