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Les internautes français ont vivement réagi aux propos tenus récemment sur la chaîne Public Sénat par l’économiste Jean-Claude Delgènes, qui a déclaré que la France avait « complètement décroché au niveau des conditions de travail ».
L’expert avait indiqué que, dans une étude « très sérieuse » réalisée fin 2021 et publiée en 2022, la France était « en 36e position, bonne dernière avec l’Albanie, en matière de conditions de travail ».
Les déclarations de l’économiste ont suscité un flot de réactions sur les réseaux sociaux, alors que la question de la précarité des conditions de travail est au cœur de l’actualité en France.
Au cours des deux derniers mois et demi, cinq jeunes travailleurs et stagiaires âgés de 15 à 19 ans ont été tués dans des accidents professionnels, ce qui a soulevé des questions sur les conditions de travail dans l’Hexagone.
Euronews a examiné les données de plus près pour vérifier les affirmations de Jean-Claude Delgènes.
La France est à la traîne par rapport à ses voisins européens
La déclaration de l’économiste s’appuie sur une étude réalisée en 2021 par Eurofound, une agence basée à Dublin qui mène des recherches sur les conditions de vie et de travail dans les pays européens.
Son enquête la plus récente sur les conditions de travail en Europe, connue sous le nom d’EWCS, date de 2021. La mise à jour de l’étude de terrain de 2024 devrait être rendue publique dans le courant de l’année.
Le rapport porte sur les conditions de travail dans 36 pays européens, dont les 27 États membres de l’Union européenne.
Elle comprend un « indice de qualité de l’emploi », qui combine des données sur des aspects tels que la santé, la sécurité, la satisfaction au travail et d’autres, afin de mesurer le degré de « tension » auquel les travailleurs sont soumis sur leur lieu de travail.
Les résultats suggèrent que les travailleurs français sont plus nombreux à être exposés à des conditions « extrêmement tendues » ou « très tendues » que ceux de la plupart des autres pays.
Ce n’est qu’en Serbie, au Monténégro, en Slovaquie et en Pologne que davantage de travailleurs sont exposés à des conditions « extrêmement tendues » ou « très tendues », selon les résultats.
Si l’on prend également en compte les travailleurs qui ont cité des conditions « modérément tendues », la France se classe en avant-dernière position, seule la Slovaquie obtenant un score plus mauvais et l’Albanie un score légèrement meilleur.
Ce classement n’est certes pas glorieux, mais l’étude ne place pas exactement la France « bonne dernière, avec l’Albanie, en matière de conditions de travail », comme l’affirme Jean-Claude Delgènes.
Enfin, si l’on ne considère que les travailleurs citant des conditions « extrêmement tendues », c’est-à-dire les plus sévères, la France se classe au 30e rang, au-dessus d’autres États membres de l’UE tels que la Croatie et Chypre, ainsi que du Royaume-Uni.
Une tendance confirmée par les chiffres officiels de l’UE
Les données d’Eurofound placent donc la France derrière la plupart de ses homologues européens en termes de conditions de travail, et cette tendance est confirmée par les chiffres d’Eurostat, l’office statistique de l’UE.
Selon les dernières estimations, seule Malte fait moins bien que la France en matière d’accidents mortels enregistrés sur le lieu de travail.
Ces préoccupations ont été renforcées récemment par la mort tragique de cinq jeunes travailleurs sur leur lieu de travail en l’espace de seulement deux mois et demi. Selon les estimations, deux personnes meurent chaque jour sur leur lieu de travail en France.
Le gouvernement français étudie une proposition visant à sanctionner les employeurs responsables de pratiques abusives sur le lieu de travail, notamment par des amendes et des poursuites pénales, selon un document dont les médias français, dont Le Monde, ont pris connaissance récemment.