Dans quelques jours, le 31 juillet, J.K. Rowling va fêter ses 60 ans. Et on a presque tendance à l’oublier aujourd’hui, mais avant de devenir l’épicentre des polémiques sur la question trans, la romancière britannique était encore il n’y a pas si longtemps l’écrivaine la plus aimée de la planète, celle qui avait sauvé les librairies, la lecture des enfants, l’imaginaire de toute une génération – et au passage amassé l’une des plus grandes fortunes du Royaume. Bref, une histoire à succès, qui a pu laisser penser que ce n’était pas sorcier d’écrire un best-seller, mais qui n’aurait jamais été possible sans quelques étincelles de magie…
Cette histoire commence à bord d’un train…
L’histoire commence à bord d’un train, oui, mais n’allez pas imaginer le Poudlard Express, qui emmène à chaque rentrée les enfants dans leur école de magie ! Non, un train tout ce qu’il y a de plus banal, qui ramenait Jo Rowling, de Manchester à Londres, en juin 1990. Sauf que ce train a du retard, que la secrétaire de 25 ans gamberge dans son wagon, et que s’impose à elle la vision d’un petit garçon à lunettes et cheveux sombres qui ignore qu’il est un sorcier. Elle n’a pas de crayon sur elle, elle est trop timide pour en demander un, alors pendant quatre heures elle laisse l’univers grandir, et l’histoire de ce garçon pas comme les autres prendre son envol.
La suite, c’est cinq années d’écriture, cinq années durant lesquelles la jeune femme va connaître une grossesse, un divorce violent, deux déménagements au Portugal, puis en Ecosse, mais aussi la mort prématurée de sa mère, qui va nourrir le deuil du jeune Harry, lui-même orphelin. Passablement fauchée, au bord de la dépression, Jo enseigne alors le français et écrit dans les cafés d’Edimbourg l’après-midi, avant de tout retaper à la machine, un récit biberonné au folklore anglais et aux romans de Jane Austen, qu’elle achève en 1995.
Et il trouve tout de suite preneur ?
Pas vraiment ! Elle trouve bien un agent pour défendre son texte, Christopher Little, mais ce dernier peine à convaincre des éditeurs. Une dizaine d’entre eux refusent de le prendre, en arguant que les enfants ne voudront pas lire un roman aussi long – ils doivent s’en mordre les doigts depuis. Et c’est finalement Bloomsbury, où vient de se créer une section jeunesse, qui rafle la mise, après la lecture enthousiaste de la fille de son directeur général ! Montant de l’avance : 2.500 livres sterling seulement ! Et une demande tout de même : prendre un nom de plume neutre pour ne pas effrayer les jeunes lecteurs masculins, qui risqueraient de ne pas vouloir, sait-on jamais, lire un roman écrit par une femme. C’est ainsi que Jo devient J.K. Rowling sur la couverture de Harry Potter à l’école des sorciers, qui paraît le 26 juin 1997, dans un premier tirage de 500 exemplaires seulement.
C’est le succès immédiat ?
Immédiat auprès de ses premiers lecteurs en tout cas,même si la sortie est généralement ignorée par une presse qui ne s’intéresse guère à la fiction jeunesse. Il faudra attendre la parution américaine pour que la Pottermania décolle réellement : le roman atteint la première place du classement des meilleures ventes du New York Times en août 1999. Et le succès ne s’est jamais démenti depuis, d’autant que la saga, conçue dès le départ sur sept romans, comme autant d’années scolaires, a vu ses intrigues et son langage se complexifier en avançant, pour coller à l’âge de ses lecteurs.
Aujourd’hui, c’est un demi-milliard de volumes de Harry Potter qui ont été écoulés, sans même parler des films, ou de la série HBO prévue l’an prochain. De quoi relancer l’intérêt pour Harry Potter chez les enfants des premiers lecteurs. Tiens d’ailleurs, le 31 juillet, c’est aussi l’anniversaire d’Harry Potter. Et selon l’histoire officielle, le petit garçon à la cicatrice va fêter ses 45 ans. Merci pour le coup de vieux !
Les petites histoires de grands livres de Julien Bisson sont à retrouver dans Le 1 des libraires, actuellement en vente en kiosque et en librairie.