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Le métier de peintre en lettres persiste discrètement à Toulouse. Cet artisanat menacé, mêlant typographie et savoir-faire ancestral, séduit encore quelques commerçants. Pourquoi ce retour à la main face au numérique ?
Muni d’un pinceau, sublimant les devantures de boutiques toulousaines de ses inscriptions, Olivier Gaudry peut sembler hors du temps. Et pourtant, il exerce bien le métier de peintre en lettres. Tout récemment, la boucherie Gras, située place Arnaud-Bernard, a sollicité son talent. L’inscription sur la vitrine (le nom du commerce) est signée de l’artisan de 52 ans. Il a commencé cette activité, il y a un peu plus de 10 ans, de manière atypique.
Olivier Gaudry, de dos, en plein travail.
DR
« J’ai découvert ce métier grâce à un documentaire américain », raconte-t-il. Lui qui a fait du graffiti dans les rues de la Ville rose dans les années 80, puis a été graphiste pendant plus de 20 ans, y voit « une évidence ». « J’étais lassé du graphisme, se souvient-il. Avec l’avènement du numérique, la profession a subi beaucoup de chamboulements, je voulais m’extirper du milieu, mais à la fois rester dans la continuité de ma passion. » Il apprend alors seul le métier de peintre en lettres, et entre en contact avec des professionnels anglo-saxons.
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« En France, cette forme d’artisanat a quasiment disparu avec internet, comme plein d’autres », décrypte-t-il. Depuis, il est intervenu sur une trentaine d’enseignes à Toulouse : Le Rocher de la Vierge, Magnum, Le Temps des Vendanges… Mais aussi à la Maison des associations, ou à l’école Simone Veil au Miral. « Ça reste très niche, avoue le peintre. Déjà parce que peu de personnes perçoivent la différence entre une inscription peinte à la main et un adhésif industriel. Et aussi car le coût est plus élevé. »
Une activité parallèle obligatoire
Pur produit toulousain, Olivier Gaudry garde un œil attentif à l’harmonie dans sa ville. « Quand on se promène rue du Taur, on dirait qu’aucun cahier des charges n’a été respecté, déplore-t-il. Les couleurs vives des enseignes : je ne trouve pas ça beau. » Serait-il nostalgique d’une esthétique plus vintage ? « Je ne crois pas, répond-il. Je suis plutôt nostalgique d’une époque où fabriquait davantage soi-même. Avec la période du Covid, on s’est rendu compte que trop d’artisanats avaient disparu. »
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Il emploie même une méthode ancestrale héritée de la Renaissance. « C’est la technique du ‘poncif’ qui consiste à perforer le tracé pour le reproduire plus facilement, notamment quand on manque de recul. » Olivier Gaudry peint à l’huile, sur tous les supports. Bien qu’il soit passionné par cette activité et « amoureux des typographies », il ne peut pas en vivre. Il a ouvert un commerce de pâtes fraîches, nommé « Macaroni », et consacre une à deux journées par mois à la peinture en lettres.