Faiblesse du dollar
Le mois de juillet a aussi été marqué par une petite remontée du billet vert (+ 3,19 % ), qui a tout de même perdu quelque 10 % de sa valeur par rapport à l’euro depuis que Donald Trump est arrivé à la Maison Blanche en janvier 2025. Cette faiblesse du dollar, voulue par le président américain, est évidemment un élément déterminant pour les sociétés exportatrices. Comme le rappelle l’économiste Etienne de Callataÿ, « la faiblesse du dollar est de nature à avoir deux effets favorables sur les bénéfices des entreprises américaines. Le premier est que cette baisse rend les biens et services plus compétitifs et/ou permet aux exportateurs américains d’augmenter leurs prix et donc leurs marges. Le second est un effet dit de translation. Les bénéfices qu’elles réalisent hors US, pour un montant en devises inchangé, augmentent en dollar ».
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Mais quelles sont les entreprises qui tirent le plus parti de la baisse du dollar et de la politique de Trump en général ? Xavier Servais, administrateur délégué de la société de conseil en investissement Delande, pense que « cela semble peut-être un peu tôt » pour faire un bilan. D’autant que « le premier trimestre a été caractérisé par des achats de stockage préventifs avant la hausse des droits de douane ». L’analyste perçoit quand même quelques tendances claires. « Un bénéficiaire avéré, c’est la société Boeing. L’exemption des droits de douane pour le secteur aéronautique n’y est peut-être pas étrangère », explique-t-il. Et de noter que la capitalisation boursière de l’avionneur américain « a dépassé à nouveau celle d’Airbus, malgré cinq années de pertes consécutives, des fonds propres négatifs et les accidents survenus ces derniers mois. Depuis son cours le plus bas début avril, l’action Boeing a rebondi de 70 % contre 32 % pour Airbus ».
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L’analyste cite aussi General Electric, acteur majeur dans les moteurs d’avions, dans les entreprises qui se portent bien depuis l’arrivée de Trump tout comme Howmet Aerospace, LH3Harris (qui fabrique notamment des moteurs de fusée). Il note enfin que « les valeurs technologiques comme Meta, Oracle ou Google ont aussi été épargnées par les hausses tarifaires et l’absence de mesures de rétorsion, un moment évoquées par l’Union européenne ».
Toujours au rayon des gagnants, Frank Vranken, chef économiste à la banque privée Edmond de Rothschild Europe, cite, quant à lui, Coca-Cola et Pepsi Cola, Netflix, 3M (Scotch, Post-It, etc.) ou encore Levis. « Toutes ces entreprises ont augmenté leur guidance pour le reste de l’année », commente-t-il. Et de rappeler l’estimation de la banque d’affaires Goldman Sachs d’après laquelle une baisse de 1 % du dollar va de pair avec une hausse de 0,5 % de l’indice boursier américain Standard & Poor’s.
guillement
Pour Ford, les tarifs ont un impact sur les résultats qui sera de 2 milliards en 2025. C’est un montant significatif pour un secteur où les marges sont déjà assez faibles et qui fait face à une mutation complète »
Montant significatif
Du côté des sociétés perdantes, on retrouve le secteur automobile, qui pâtit du fait d’importer beaucoup de pièces détachées ou de l’acier. Il est « celui qui souffre le plus de la politique de Donald Trump. Pour Ford (qui a annoncé une perte de 36 millions de dollars au deuxième trimestre, NdlR), les tarifs ont un impact sur les résultats qui sera de 2 milliards en 2025. C’est un montant significatif pour un secteur où les marges sont déjà assez faibles et qui fait face à une mutation complète », note, de son côté, Christophe Pirson, fund manager chez Capitalatwork.
« General Motors et Ford n’ont pas affiché de bons résultats au premier trimestre et dans le cas de Tesla, s’y ajoute la personnalité controversée d’Elon Musk qui a eu un impact non négligeable sur l’image de la marque », complète Xavier Servais.
IPhones produits en Inde
Des géants comme Apple ou Amazon pourraient aussi voir le vent tourner même si les derniers chiffres sont rassurants. À l’occasion de la publication des résultats d’Amazon la semaine dernière, Sky Canaves, analyste chez Emarketer, faisait remarquer que l’impact des politiques commerciales américaines reste encore limité sur les ventes du géant du commerce en ligne au vu des « suspensions des droits de douane » et d' »une consommation restée solide durant la période ». « Les tensions commerciales récentes ont même offert à Amazon une occasion d’accroître sa part de marché dans le commerce en ligne aux États-Unis », faisant référence à Shein et Temu, les géants chinois du commerce électronique qui ont perdu l’exemption de droits de douane dont bénéficiaient les petits colis envoyés de Chine.
Pour Apple qui a fortement augmenté sa production d’IPhones en Inde au cours de ces dernières années, les menaces de Trump à l’égard de l’Inde ne sont a priori pas de bon augure.
Il est évidemment prématuré pour évaluer les effets à plus long terme de la politique Trump. D’autant que cette politique, en plus de fluctuer incessamment, comporte encore beaucoup d’inconnues, en particulier concernant les tarifs qui seront appliqués à la Chine.
De plus, ces effets seront fortement liés à l’attitude à venir des consommateurs américains. « Il faut voir comment le consommateur va réagir et quelle sera l’élasticité des prix », rappelle Frank Vranken. Comme il faudra voir si la confiance des consommateurs ne sera pas ébranlée par cette politique très changeante et par une conjoncture moins favorable si on se base sur les derniers chiffres de l’emploi.