Monsieur le Président,
Je remercie M. Jenca pour son briefing, dont chaque mot a été soigneusement pesé. Et je salue la présence parmi nous de Madame la Chargée d’Affaires d’Ukraine ainsi que de nos collègues de Lituanie, de Pologne et de l’Union européenne.
Monsieur le Président,
Nous voici en effet à nouveau réunis pour évoquer l’Ukraine. Pourquoi ?
Parce que la situation est insupportable en Ukraine et pour l’Ukraine. Elle est insupportable, parce que la Russie a fait le choix délibéré de poursuivre sa guerre d’agression, et avec elle son cortège de frappes indiscriminées, de crimes de guerre et de violations flagrantes du droit international humanitaire.
Le 14 juillet dernier, après des mois d’offres et ouvertures laissées sans vraie réponse par Moscou, le président des Etats-Unis a fixé un ultimatum clair à la Russie, lui intimant de s’engager de bonne foi dans les négociations et de mettre fin à sa guerre. Depuis lors, la Russie a au total frappé le territoire ukrainien à plus de 3 400 reprises, causant plus de 80 morts civils et plus de 300 blessés. Dans la seule nuit du 31 juillet au 1er août, les frappes russes contre Kyïv ont entraîné la mort d’au moins 31 civils, dont 5 enfants, et plus de 150 blessés. Ces campagnes de frappes massives témoignent d’une stratégie délibérée d’escalade militaire et visent à semer la terreur chez les civils ukrainiens.
Derrière les contre-vérités répétées à longueur de réunion par la Russie, les faits sont accablants. A l’origine de cette guerre, il n’y a qu’une chose : la décision de la Russie d’envahir un pays souverain, qui ne la menaçait en rien, en violation flagrante de la Charte et le droit international.
Plusieurs d’entre nous l’ont rappelé hier encore, la guerre d’agression russe est une guerre de choix, par choix de la Russie. Envahir l’Ukraine et tenter d’annexer certaines parties de son territoire, c’est poursuivre un impérialisme d’un autre âge. Vouloir masquer cela en prétextant combattre le néonazisme ou agir de manière préventive contre une prétendue agressivité de l’OTAN c’est à la fois un mensonge et une instrumentalisation du Conseil de sécurité. La Russie peut choisir chaque jour de faire cesser son agression, sans préjudice, bien au contraire, pour sa propre sécurité.
Monsieur le Président,
Alors que les habitants de Kyïv observent ce vendredi une journée de deuil, la Russie fait le choix cynique et obstiné d’ignorer les appels à la paix et de refuser le cessez-le-feu que l’Ukraine a accepté depuis cinq mois et que l’ensemble de la communauté internationale réclame. La Russie poursuit ses tactiques dilatoires. Evoquons les sessions d’Istanbul où l’Ukraine était prête à se rendre au sommet pour discuter cessez-le-feu et chemin vers la paix. La Russie les a reléguées au rang de discussions d’experts et elle a réitéré des exigences qui s’assimilent à une volonté de mutilation et de vassalisation de l’Ukraine.
La Russie ne recherche au fond rien de moins que la capitulation pure et simple de l’Ukraine. Par la voix du porte-parole du Kremlin, elle affirme sans ménagement qu’il ne lui est pas possible à ce stade d’atteindre ses objectifs par la voie diplomatique et qu’elle doit donc poursuivre sa prétendue « opération militaire spéciale », euphémisme pour « invasion et tentative d’annexion ». Jusqu’à quand ?
Monsieur le Président,
Ce Conseil ne peut plus se contenter de constater que l’agresseur refuse de mettre fin à son agression, surtout lorsque cet agresseur est doté par la Charte d’une responsabilité spéciale, celle de protéger à titre permanent les Etats contre l’agression et de protéger à titre permanent la paix et la sécurité internationales. Le Conseil doit contraindre l’agresseur à cesser son agression, en exigeant un cessez-le-feu complet, immédiat et sans condition. C’est là notre rôle et notre devoir. La Charte nous l’a confié, le monde attend que nous l’assumions.
Je vous remercie.