La Russie a besoin de bras. Ses pertes massives face à l’armée ukrainienne l’avaient d’ailleurs déjà contrainte à quémander de l’aide matérielle et humaine à la Corée du Nord. Une autre méthode bien connue du Kremlin consiste à envoyer des mercenaires
sur ses terrains d’opérations extérieures. Récemment, Poutine aurait fait du Moyen-Orient son vivier
militaire, lui permettant d’envoyer des renforts en Ukraine pour poursuivre la
guerre initiée en février 2022.
C’est via ses gouvernements locaux, en cheville avec les
services de migration et le ministère des Affaires étrangères, que se font les
recrutements, en particulier dans l’oblast de Briansk, à la frontière
ukrainienne, qui facilite l’entrée en Russie de citoyens syriens et yéménites à
la recherche d’emplois «bien rémunérés»… avant de les envoyer au front.
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C’est principalement via Telegram et WhatsApp que les recruteurs
prennent contact avec de potentiels futurs mercenaires. Le plus grand canal de
recrutement, appelé «Drug Rossii» (soit «les amis de la Russie»), diffuse
ainsi des annonces promettant la citoyenneté russe et un salaire de 2.000€ par
mois, qui seront accordés à la signature d’un contrat avec le ministère de la
Défense.
Des visas d’affaires pour de futurs mercenaires
Une fois le contact établi, des fonctionnaires russes basés dans
les régions frontalières de l’Ukraine prennent en charge les dossiers des
futurs mercenaires pour faciliter le traitement de leurs visas, enregistrés
comme visas d’affaires, leur arrivée sur le territoire, et bientôt leur déploiement
sur le champ de bataille.
Le processus, censé relever des missions du ministère de l’Intérieur,
demeure vraisemblablement supervisé par le ministère des Affaires étrangères, comme
le révèle le média The Insider, qui a eu accès à des lettres d’invitations des responsables
locaux adressées au chef de la division consulaire du ministère des Affaires
étrangères, Ruslan Markov.
En passant d’abord par le ministère de l’Intérieur, le gouvernement
russe peut ainsi utiliser des visas d’affaires pour couvrir ses contrats avec des
mercenaires, qui signeront par la suite avec le ministère de la Défense.
Certaines recrues ne découvrent qu’une fois arrivées en
Russie qu’elles seront envoyées combattre sur les lignes de front. C’est le cas
de Wahid Mursal al-Shibli, un paysan syrien originaire de la province de Suwayda, convaincu par la promesse d’un bon salaire, qui avait fini par accepter d’aller se battre en Ukraine.
Au bout de quelques mois,
confronté à l’horreur de la guerre, il avait tenté de rentrer en Syrie, mais l’ambassade
russe de Damas ne lui avait été d’aucun secours. En septembre 2024, il a été
tué lors d’un assaut. Sa famille n’a eu droit à aucune compensation des
autorités russes.