La construction de logements est très fréquemment l’objet de débats entre élus à Cagnes-sur-Mer. Photo François Vignola.
« C’est la ville la plus attractive du département », lance Louis Nègre (Les Républicains) en parlant de sa commune. Chaque année, Cagnes-sur-Mer gagne des habitants. Sa population est passée de 52.100 habitants en 2020 à 53.303 en 2024.
Revers de la médaille, les constructions de logements (1) se multiplient. Depuis 2020, 1.508 logements (dont 516 sociaux) ont été construits ou sont en cours de construction. Alors certains Cagnois grincent.
« On ne construit pas trop, assure le maire. Quand on voit ce que font nos voisins… On s’appuie sur un livre blanc dans lequel les habitants nous ont dit qu’ils ne voulaient plus d’immeubles à six étages. On les a écoutés. Au maximum, on construit des quatre étages et, dans 30% des cas, avec une villa sur le toit. »
« Les gens n’arrivent pas à Cagnes parce qu’il trouve la commune attractive, ils viennent car on y construit des logements. La situation finira par chasser les enfants cagnois, qui ont de plus faibles revenus que les nouveaux arrivants », lance Philippe Touzeau-Menoni, conseiller municipal d’opposition (groupe L’Union pour Cagnes).
» On préserve l’identité de la commune »
Alors le plan local d’urbanisme métropolitain (Plum) est-il adapté? « Le Plum ne prend pas suffisamment en compte les spécificités locales et ne préserve pas l’identité visuelle et historique de quartiers comme le Cros ou le Haut-de-Cagnes. Il est essentiel de revoir ce plan pour qu’il reflète mieux l’âme de notre commune et qu’il prévoit des zones réservées pour les défis à venir », explique Lionel Dolciani, élu d’opposition (L’Union pour Cagnes). « On préserve l’identité de la commune, oppose le maire. Par exemple dans le Cros-de-Cagnes, la hauteur maximum est d’un étage. (…) Le Plum est actuellement en révision et nous garantirons notre identité. »
Cagnes-sur-Mer s’étend sur 1.836 hectares dont 404 hectares d’espaces boisés classés, 603 hectares de zones naturelles et 115 hectares de zones agricoles. « Chaque année, en moyenne, depuis dix ans, on a coulé dans le béton 3,3 hectares de zones naturelles », affirme Philippe Touzeau-Menoni (L’Union pour Cagnes). « Je ne sais pas d’où sort ce chiffre, répond Louis Nègre. S’il prend en compte les constructions sur d’anciens parkings, ça n’a pas de sens. »
Mais « mécaniquement, en vertu des règles actuelles, plus on construit d’immeubles, plus le nombre de logements sociaux à produire augmente. C’est le serpent qui se mord la queue », met en avant Isabelle Utrago, conseillère municipale d’opposition (Rassemblement national). « Le logement, c’est comme le reste, c’est une question d’équilibre, présente le maire. Par exemple, dans le quartier de la gare, je suis contre la construction de logements sociaux, car il y en a assez. »
La loi SRU impose des obligations à la commune. D’ailleurs la Ville doit payer cette année une amende de 2,3 millions d’euros pour non-respect de ses obligations en matière de logement social. « Cette loi, perçue comme un nouvel impôt, impose des objectifs inatteignables pour notre commune », affirme Lionel Dolciani.
« La priorité doit être donnée aux familles cagnoises »
Pourtant, « le nombre de demandes déposées pour un logement social par les habitants de Cagnes est passé de 1.800 à plus de 2.300 en seulement quelques années. Malgré les obligations de quotas dans les programmes neufs, seul un quart des logements sociaux construits est réellement attribué à des Cagnois », dénonce Isabelle Utrago. « La priorité doit être donnée aux familles cagnoises et pas aux personnes relogées par la préfecture ou la Métropole », abonde Josiane Piret, élue d’opposition (Alliance des droites).
« C’est le cas, invoque Noëlle Palazzetti, adjointe au maire en charge du Social. En 2024, sur les 245 attributions, 157 concernaient des familles cagnoises, soit 65% des attributions. »
« Que personne ne se méprenne, tacle Louis Nègre. Notre priorité, c’est de loger les Cagnois. D’ailleurs nous avons mis en place le bail réel solidaire (2) qui permet aux Cagnois d’acheter 20 à 30% moins cher. »
« 35 logements de ce type ont été commercialisés », complète Noëlle Palazzetti. « On a également travaillé sur les 438 logements vacants structurels. Seuls 8 ne le sont plus. C’est un travail de fourmi qui offre des résultats limités », en convient le maire.
Comment adapter les infrastructures?
Qui dit construction de logements, dit adaptation des infrastructures pour éviter l’engorgement. « Construire signifie augmenter le nombre de véhicules, donc le trafic et les contraintes de stationnement », avance l’opposante au maire Josiane Piret (Alliance des droites).
Pour Lionel Dolciani (L’Union pour Cagnes), « nous devons veiller à investir les taxes locales d’équipement dans les infrastructures nécessaires et adopter une véritable stratégie d’aménagement du territoire. Cela implique d’adapter nos infrastructures municipales, routières et sportives avant de construire de nouveaux logements. »
Pour Isabelle Utrago (Rassemblement national), il faut « concevoir des programmes à taille humaine pensés avec les habitants; réserver du foncier pour des équipements publics: crèches, commerces, maisons de santé, services de proximité; requalifier les friches et les zones déjà urbanisées. »
« C’est évident. Plus on grandit, plus on doit s’adapter, répond Louis Nègre. Chaque année, nous faisons un bilan de nos infrastructures. On en construira de nouvelles si nécessaire. »
1. Selon les données de l’Insee de 2022, Cagnes compte 33.031 logements: 26.640 résidences principales et 4.879 résidences secondaires.
2. La Ville a lancé le 22 juillet un dispositif de Logement locatif intermédiaire. Objectif: proposer des logements à des salariés qui ne peuvent pas accéder au logement social mais rencontrent des difficultés à louer ou acheter dans le parc privé.