Même pas essoufflé. Hâlé par le soleil, avec une exactitude qui force l’exemple, il est arrivé mardi à 17h15 précise. L’heure annoncée. Arrivant de Cuges-les-Pins, achevant devant le snack-bar La Pyro, à La Seyne, son généreux périple « 1.000 kilomètres à pied pour les rêves des enfants » parcourus à la force des jarrets, du 14 juillet au 12 août, au profit de l’association Petits Princes (1).

Applaudi par ses amis qui lui ont formé un joyeux comité d’accueil, accompagnés par quatre autres qui l’avait rejoint huit jours avant à Valence, le Toulonnais Jessy Lemaire, 31 ans, sous-officier dans l’armée de terre, son gros sac à dos rouge toujours sur le dos, a improvisé un discours.

« J’ai vécu une incroyable aventure humaine »

« Pourquoi, j’ai choisi l’association Petits Princes qui réalise les rêves d’enfants et d’adolescents gravement malades, alors que je n’ai pas de gamin et n’ai jamais été touché par la maladie? s’est-il interrogé. J’ai eu beaucoup de chance dans la vie, mais autour de moi, il s’est passé beaucoup d’événements… Il y a quelques années, un adjudant a perdu son fils au régiment, ça m’avait particulièrement touché. On ne sait pas quoi faire à ce moment-là. Il y a un an ou deux, je suis sorti avec une fille, une amie très proche dont le fils est tombé gravement malade et tout récemment des amis de mes parents ont perdu leur fils… »

Et de motiver son action: « Je pense qu’on a tous beaucoup de chance de vivre dans une bulle de positivité; la misère, on ne veut pas trop la voir. Je pense qu’il faut se remettre en question. À chaque pas, vécu comme une misère, je pensais à ceux qui, dans la peine, paieraient n’importe quoi pour mon ressenti. Donc voilà, j’ai vécu une incroyable aventure humaine ».

« 30 à 40 kilomètres de marche, 10 heures par jour »

Passionné par les défis d’endurance, Jessy Lemaire qui compte notamment à son actif la traversée de la Suisse à pied; un Marseille – Paris en sept jours à vélo, ou encore une traversée de la France à vélo, de Dunkerque à Hendaye, est donc parti de Lille, sur ses jours de vacances. Une ville « qui représentait bien pour moi le nord de la France », indique le trentenaire originaire de la Marne, où il a vécu « une très belle étape ».

Pas de temps mort. « Dès ma sortie du train à 15 heures, le 14 juillet à la gare de Lille-Europe, j’ai commencé mon parcours au rythme quotidien de 30 à 40km de marche. Dix heures par jour. Je m’arrêtais à la nuit et repartais le matin à 7 heures. Ça a été dur pendant dix jours, je suis monté à quatorze ampoules aux pieds les sept premiers jours », glisse-t-il. Choisissant des chemins de traverse sécurisés, de randonnée le plus souvent, le marcheur de la générosité dormait soit en bivouaquant – « Le premier soir j’ai dormi au milieu d’un champ » – soit en comptant sur la générosité des habitants croisés sur son passage. Beaucoup lui ont proposé qui un lit, qui une douche…

« Tous les soirs, dans les bars où je posais mon sac, j’ai fait de belles rencontres. Beaucoup m’ont interrogé sur ma démarche ou scannaient le gros QR code accrochés à mon sac à dos renvoyant à l’appel aux dons publié en ligne », explique-t-il.

Des foulées partagées…


L’arrivée, enfin, devant le snack-bar La Pyro, mardi à 17 h 15. Photo J. -M. V.

Ses foulées ont été parfois partagées. « Sept personnes ont marché avec moi: mon cousin pendant deux jours dans le Nord; une amie a fait une étape avec moi à Lyon et quatre copains qui m’ont rejoint à Valence », énumère-t-il. En compagnie de ces derniers, il a bravé le retour de la canicule avec « arrêt tous les 5 kilomètres pour remplir les bouteilles d’eau. On a bu 5 à 6 litres par jour ». Et bien sûr, durant sa longue marche, vécue avec introspection, Jessy Lemaire a songé à son prochain défi. Il n’en dira pas plus.

1. La cagnotte « 1.000 kilomètres à pied pour les rêves des enfants » sur collecter.petitsprinces.com a réuni 4.335 euros de dons. Elle est toujours ouverte. Le snack-bar La Pyro l’a alimenté en reversant une demi-heure de recettes, mardi après-midi.