C’est une annonce immobilière inhabituelle : l’abbaye Sainte-Erentrude près de Kellenried, dans l’Etat-région de Bade-Wurtemberg dans le sud de l’Allemagne, souhaite vendre son monastère : 136 000 m2, l’équivalent de 190 stades de football, 11 000 m2 de surface habitable, 130 chambres. Le tout à cinq millions d’euros. Mais ceci n’est pas un cas isolé.
Chaque année, des dizaines de monastères ou de petits couvents ferment leurs portes en Allemagne et leurs bâtiments sont liquidés. Selon les données de la Conférence des supérieurs d’Allemagne (DOK) qui regroupe des milliers de religieux, le nombre de couvents féminins en Allemagne est passé de 1 627 en 2012 à 964 en 2022, soit une baisse de 56 % en dix ans. Du côté des ordres masculins, le nombre est passé de 461 à 385. Traditionnellement, il y a eu et il y a toujours beaucoup plus de religieuses et de couvents féminins que de communautés masculines en Allemagne.
Une tendance
En 2004, selon la DOK, les ordres religieux féminins comptaient près de 27 000 membres en Allemagne, contre un peu plus de cinq mille pour les ordres religieux masculins. Dix ans plus tard, ceux-ci étaient évalués à un peu plus de 4 300, contre un peu plus de 3 000 l’an dernier. La baisse est aussi la même chez les femmes durant la même période. Alors qu’elles étaient un peu plus de 17 500 femmes, en 2024, le chiffre est passé à près de 9 500.
Sœur Maria Thoma Dikow, supérieure générale des Sœurs de Sainte Marie-Madeleine Image :
Pour Maria Thoma Dikow, vice-présidente de la DOK, plusieurs raisons expliquent cette chute des chiffres. « Je pense que c’est un sujet très complexe. D’une part, il faut dire que les sœurs, qui ont aujourd’hui 80 ou 90 ans, sont arrivées en grands groupes à l’époque, ce qui signifie que les communautés s’amenuisent à mesure que ces sœurs disparaissent peu à peu. »
Sur l’une des photos principales du site internet de l’abbaye Sainte-Erentrude près de Kellenried, on peut voir bien plus qu’une douzaine de sœurs qui vivent encore ici aujourd’hui. En 2018, elles étaient encore 19 religieuses.
« Autrefois, les femmes ne pouvaient souvent pas exercer ou apprendre un métier à responsabilités dans le secteur privé, et la possibilité d’étudier, d’apprendre, d’exercer un travail à responsabilités n’était offerte que dans certaines communautés religieuses », tient à rappeler Maria Thoma Dikow.
La diminution du nombre de membres enregistrée par les ordres religieux féminins en Allemagne est un phénomène qui touche de nombreux pays : la France, l’Espagne, la Pologne, le Canada, les Etats-Unis et l’Australie.
Abandon de monastères
Le déclin rapide en Allemagne, qui s’apparente à une disparition de certains mouvements religieux, a des conséquences dramatiques. Depuis longtemps déjà, les ordres religieux ont cédé de nombreuses écoles ou hôpitaux dont ils s’occupaient depuis longtemps aux évêchés, à des associations caritatives ou à des organismes privés.
De nombreux monastères dans des régions plutôt catholiques d’Allemagne ont été abandonnés au cours des dernières décennies. La tendance est aussi la même au sein de l’Eglise protestante qui dispose tout de même de moins de monastères. La Maison mère des diaconesses de Kaiserswerth au nord de Düsseldorf est aujourd’hui un hôtel quatre étoiles.
La maison mère des diaconesses de Kaiserswerth, aujourd’hui un hôtel quatre étoilesImage : Christoph Strack/DW
« A cela s’ajoute bien sûr un élément démographique. Beaucoup de mes consœurs plus âgées sont issues de familles nombreuses. Dans les familles où il n’y a plus qu’un, deux ou trois enfants, constate Maria Thoma Dikow, les possibilités d’évolution pour les filles concernées étaient tout simplement meilleures dans la société laïque. »
La vice-présidente de la DOK poursuit : « Il faut bien sûr ajouter que le pouvoir d’attraction des Eglises a globalement beaucoup diminué dans notre pays. Nous sommes engagés dans un immense processus de sécularisation. Cela n’empêche pas les femmes de penser que la vie religieuse pourrait être une option pour elles. Ce sont là quelques aspects que je constate, mais comme je l’ai dit, il n’y a pas de raison unique et si on la supprimait, nous entrerions en masse dans les ordres religieux. »
L’Allemagne où on observe aussi la baisse du nombre de croyants. En 2024, 345 000 fidèles ont quitté l’église évangélique, ils étaient 380.000 en 2023. La tendance est la même chez les catholiques : le clergé a enregistré le départ de 322.000 croyants en 2024, ils étaient 400.000 en 2023.
Fin 2024, il y avait 18 millions de protestants et 19,8 millions de catholiques, sur une population de plus de 83 millions d’habitants. 45,2 % de la population allemande appartient encore à une Eglise. En 2014, ce pourcentage était de 57,4.
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La communauté guaranie s’inquiète pour sa langue
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La communauté guaranie se plaint de nombreuses discriminations comme celle liée à leur manière de parler la langue portugaise (image d’illustration) Image : REUTERS
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