Par
Jean-Marc Aubert
Publié le
3 août 2025 à 17h30
Rendre justice aux Harkis et à leurs enfants et poursuivre le travail de mémoire et de réparation : c’est sur ce thème que le député des Écologistes dans la 1ère circonscription de l’Hérault depuis juillet 2024, Jean-Louis Roumégas a organisé une réunion publique à Montpellier. Elle s’est déroulée à La Carmagnole avec. notamment Zahia Hamdane, députée de la Somme et Abdelali Sadaoui, président du Collectif Citoyenneté française pour les Harkis.
Comme il l’a déclaré, dans une action menée avec notamment ce collectif, Jean-Louis Roumégas s’inscrit dans une « démarche de reconnaissance et de réparation à travers un temps d’échange et de recueil de témoignages ». Mais, la ministre déléguée chargée de la Mémoire et des Anciens Combattants de France, la Montpelliéraine Patricia Mirallès n’a pas du tout apprécié des propos tenus par le député, au point de riposter : dans un « tacle » sur les réseaux sociaux, elle tient à rétablir la vérité.
Il est vrai que la ministre est bien placée pour connaître la réalité de ce dossier très sensible des Harkis, puisque c’est un des dossiers prioritaires : « Une loi pour la reconnaissance et la réparation des Harkis a été adoptée en 2022. Plus de 27 000 décisions d’indemnisation ont été rendues, dont 21 000 ont fait l’objet d’une décision favorable Plus de 175 millions d’euros ont déjà été versés via l’allocation de reconnaissance doublée, avec des droits renforcés pour les veuves de Harkis. Une commission nationale indépendante est mobilisée. Non, aucune proposition de loi sur les Harkis n’a été examinée le 2 juin dernier, contrairement à ce qui a été rapporté. Avec le président de la République Emmanuel Macron, nous sommes parmi les seuls à avoir agi concrètement pour les Harkis. Et pourtant, M. Roumégas a déjà été député et n’a jamais rien fait pour les Harkis…Découvre-t-il seulement maintenant leur existence ? ».
Le dossier des Harkis fait partie des priorités de la ministre Patricia Mirallès (©DR / Patricia Mirallès )À quelques mois des municipales…
Ambiance à quelques mois des élections municipales… Et petite agitation dans la famille montpelliéraine des Harkis, les uns applaudissant les déclarations du député, les autres se rangeant du côté de la ministre, « pour toutes les actions qu’elle mène sur le terrain depuis ces dernières années », selon un retraité pied-noir d’ici qui a fait partie de l’exode d’Alger de 1962. Dans ce délicat conflit des Harkis et de leurs enfants qui ont bien grandi, les camps sont divisés, mais l’un d’eux relève que, « ça revient sur la table dans des partis politiques, comme par hasard à moins d’un an des municipales ».
Vidéos : en ce moment sur ActuQu’en est-il des travaux de la CNIH ?
Depuis 2022, la Commission nationale indépendante Harkis -CNIH- réalise un travail de mémoire et d’expertise concernant les droits à réparation des Harkis qui ont fui l’Algérie après les accords d’Évian de 1962 et qui sont arrivés en France. Un rapport publié en avril 2025 dresse le bilan des droits à réparation en faveur des Harkis. Ce rapport d’activité de la -CNIH- remis le 29 avril 2025 confirme que 19 560 personnes ont été indemnisées à la date du 18 avril 2025.
« La loi du 23 février 2022 a reconnu la responsabilité de l’État dans les conditions « indignes » d’accueil des Harkis en France en 1962 avec des internements, une ségrégation pointés du doigt. La CNIH a été chargée d’une mission de reconnaissance des préjudices qui passe par un travail de mémoire et d’expertise. Ce travail est réalisé en collaboration avec l’Office national des combattants et des victimes de guerre -ONaCVG- chargé du recueil des demandes d’indemnisation. À sa création, une étude d’impact évaluait entre 40 000 et 50 000 le nombre d’ayants droit potentiels. En mars 2025, la CNIH fait état de 20 818 dossiers « favorables » sur les 25 742 dossiers présentés, les contentieux les plus importants portant sur le temps de séjour. Au 18 avril 2025, la CNIH a validé 21 936 demandes d’indemnisation sur 27 085 dossiers reçus ce qui aboutit à une indemnisation d’un montant total de de 176 500 000 euros (en incluant les demandes de recours), soit un montant moyen de 8 856,60 euros par personne indemnisée », explique Patricia Mirallès.
Avant cette réunion publique tenue à Montpellier, Jean-Louis Roumégas s’est rapprochée de l’association Citoyenneté Française, composée de nombreux descendants de Harkis engagés dans une démarche de réparation, lors d’une réception dans la Somme. « Cette initiative visait à marquer l’importance de la reconnaissance des Harkis, un sujet toujours d’actualité, et à sensibiliser l’opinion publique et les élus sur les nécessaires avancées législatives et symboliques », avait indiqué à l’époque le nouveau député de la 1ère circonscription de l’Hérault.
« Corriger les injustices historiques »
L’Association Citoyenneté Française, née du besoin de réparation pour les Harkis et leurs descendants, se distingue par son approche non revancharde. « En choisissant ce nom, l’association souhaite œuvrer pour l’unité et l’apaisement, tout en affirmant son attachement à la France. Elle a pris contact avec plusieurs parlementaires du groupe NFP -Alma Dufour, Aurélien Saintoul, Zahia Hamdane, François Ruffin, Jean-Louis Roumégas et Rémi Cardon-, afin de soutenir une proposition de loi visant à inscrire dans la législation la citoyenneté française des Harkis, des membres des autres formations supplétives et assimilées de l’Armée française, ainsi que leurs descendants. Cette proposition de loi vise à corriger les injustices historiques et à donner un cadre législatif fort aux réparations », confirme un responsable de cette association.
Elle ajoute que, « Bien que cette loi n°2022-229 du 23 février 2022 reconnaît la responsabilité de la France dans l’abandon des Harkis et des supplétifs, et prévoit une réparation financière pour ceux ayant résidé dans les camps entre 1962 et 1975, les membres de l’association Citoyenneté Française jugent cette loi insuffisante. Ils appellent notamment à une révision du vocabulaire utilisé dans la loi, afin de reconnaître explicitement les Harkis et leurs familles comme des citoyens français à part entière, et non comme des personnels de formations supplétives et assimilées de statut civil de droit local ».
« Les membres du collectif demandent également une révision des indemnités, jugées trop faibles par la Cour européenne des droits de l’Homme -CEDH- , qui s’élèvent à environ 1 000€ par année passée dans les camps. En se basant sur les jurisprudences des camps de Bias près d’Agen et de Saint-Maurice-L’Ardoise, dans le Gard, l’association revendique une indemnité d’au moins 4 000€ par année passée dans ces camps, et ce, pour tous ceux ayant été hébergés dans ces conditions, même au-delà de 1975 », précise Jean-Louis Roumegas assirent que « la reconnaissance des Harkis et de leurs descendants n’est pas un simple devoir moral, mais un impératif historique et législatif qui doit être renforcé pour réparer les injustices passées ». Les Harkis continuent de diviser.
Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.