Elle nous répond au téléphone d’une voix rauque. « Comment allez-vous Sheila ? – Pas mal ! » L’icône des Yéyés accueille les aléas (c’est l’un des titres de son nouvel album À l’avenir) avec optimisme. Les complaintes, très peu pour elle : « Si vous commencez à penser où vous avez mal, ce qui va ou ne va pas, on n’avance pas et moi ça ne m’intéresse pas ! ». Le temps, l’âge, elle ne sait pas ce que c’est. Pourtant, dans quelques jours, le 16 août, elle va fêter ses 80 ans, au début d’une tournée malicieusement appelée 8.0 (prononcez 8 point 0) « pour ne pas dire le chiffre », qui passera par le Festival de Gordes ce lundi 11 août. Elle a aussi sorti un nouvel album au bout de 63 ans de carrière, À l’avenir. Confidences cash et pleines d’humour d’une icône qui se moque du temps qui passe.

Comment appréhendez-vous vos 80 ans dans quelques jours ?

Je n’appréhende rien du tout ! Ce sont les gens qui me donnent 80 ans, moi je m’en fous de l’âge, j’ai 50 ans dans ma tête ! Le principal, c’est d’avoir la tête qui marche, d’être en forme, de pouvoir faire ce qu’on aime et d’avoir des projets sans penser au temps qui passe. Moi, vous savez, je kiffe ma vie ! Ce qui m’intéresse, c’est de faire de ma vie une aventure et je crois que jusqu’à maintenant, je n’ai pas trop raté le truc (rires).

Vous retrouvez votre public avec lequel vous avez un lien particulier…

Cela fait 63 ans, c’est donc un gros lien (rires). C’est une très belle histoire d’amour. J’ai quatre générations dans mon public. Je vis parce que les gens sont là. Il ne faut jamais oublier d’où l’on vient, le départ de l’histoire : moi, je vendais des bonbons sur les marchés avec mes parents. J’ai de la chance de continuer à traverser la France et réunir des milliers de personnes pendant 1h ou 2h, en osmose, dans une petite bulle d’amour.

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour votre nouvel album ?

J’ai choisi des thèmes, comme le racisme dans la chanson Racée écrite par Rachel Kahn, inspirée de son livre. Il y a aussi une chanson sur Simone Veil (Simone), pour que les petites filles sachent d’où vient leur véritable libération, c’est-à-dire d’avoir le choix. Aujourd’hui, à mon âge, c’est important de défendre des sujets qui m’ont toujours tenu à cœur.

Comme le féminisme ?

Je fais partie des pionnières ! Avec Sylvie et Françoise (Vartan et Hardy, NDLR), on a été les premières dans la bataille ! À l’époque, rien que porter un short, c’était très gonflé ! Quand on a démarré dans les années 60-62, le jean était interdit, on ne se maquillait pas…

En 63 ans de carrière avez-vous un souvenir marquant sur scène à nous citer ?

J’en ai tellement, c’est difficile de choisir ! Bien sûr, Le Zénith, ou encore ma première à Reims en 1963, ou encore mon partage de la scène avec Nile Rodgers.

Que doit-on attendre pour le concert de Gordes ?

Il y aura des chansons du nouvel album que je n’ai jamais chantées, mais aussi les incontournables que le public reprend comme Bang Bang, Les Rois mages…

Quelles sont les chansons dont vous ne vous lassez pas ?

Je me lasse de toutes ! Les Rois mages, je n’en peux plus ! Mais heureusement, Eric Azhar et le groupe H-taag ont tout réécrit. On fait un medley de chansons des années 70 qui sont toutes revues et corrigées. Avec des sons et des rythmes d’aujourd’hui. Sinon ce n’est pas possible, je me suicide (rires) ! Je préviens aussi tout le monde : je ne chante pas L’école est finie ! (rires)

Avez-vous des coups de cœur dans la génération actuelle ?

C’est une jolie génération ! Il y a Clara Luciani que j’adore, Julien Doré, Eddy de Pretto, Santa dont c’est vraiment l’année. Quand je vois Clara ou Juliette Armanet je me dis, c’est bien j’ai fait des filles (rires).

Vous avez une affection particulière pour Marseille…

Marseille pour moi, c’est 1963, le démarrage de ma première tournée, donc c’est au-delà de l’affect ! Je ne me souviens plus du nom de la salle, mais je suis sortie de là en « panier à salade » tellement c’était incroyable ! Et puis il y a eu aussi les émissions de RMC sur le Vieux-Port avec Jean-Pierre Foucault et les gens qui tombaient parce qu’il y avait trop de monde… à Marseille, ce sont de gros souvenirs !