Par

Lou Van Cauvenberghe

Publié le

10 août 2025 à 6h20

« On devrait être à jour dans la semaine », espère Stéphanie Gac, responsable du Relais Atlantique, centre de collecte et de tri basé à Couëron près de Nantes. Après deux semaines de grève, la flotte d’utilitaires qui récolte les récolte les vêtements, a repris du service. Elle sillonne la Vendée pour vider les 400 points de collecte textile. « Certains points sont équipés de plusieurs bornes, notamment en déchèterie », détaille la responsable.

17,5 tonnes de textile triées par jour

Les vêtements collectés en Vendée, soit par le Relais Atlantique, soit par le Relais 17, basé à Surgères (Charente-Maritime) sont acheminés à Couëron pour être triés en une vingtaine de catégories, dispatchés et revalorisés.

« 120 salariés trient chaque jour jusqu’à 17,5 tonnes de textile en 7 h 30. »

Stéphanie Gac, responsable du Relais Atlantique à Couëron

Tout commence par l’ouverture des sacs, à la main. La matière, l’état, l’usage : « Chaque pièce est triée minutieusement. » Les chaussures sont appariées, les vêtements sont classés selon plusieurs niveaux de qualité.

6 à 7 % du textile collecté, « le premier choix », alimente les 75 boutiques solidaires Ding Fring de France. Des friperies à très bas prix. Pour le moment, il n’y en a qu’une seule en Vendée, à Challans. Mais « on envisage l’ouverture d’une nouvelle boutique à La Roche-sur-Yon », confie Stéphanie Gac.

Une part importante est exportée vers des pays d’Afrique, via les relais locaux du réseau (Sénégal, Burkina Faso, Madagascar), où les vêtements sont revendus sur les marchés locaux.

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C’est « le second choix ». Bien sûr, ce sont des vêtements qui peuvent être un peu démodés ou avec des très légers défauts « mais réparables ». Globalement le second choix sont des vêtements « de qualité très correcte, légers et adaptés au climat ».

Des vieux jeans transformés en isolant

Quant aux vêtements trop usés, ils sont revalorisés autrement. Ceux en mauvais état, mais avec au moins 50 % de coton, « comme les jeans » sont effilochés et transformés par l’entreprise Métisse pour en faire de l’isolant. « On le retrouve dans les grandes surfaces de bricolage comme Castorama », détaille la responsable. Cette revalorisation représente 7 % des 17,5 tonnes journalières triées à Couëron.

Les t-shirts en coton abîmé ou délavé, sont transformés en chiffon de nettoyage par plusieurs entreprises françaises ou européennes (10 % du tri global).

Les collants troués en nylon et autres habits trop abîmés sont transformés en granulé CSR (combustible solide de récupération). Ce sont de petits blocs de matière combustible servant à la production d’énergie (alimenter des chaudières dans des fours de cimentières ou des usines d’incinération par exemple). Les CSR atteignent 10 % du tri.

« Il y a toujours une forme de valorisation, même minime. Mais pour que ça fonctionne, les vêtements doivent être propres, secs, placés dans un sac fermé », insiste Stéphanie Gac.

Une entreprise d’insertion en péril

Le Relais n’est pas une association. C’est une entreprise d’insertion. À Couëron, 120 salariés trient les tonnes de textiles en 20 catégories différentes. Certains y rebondissent vers des contrats en CDI. Mais le modèle économique actuel est fragilisé. D’où cette grève de collecte. Depuis l’été 2024, la vente à l’export souffre d’une forte concurrence asiatique, notamment avec l’industrie de l’ »ultra fast fashion » qui fait chuter les prix.

Résultat : la part de l’éco-contribution perçue via Refashion, l’organisme chargé d’aider à financer la fin de vie des vêtements, ne suffisent plus à maintenir l’entreprise à flot.

Car à chaque vêtement neuf acheté, environ 3 centimes d’euros sont prélevés du prix et reversés à Refashion. Sur cette modique somme, 0,8 centimes sont reversés aux entreprises de collecte et revalorisation des textiles, dont Le Relais.

« En 2023, on arrivait à financer le développement, les emplois et même installer de nouvelles bornes. En 2025, on a dû interrompre la collecte. Sans soutien, on ne pourra plus payer les salaires. »

Stéphanie Gac

D’autant que la production de vêtements ne cesse d’augmenter. Elle est passée de 58 millions de tonnes par an en 2000 à 109 millions en 2020. Et devrait atteindre 145 millions de tonnes d’ici 2030 (d’après les chiffres de l’Agence européenne pour l’environnement).

7 000 tonnes collectées en 2024

Cette surproduction alimente la spirale de surconsommation, rendant la mission de tri toujours plus complexe. En témoigne l’augmentation des collectes du Relais de + 15 % en 2024.

Face à cette réalité, chaque geste compte. « Tant que c’est propre et sec, on prend tout. Linge de maison, vêtements adultes et enfants, chaussures… Mais pas les oreillers ni les couettes. Ça, c’est une autre filière », précise-t-elle.

Avec 7 000 tonnes collectées en 2024 rien que sur le secteur de Couëron, la prise de conscience progresse.
Mais à ne pas oublier : chaque fois qu’un sac est déposé dans une borne Relais en Vendée, il y a derrière une équipe qui trie à la main, valorise au maximum… et lutte pour que ce modèle économique et solidaire tienne bon.

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