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SANTÉ MENTALE – Pour les parents, le smartphone est un achat qui accompagne souvent l’entrée au collège de leur enfant. Parce que ce dernier gagne désormais en autonomie, le téléphone est vu comme un moyen fiable de s’assurer qu’il est bien rentré à la maison après les cours ou même pour suivre ses déplacements tout au long de la journée.
En octobre dernier, une étude de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Open) a confirmé que les préados reçoivent généralement leur premier téléphone portable vers l’âge de 11 ans. Mais si l’on en croit de nouveaux travaux, récemment publiés dans le Journal of Human Development and Capabilities, c’est encore bien trop tôt, et cela a un impact sur leur santé mentale.
De précédentes recherches avaient déjà démontré que l’utilisation précoce des smartphones était liée à une augmentation des risques d’anxiété et de dépression chez les adolescents. Cette nouvelle étude va plus loin. En analysant les résultats de questionnaires autodéclarés de plus de 100 000 jeunes âgés de 18 à 24 ans et originaires du monde entier, elle a constaté que cette utilisation a aussi un impact sur les relations familiales, la qualité de sommeil, la régulation des émotions et l’estime de soi.
« Nos données indiquent que la possession précoce d’un smartphone, et l’accès aux réseaux sociaux qu’elle implique souvent, est liée à un profond changement dans la santé mentale et le bien-être au début de l’âge adulte », explique dans un communiqué la neuroscientifique Tara Thiagarajan, autrice principale de l’étude et fondatrice de Sapien Labs, une organisation à but non lucratif qui étudie l’impact de l’environnement sur le cerveau.
Faible estime de soi et pensées suicidaires
Le questionnaire interrogeait sur différents paramètres de santé mentale. Dans le détail, les résultats ont montré que plus les enfants possédaient un smartphone tôt, plus cela était associé à une baisse de l’estime de soi, tant chez les filles que chez les garçons. Les jeunes filles interrogées ont fait état d’une résilience émotionnelle et d’une confiance en soi moindres, tandis que les garçons ont déclaré se sentir moins calmes, moins stables et moins empathiques.
L’étude a aussi montré une corrélation entre possession précoce d’un smartphone et dégradation de la santé mentale. Les répondants ayant reçu le leur avant l’âge de 13 ans étaient plus susceptibles de ressentir de l’agressivité, un sentiment de détachement, d’être victimes d’hallucinations et d’avoir des pensées suicidaires.
Par ailleurs, l’utilisation prématurée des réseaux sociaux augmente de 13 % le risque de mauvaises relations familiales, de 10 % celui de cyberharcèlement et de 12 % les troubles du sommeil.
Pas de smartphone avant 14 ans
Pour les auteurs de l’étude, ces résultats sont la preuve qu’il faut davantage réguler l’accès au premier smartphone, d’autant plus que ce dernier se fait souvent bien avant l’âge de 13 ans.
« Idéalement, les enfants ne devraient pas avoir de smartphone avant l’âge de 14 ans, et lorsqu’ils en ont un, les parents devraient prendre le temps de discuter avec eux de la manière d’interagir sur Internet et leur expliquer les conséquences de leurs actes », a déclaré Tara Thiagarajan dans un communiqué adressé à ABC News.
Mais la chercheuse souhaite aussi impliquer les décideurs politiques dans cette régulation de l’usage du smartphone : « Nous les exhortons à adopter une approche préventive, similaire à la réglementation sur l’alcool et le tabac, en limitant l’accès aux smartphones pour les moins de 13 ans, en rendant obligatoire l’éducation aux technologies numériques et en renforçant la responsabilité des entreprises. »