Par
Paul Varenguin
Publié le
29 juil. 2025 à 12h13
C’est de l’encre qui coule dans les veines de cette passionnée. Malgré ses 81 printemps, Michèle Bailly continue de conseiller les livres à l’étage de la Fnac de Melun (Seine-et-Marne). Le sourire greffé aux lèvres et l’écharpe délicatement enroulée autour du cou, elle raconte ces décennies de travail dans l’univers du papier.
Une longue carrière
« Il n’y a rien d’extraordinaire… » Michèle Bailly est bien modeste à l’évocation de son parcours qui n’a pourtant rien de classique.
Et pour cause. Cela fait 63 ans qu’elle travaille, ce qui fait d’elle la doyenne des salariés de la Fnac.
Elle le confesse, son histoire avec les livres est bien plus ancienne. D’ailleurs, c’est plus ou moins au royaume du papier imprimé qu’elle naît. « Mes parents et ma grand-mère étaient libraires. C’est elle qui l’a créée, en 1934. Mon grand-père, lui, était imprimeur », se souvient-elle.
Alors, au moment de décider de son métier, le choix de la librairie tombait sous le sens, et cette amoureuse du livre ressort parmi les premières diplômées de l’École nationale de la librairie.
Elle travaille dans l’entreprise familiale, avant de créer sa propre librairie, Le temps retrouvé. Certainement un clin d’œil à Marcel Proust pour celle qui dévore les livres.
Pour des raisons personnelles, elle rejoint ensuite une autre librairie, et participe au lancement de la Fnac, en 2012. Elle a alors 68 ans.
À l’heure où sonnent les cloches de la retraite, Michèle Bailly ne se pose pas de question : elle continue. Inlassablement. « D’ailleurs, parfois on me demande »tu veux aller jusqu’à quel âge ? ». Je réponds que je ne sais pas, ce métier est une vraie passion », sourit celle qui travaille à temps partiel.
Commence alors une nouvelle aventure, qu’elle qualifie volontiers « d’extraordinaire ». Gestion des stocks, nouveautés, logiciels… C’est un nouveau monde qui s’ouvre à elle, et son expérience est la bienvenue. « Elle a beaucoup de hauteur sur son métier, et c’est très enrichissant de travailler avec elle. On en apprend tous les jours », confirme son responsable, Quentin Valverde, le directeur de la Fnac de Melun.
Elle apprend de ses collègues, et leur apporte également beaucoup. Il n’y a qu’à les voir ensemble pour voir qu’il y a une bonne entente. Il faut dire que la transmission, Michèle Bailly connaît. Elle va même dans les lycées, comme l’an passé à Fontainebleau, pour parler du métier aux élèves. Avec eux, elle a travaillé sur le Goncourt des lycéens.
Un lien au client
Une passion ? Une drogue ? Un art de vivre ? On ne sait trop comment qualifier l’amour de Michèle Bailly pour son métier. Ce qui est certain, c’est qu’humainement, ce travail lui apporte beaucoup et puis « les livres sont un besoin physique ». « On est un magasin de proximité, en cœur de ville. Certains passent seulement pour nous dire bonjour, et les clients nous rendent curieux, c’est un chemin que l’on fait nous-mêmes. Être libraire, c’est aussi être un peu psychologue, pour comprendre ce que peut aimer le client, aller au-devant de lui… », estime-t-elle.
Après tant d’années passées entre les livres, Michèle Bailly a vu passer les modes, mais elle remarque que les jeunes sont toujours là, malgré ce qu’on pourrait penser. « À certaines heures, l’étage est plein ! Et on voit les jeunes repartir avec des livres », affirme-t-elle. « Certains ne viennent même que pour elle ! », confie son responsable. Il faut dire qu’elle parvient à nouer un lien particulier avec ce public, et qu’elle a à cœur d’être pédagogue. Il en va ainsi de ce souvenir, qu’elle raconte avec le sourire, d’un adolescent un peu dépité à l’idée d’acheter un classique pour les cours. « Il était un peu désespéré… Je lui ai expliqué l’intérêt de lire ça, je lui ai parlé du livre, et il est revenu pour me dire que, finalement, ça allait », se remémore-t-elle.
Ce qui fonctionne aujourd’hui ? La romance ou encore le manga, entre autres. Des genres qui n’existaient pas forcément quand elle a commencé dans le métier, mais n’allez pas croire que Michèle Bailly vit dans les vieux papiers : elle est à la page ! « Je lis beaucoup, surtout le soir, et de tout. J’ai même lu des One peace », souligne-t-elle. Parmi ses lectures coups de cœur, plus ou moins récentes, on retrouve Modiano ou Guyard. Il y a peu, elle a lu Cabane, d’Abel Quentin, qu’elle a « beaucoup aimé ».
Celle qui entrevoit déjà une « bonne rentrée littéraire » a hâte de connaître ce qu’elle présentera sur ses étagères dans quelques semaines, et de partager ses coups de cœur avec les clients. L’écriture d’une nouvelle page dans sa carrière…
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