Le musée du Louvre organise une rétrospective exceptionnelle pour le bicentenaire de la mort de Jacques-Louis David, peintre influent au tournant des XVIIIe et XIXe siècles, mais aussi acteur de premier plan durant la période très troublée de la Révolution, régicide qui s’engagea dans l’épopée bonapartiste.

Plus de trente ans après l’exposition de 1989, le Louvre remet à l’honneur la figure de proue du néoclassicisme Jacques-Louis David (1748-1825) à partir du 15 octobre et jusqu’au 26 janvier 2026. Cette exposition présentera des œuvres du Louvre en dépôt au château de Versailles et bénéficiera de prêts exceptionnels de la part des Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles pour montrer chronologiquement les liens entre l’activisme politique du peintre et ses œuvres. Entre engagement sincère et opportunisme, David parvient toujours à donner à son art une puissance sensible et politique.

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Un peintre engagé

 « Regarder l’œuvre de David, c’est poser la question de l’engagement dans une société en pleine mutation », déclare le commissaire de l’exposition Sébastien Allard. L’ambition de cette exposition est de réactualiser le travail visionnaire de David. À travers la trajectoire libérale et moderne de ce peintre, l’art se révélera être plus qu’un simple écho des idéaux, mais un véritable moyen d’action : « Peindre, c’est agir », disait l’artiste. Par exemple, Le Serment des Horaces (1784) est un véritable manifeste des idées des Lumières. La peinture représente précisément le moment où les Horaces se soumettent à l’intérêt général en acceptant de s’engager dans une guerre fratricide. Par cette toile novatrice, David exalte les valeurs républicaines : la Patrie passe avant les intérêts personnels, mais se fonde sur des citoyens, des individus raisonnables et responsables.

Jacques-Louis-David, Le Serment des Horaces, 1784, huile sur toile 330 × 425 cm (© GrandPalaisRmn (musée du Louvre), Michel Urtado)

Jacques-Louis-David, Le Serment des Horaces, 1784, huile sur toile 330 × 425 cm © GrandPalaisRmn (musée du Louvre), Michel Urtado

L’art au service de la politique

L’exposition s’attardera à montrer comment la peinture devient un vecteur de communication politique puissant. Marat assassiné fusionne parfaitement la peinture d’histoire et la peinture religieuse, faisant de la figure historique de Marat, dont la posture rappelle celle d’une piéta, un véritable martyr. La toile sera d’ailleurs rapidement considérée comme une icône de la Révolution. L’autre tableau ayant un profond ancrage politique est Napoléon franchissant les Alpes au Grand-Saint-Bernard. L’image de Bonaparte, conquérant, sur les traces d’Hannibal, habite encore notre imaginaire.

Jacques-Louis David, Bonaparte franchissant les Alpes au Grand Saint-Bernard © GrandPalaisRmn - musées des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau. Photo : Franck Raux

Jacques-Louis David, Bonaparte franchissant les Alpes au Grand Saint-Bernard © GrandPalaisRmn – musées des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau. Photo : Franck Raux

Jacques-Louis David : peintre et expérimentateur

En plus de cette dimension politique qui semble inédite pour l’époque, l’exposition veut présenter un David innovant en ce qui concerne le traitement de ses œuvres. Malgré le choix de sujets classiques pris à l’Antiquité et à ses mythes, il parvient également à élaborer des compositions originales en faisant cohabiter des décors très structurés avec des éléments plus baroques et des touches picturales laissées visibles. Ainsi, on peut penser à L’Intervention des Sabines, ou à La Mort de Socrate, ou encore aux Amours de Pâris et d’Hélène. David s’intéresse beaucoup au théâtre, et son goût pour cet art transparaît toujours dans la composition de ses toiles. Il créa la première « installation immersive » de l’histoire de l’art en exposant ses peintures face à d’immenses miroirs, pour que le visiteur y fût immergé.

Jacques-Louis-David, L'intervention des Sabines, 1799, huile sur toile 385 × 522 cm (©GrandPalaisRmn (musée du Louvre), Mathieu Rabeau, Sylvie Chan-Liat)

Jacques-Louis-David, L’intervention des Sabines, 1799, huile sur toile 385 × 522 cm ©GrandPalaisRmn (musée du Louvre / Mathieu Rabeau, Sylvie Chan-Liat

L’héritage de David

L’exposition insiste finalement sur la place centrale qu’occupe David dans l’histoire de l’art, et notamment sur son influence sur la peinture moderne. Ses tableaux seront mis en regard avec certaines œuvres de ses élèves comme Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867). On se rendra ainsi compte de la double logique d’émulation et d’opposition entre David et ses contemporains.

Jacques-Louis-David, La Mort du jeune Bara (inachevé), 1794, huile sur toile 119 × 156 cm (©Ville d’Avignon, Musée Calvet)

Jacques-Louis-David, La Mort du jeune Bara  (inachevé), 1794, huile sur toile 119 × 156 cm © Ville d’Avignon, Musée Calvet

On reviendra enfin sur l’atelier qu’il a dirigé et qui a été le plus grand atelier de l’histoire de la peinture. Il y régnait la promotion d’une liberté totale de l’artiste et une opposition à l’académisme qui entravait, selon David, l’évolution de l’art. L’ouverture aux femmes était aussi une manière de s’opposer à l’Académie et démontrait la modernité de cet artiste majeur.

L’HISTOIRE PAR L’IMAGE | Le Serment du Jeu de paume