Depuis le début de la guerre en Ukraine, il est arrivé à plusieurs reprises que des missiles et des drones ukrainiens et, le plus souvent, russes, se soient égarés dans les espaces aériens de pays frontaliers, comme la Pologne, la Roumanie ou encore la Roumanie. Mais ces derniers ne sont pas les seuls à déplorer de tels incidents.

Ainsi, en mars 2022, un drone de reconnaissance Tu-141 « Strizh », de conception soviétique, s’était écrasé sur un quartier de Zagreb [Croatie] après avoir survolé la Roumanie et la Hongrie. Si elle avait confirmé que cet appareil portait une bombe à fragmentation OFAB 100-120, l’enquête n’avait pas permis de préciser son origine.

Plus récemment, un drone « kamikaze » Shahed-136 [ou Geran-2] avait été découvert en Lettonie, près de la localité de de Rezekne. « L’ogive explosive s’est enfoncée d’un demi-mètre dans le sol et a été neutralisée sur place », avait expliqué l’état-major des forces armées lettones. Et de préciser que, ayant dévié de sa trajectoire, ce drone n’avait « pas visé de cible militaire ».

Encore plus éloignée de l’Ukraine mais partageant une frontière avec la Russie, via Kaliningrad, la Lituanie a fait état, en juillet, de deux violations de son espace aérien par des drones présumés russes.

La première a lieu le 10 juillet. L’appareil en question, de type Gerbera, c’est-à-dire un drone utilisé par les forces russes pour leurrer les défenses adverses, a brièvement violé l’espace aérien de la Lituanie, ce qui a conduit certains responsables du pays, dont le Premier ministre et le président du Parlement, à se réfugier dans un abri.

Ce drone avait été suivi par les forces lituaniennes quand il volait au-dessus de la Biélorussie. « Nous pouvons confirmer qu’il s’agit d’un Gerbera. Pour le moment, nous n’avons aucune donnée indiquant que l’objet a été envoyé délibérément sur notre territoire », avait ensuite expliqué Dovilė Šakalienė, la ministre lituanienne de la Défense. Et d’ajouter : « L’objet est tombé très rapidement et […] n’a définitivement pas présenté de menace ». D’ailleurs, les avions de chasse déployés à Šiauliai, dans le cadre de la mission Baltic Air Policing de l’Otan, n’avaient pas été sollicités.

Comme ils ne l’ont pas été pour un deuxième incident du même genre, survenu le 28 juillet. Ce jour-là, en provenance de Biélorussie, un drone présumé russe a survolé Vilnius avant de disparaître. Il n’a été retrouvé que le 1er août, dans le périmètre du terrain d’entraînement militaire de Gaižiūnai, situé près de la ville de Rukla, qui accueille un bataillon multinational de l’Otan.

« Il est probable qu’il s’agisse du même drone qui a pénétré sur le territoire lituanien lundi. D’après les premières informations, il s’agirait d’un drone Gerbera, mais les détails seront précisés ultérieurement », a alors indiqué l’état-major lituanien.

Au passage, s’il est utilisé comme leurre, le drone Gerbera peut être équipé d’une caméra et d’une petite charge explosive. Construit en polystyrène, en mousse plastique et en contreplaqué, il intègre des composants électroniques disponibles sur le marché grand public.

Quoi qu’il en soit, ce 5 août, Mme le procureur général lituanien, Nida Grunskienė, a fait savoir que le drone trouvé à Gaižiūnai portait un « engin explosif qui a été neutralisé avec succès sur place ». « L’une des principales hypothèses de l’enquête est que cet appareil a pénétré accidentellement sur le territoire lituanien », a-t-elle dit, avant de préciser que « d’autres théories font l’objet d’une enquête parallèle ».

Dans la foulée, le gouvernement lituanien a fait savoir qu’il avait demandé à l’Otan de prendre des « mesures immédiates ».

« Il s’agit du deuxième incident de ce type en moins d’un mois. Des violations similaires de l’espace aérien ont également été signalées récemment par d’autres Alliés. Ces incidents répétés représentent un signe alarmant du débordement de l’agression de la Russie contre l’Ukraine sur le territoire de l’Otan », a fait valoir Kęstutis Budrys, le ministre lituanien des Affaires étrangères, via le réseau social X.

Aussi, il a fait savoir que, avec Mme Šakalienė, il avait adressé une lettre à Mark Rutte, le secrétaire général de l’Otan, pour qu’il prenne des « mesures immédiates pour renforcer les capacités de défense aérienne de la Lituanie ».

« La défense aérienne est essentielle à la sécurité des Alliés. La sécurisation du flanc oriental de l’Otan doit rester une priorité absolue pour l’Alliance », a insisté M. Budrys.

Par ailleurs, le chef de la diplomatie lituanienne a pointé la responsabilité de la Biélorussie dans ces deux incidents. « Si celle-ci ne prend pas de mesure pour minimiser les dommages potentiels de notre côté, alors nous répondrons par des mesures politiques et autres », a-t-il prévenu.

Photo : Drone Gerbera – illustration