Par

Antoine Blanchet

Publié le

11 août 2025 à 7h50

Ce vendredi 8 août 2025, le Chalet du Lac paraît calme en cette fin de matinée. Seul le bruit des travaux environnants semble perturber la tranquillité de cette portion du bois de Vincennes. Pourtant, cette ancienne guinguette transformée en boîte de nuit n’est pas un parangon de sérénité. Depuis plusieurs années, les habitants de Saint-Mandé (Val-de-Marne), vivent un calvaire, excédés par le bruit du lieu. Le conflit est larvé depuis neuf ans entre les riverains et la discothèque.

Des soirées qui durent jusque tard

C’est en 2016 que les bruits de basse ont commencé à se faire entendre dans cette partie du bois, relate Sophie*, cofondatrice de l’association Respect et protection des riverains du bois de Vincennes : « J’habite dans cette rue depuis 2015. À l’origine, le Chalet du Lac était une guinguette tranquille datant des années 50. Puis en 2016, le propriétaire a changé ».

Depuis ce moment, le volume de décibels va de mal en pis. La guinguette devient discothèque. Les soirées s’étirent et le volume s’amplifie. « C’est toute la semaine. Du lundi au vendredi, ça dure jusqu’à trois heures du matin. Le week-end, ça peut durer jusqu’à cinq », détaille Pauline, riveraine qui est aussi membre de l’association. En 2021, le Chalet du Lac « annexe » une zone limitrophe pour créer « la beach parisienne ». Le lieu propose des soirées à ciel ouvert. Une nouvelle vague de décibels qui touche encore plus d’habitants.

À l’auditif s’ajoute le visuel. Le lieu loue aussi ses locaux pour des fêtes privées aux thèmes variés et parfois problématiques. En juin, une soirée X a été organisée en pleine après-midi, non loin des manèges pour enfants. « Il y en a trois ou quatre par an sur ces thématiques depuis la fin du Covid », soupire le maire de Saint-Mandé Julien Weil (LR).

Bagarres et trafic de stupéfiants

En plus du bruit, les habitants dénoncent une augmentation de la violence et de la délinquance dans cette partie du bois alors réputée tranquille. « Il y a de nombreuses personnes qui peuvent affluer lors d’une soirée et ça génère beaucoup de passage près des habitations. Il y a des rixes. Ça crée aussi des points de deal, car il y a des utilisateurs potentiels », affirme Julien Weil.

Certains fêtards n’hésitent pas à consommer de l’alcool non-loin des habitations.  »On voit des before dans les voitures garées dans nos rues. Certains habitants ont vu des scènes de deal en bas de chez eux, ce qui ne s’était jamais vu », allègue Sophie.

La santé de riverains dégradée

Ces multiples nuisances ne sont pas sans conséquences pour les habitants. « Des certificats médicaux ont été établis. Plusieurs personnes ont développé des troubles du sommeil, de l’anxiété et de l’irritabilité », explique Pauline. La vie quotidienne est source de stress pour beaucoup de résidents. « Il y a par exemple une famille dont les enfants avaient des examens scolaires. La veille, il y a eu une soirée jusqu’à 5 heures du matin », se désole Sophie.

Des procédures lancées

D’année en année, la situation ne s’est pas améliorée. D’année en année, des centaines de plaintes ont été déposées. D’année en année, des moyens de lutte sont mis en œuvre. « On a essayé de contacter le gérant qui est dans un déni total. On a même lancé une pétition avec plus de 350 signatures », énumère Sophie. « Notre but n’est pas de fermer le Chalet, mais de faire en sorte qu’il limite le bruit et respecte l’environnement qu’il y’a autour », poursuit la présidente de l’association.

Ces nombreux signalements et plaintes ont pu avoir de l’effet sur les nuisances, mais temporaires. « Des amendes pour tapage ont été dressées, mais ça ne les empêche pas de continuer », soupire Pauline. Le Chalet du Lac a aussi été contraint à plusieurs fermetures administratives. La dernière en date était au mois de juin. Cette mesure coercitive ne dure jamais bien longtemps. « Le gérant du lieu est très procédurier. Il n’hésite pas à freiner la procédure », s’agace Christian Cambon, sénateur de la circonscription (LR). « Ils ont pu rouvrir, arguant que la fermeture nuisait à leurs activités commerciales », explique Sophie.

Un casse-tête administratif

En plus de ces longues procédures, les riverains et la mairie doivent faire face à l’absence de réaction de la Ville de Paris. C’est cette dernière qui a octroyé la concession du Chalet du Lac aux actuels gérants. « La municipalité fait la sourde oreille et refuse de discuter », dénonce Christian Cambon. « C’est vraiment intriguant ce mutisme, car je ne comprends pas comment le lieu peut garder cette concession avec toutes ces infractions », s’interroge Julien Weil.

D’autres institutions répondent toutefois présentes à l’appel à l’aide lancé par Saint-Mandé. « La préfecture de Police suit le sujet de très près. Nous avons rencontré le Préfet de Police à plusieurs reprises », assure le maire. Le 1ᵉʳ août 2025, une réunion s’est tenue entre Laurent Nuñez, Julien Weil et Christian Cambon sur la situation. « Le Préfet de Police nous a indiqué qu’il renforcerait les patrouilles et intensifierait les moyens coercitifs. Ses équipes vont aussi étudier le traité de concession pour voir s’il y a des normes sur les nuisances », détaille Christian Cambon. En parallèle, la maire de Saint-Mandé a aussi contacté le ministre de l’Intérieur, qui suivrait le dossier avec intention.

Contactés, la Ville de Paris et le gérant du Chalet du Lac n’ont pas répondu à nos sollicitations.

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