Un fascinant pont culturel entre le pays du dragon et La Seyne-sur-Mer. Pour sa première session, la master class opéra Akademia, portée par l’association Opéraria et animée par la pédagogie doublée du talent de la cantatrice soprano internationale seynoise Chrystelle Di Marco, qui en est la présidente et directrice artistique, accueille une délégation d’étudiants chinois du 6 au 12 août à la Bourse du travail. Et abolit les frontières du chant.
Avec leur professeur Hu Chunyin, enseignante à l’université de musique de Shenyang (ville de 9,24 millions d’habitants au nord-est de la Chine), six élèves et étudiants de niveau universitaire, âgés de 13 à 23 ans, ont franchi les 8.695 kilomètres et 20 heures de vol qui les séparent du bord de la rade de Toulon pour s’initier et se perfectionner à la technique vocale et la prononciation française et italienne.
Appelés à devenir professionnels, tous restitueront leur apprentissage lors d’un concert de clôture, donné ce lundi 11 août à 19 heures, à la Bourse du travail (entrée et participation libre) où ils seront parfois guidés par la voix de Chrystelle Di Marco. Des chants traditionnels chinois seront aussi interprétés, dont Mò Li Hūa, Fleur de jasmin, repris dans l’opéra Turandot de Puccini. Il n’y a pas de hasard. Plus de frontière.
Une rencontre nouée lors d’une tournée en Chine
« La venue de cette délégation chinoise est le fruit d’une rencontre que j’ai nouée à l’occasion d’une tournée d’un mois en Chine, début 2025, lors de laquelle j’ai chanté dans différentes régions de ce pays, explique la soprano. Dans le gigantesque théâtre de Shenyang, j’ai échangé et sympathisé avec Hu Chunyin qui a eu un coup de cœur pour ma voix, ma technique, mon interprétation et m’a dit qu’il fallait absolument que des élèves chinois aient l’opportunité de travailler avec moi. Ce souhait a coïncidé avec notre volonté de monter cette académie Opéraria Akademia ».
« Je n’ai jamais entendu quelqu’un qui chante comme ça, abonde dans un français parfait, l’enseignante chinoise qui a eu l’opportunité d’étudier 10 ans en France, à l’école nationale et au conservatoire de Paris et qui, c’est sûr, renforcera les liens noués avec Opéraria. La technique est exceptionnelle ». La musique est décidément une affaire de rencontres. Dans la grande salle de la Bourse du travail, pour accompagner les vocalises, la pianiste Mengyao, étudiante chinoise à l’Institut d’enseignement supérieur de la musique Europe et Méditerranée d’Aix-en-Provence, qui s’est déjà produite dans le cadre des concerts Instant Classique d’Opéraria, a été sollicitée par Chrystelle Di Marco pour rejoindre ses compatriotes et fait voler ses doigts avec la virtuosité d’une future professionnelle de l’accompagnement musical sur les touches d’un piano de collection Erard 1903. Au programme des élèves, qui logent à l’hôtel ou chez l’habitant, alternent séances de travail et tourisme, et à qui la soprano consacre à chacun une heure d’enseignement par jour: Mozart, Vivaldi ou Bellini. « Les chinois sont très intéressés par les compositeurs européens, observe Chrystelle Di Marco. De toute façon, l’opéra a été créé en Italie, c’est la base de l’apprentissage. En Chine ou l’opéra n’existait pas, jusqu’à il y a peu de temps, ils sont obligés de passer par ces fondamentaux italiens ».
Barrières techniques, culturelles et linguistiques
Un vrai challenge. Car à la difficulté technique, à la barrière culturelle, à celle de l’obligatoire compréhension des textes, s’ajoute celle de la prononciation. Pas facile! « Par exemple, les chinois ont des difficultés parce que la consonne « R » n’existe pas. Donc le « R » roulé c’est très compliqué pour eux, par contre le « R » à la française ça passe, parce qu’en chinois il y a une lettre, comme un « H » qui ressemble au « R », vulgarise la soprano qui, dans l’écoute, dispense un apprentissage patient. Le corps a besoin de trouver des automatismes. L’élève à besoin de maturer, on répète jusqu’à ce que l’écueil soit passé ».
Et la technique fait ses preuves. « Le stage m’a donné la flamme, m’a ouvert des perspectives, j’aimerais pouvoir revenir en France pour mes études », appuie avec maturité Pan Min Rang, âgée de 13 ans. La plus jeune des élèves de Chrystelle Di Marco a eu la chance de prendre la place de sa sœur qui n’a pu obtenir de visa d’entrée sur le territoire français. Partie de zéro, « elle a fait de gros progrès, félicite la soprano. Nous travaillons sur les voyelles, sur le positionnement de la langue et de la respiration. Les fondamentaux ». Toute la philosophie d’Akademia qui trace sa route avec de nouvelles sessions programmées à partir de septembre. La construction lente.
Concert gratuit, lundi 11 août, 19h, Bourse du travail, 42 av. Gambetta.