« Tu sais quand arrive le bon moment. Pour moi, c’est maintenant. Je terminerai là où tout a commencé : Montréal ».

Publié à 13 h 19

Mis à jour à 16 h 06

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Sans détour, dans un court message publié mercredi sur son compte Instagram suivi par 2,3 millions de personnes, Eugenie Bouchard a confirmé qu’elle prendrait sa retraite après l’Omnium Banque Nationale, qui s’amorcera dans un peu plus d’une semaine.

Même si l’athlète de 31 ans se faisait plus rare dans les tournois d’envergure, cette nouvelle fait réagir sur la planète tennis. Le New York Times et le quotidien L’Équipe ont également diffusé l’annonce dans leurs manchettes sportives.

Après tout, Bouchard est devenue en 2014 la première joueuse canadienne à accéder à la finale d’un tournoi du Grand Chelem. C’était à Wimbledon. La même année, elle a atteint les demi-finales des Internationaux d’Australie et de Roland-Garros, en plus de grimper au cinquième rang du classement mondial.

« Nous sommes nombreux à avoir des souvenirs bien précis à regarder Eugenie. Elle nous a fait vivre toutes sortes d’émotions. Et on aura la chance de vivre une dernière émotion en la regardant jouer sur un terrain », a indiqué au téléphone Valérie Tétreault, directrice de l’Omnium Banque Nationale, quelques minutes après l’annonce de Bouchard.

Pour Tétreault, c’est une page importante de l’histoire du tennis canadien qui se tourne. Elle a confirmé à La Presse, quelques instants après l’annonce d’Eugenie Bouchard sur Instagram, que la Montréalaise avait reçu un laissez-passer pour le tableau principal du tournoi. La grande droitière aurait pris sa décision il y a quelques semaines déjà. Et depuis, la directrice du tournoi est en étroit contact avec l’entourage de la joueuse pour lui permettre de se retirer de la plus belle manière possible.

« On lui a dit que si elle souhaitait prendre sa retraite en jouant une toute dernière fois le tournoi de Montréal, où tout a commencé, on allait lui offrir un laissez-passer et célébrer la carrière qu’elle a eue. Ça demeure une joueuse qui a eu une grande importance pour plusieurs jeunes joueuses. Elle a été un modèle. »

L’impact de Genie

Bouchard s’était confiée à La Presse l’automne dernier, lors d’une rarissime entrevue. Lors de cette rencontre, on lui avait demandé de quelle manière elle souhaitait qu’on se souvienne d’elle.

Relisez « Eugenie Bouchard n’a pas dit son dernier mot »

Je veux avoir inspiré des gens, surtout des enfants, à jouer. Ç’a toujours été la chose la plus importante. J’ai eu des idoles, des modèles. Et penser que je pourrais être cette personne pour un jeune, c’est spécial. Et ça vaut tout le travail que j’ai fait. Je veux contribuer à une société plus en santé. Si une mère vient me voir et qu’elle me dit que sa fille aime le tennis grâce à moi, ça voudra dire que j’aurai fait quelque chose de bien.

Eugenie Bouchard

Lorsqu’on fait mention de ce passage à Valérie Tétreault, elle a un petit rire. Et elle confirme qu’elle a réussi sa mission.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Valérie Tétreault, directrice de l’Omnium Banque Nationale

Tétreault se souvient très bien de l’effervescence autour de la montée en popularité de ce jeune prodige. En étant impliquée dans l’organisation de l’OBN, Tétreault a aussi constaté un engouement différent des jeunes joueuses de tennis inspirées par Bouchard au cours des années.

« Je me souviens que lorsqu’elle était [au sommet de sa forme], même dans les inscriptions pour notre programme de chasseurs de balles, on voyait beaucoup plus de jeunes filles. Même Tennis Montréal et Tennis Québec voyaient des différences marquées dans les inscriptions chez les jeunes filles. L’impact qu’elle a eu demeure énorme. Et il y a sûrement plusieurs adolescentes qui diraient que si elles jouent au tennis, c’est grâce à Eugenie Bouchard. »

Une carrière en deux temps

Bouchard n’était encore qu’une enfant, que déjà, au Centre national de Tennis Canada, on voyait en elle une future championne.

Joueuse agressive qui prenait la balle tôt dans le rebond, la Québécoise avait un style de jeu qui lui a fait grimper les échelons rapidement. Elle avait très peu de faiblesses dans son arsenal de coups. On parlait, à ses débuts, d’un talent générationnel. En 2012, elle a remporté le tournoi junior de Wimbledon.

Puis, l’année de ses 20 ans, en 2014, elle a donné raison à ceux qui croyaient en elle. Une année remarquable pendant laquelle elle a fait sa place parmi les cinq meilleures joueuses au monde. Cette saison-là, Bouchard a remporté le seul titre de sa carrière, à Nuremberg, où elle a battu en finale Karolina Pliskova, qui allait plus tard devenir numéro un mondiale.

PHOTO SANG TAN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Eugenie Bouchard a atteint la finale de Wimbledon en 2014.

Elle s’est cependant blessée aux abdominaux en 2015. Et aux Internationaux des États-Unis, elle jouait du tennis de grande qualité. Mais avant le quatrième tour du tournoi new-yorkais, elle a subi une commotion cérébrale en trébuchant dans le vestiaire. Les blessures, la chute au classement et le manque de constance ont ralenti considérablement Bouchard de 2016 à 2019.

En 2020, elle a participé à sa première finale en quatre ans, à Istanbul. Elle s’est cependant inclinée devant Patricia Maria Tig. Des blessures répétitives à une épaule ont ensuite miné toute chance de progression. Elle a connu quelques bons moments, comme des parenthèses, pendant les cinq dernières saisons, mais rien de concluant. La Canadienne a aussi représenté son pays à six reprises, dont aux Jeux olympiques de Rio en 2016.

Depuis 2023, Bouchard passe la majeure partie de son temps sur le circuit professionnel de pickleball. Elle pointe actuellement au 12e rang du classement mondial.

Entre-temps, elle a tenté quelques apparitions dans des tournois du circuit WTA, mais en vain. Le 7 juillet, à Newport, dans un tournoi de calibre 125, elle s’est inclinée en deux manches.

Son match de premier tour à Montréal aura lieu le 27 ou le 28 juillet. On ne sait pas encore s’il s’agira de son dernier match en carrière ou si elle fera durer le suspense grâce à une victoire. Mais selon Valérie Tétreault, au moment où les rideaux se fermeront, Eugenie Bouchard pourra partir la tête haute.