Les grilles des années 2000 et du début des années 2010
étaient garnies de grands talents, mais parfois, ça ne suffit pas.
La majorité des gens ont oublié de nombreux éléments
marquants ; aujourd’hui, je vais vous raconter l’histoire d’un
de ces pilotes. Un champion, qui plus est !
Issu de la génération dorée espagnole, Julián Simón se
fait repérer très tôt. Doté d’un talent avéré, il réalise sa
première wildcard en mondial 125cc à 15 ans, preuve de sa
précocité. Lors de cette saison 2002, il est propulsé par le team
junior de la formation Telefonica Movistar, alors l’une des
plus importantes. Ces quatre courses disputées lui permettent de
trouver un guidon à temps plein pour 2003 sur Malaguti.
Tout débute comme dans un rêve.
Ce
sponsor Bancaja me manque. Mais où est-il passé ?
Deux ans plus tard, et après une saison 2004 réussie sur une
machine de milieu de grille, Julián intègre l’équipe Red Bull
KTM. Dès lors, c’est l’explosion. Il affiche une régularité
impressionnante pour son jeune âge, et n’est pas ridicule face à
ses deux coéquipiers d’élite que sont Gábor Talmácsi et
Thomas Lüthi. Par ailleurs, il remporte même son premier Grand Prix
en carrière lors de la manche britannique. C’est certain :
Julián Simón rejoindra les meilleurs dans la plus petite
des catégories.
Sa saison 2006 est tout aussi, voire plus, impressionnante de
régularité malgré l’absence de victoires et une blessure intervenue
à mi-saison. Qu’importe ; Repsol Honda l’approche pour un passage
en 250cc, à 20 ans seulement. Une occasion en or, qu’il saisit
immédiatement. Cependant, cette période de deux ans ne lui réussit
pas tant que ça. Certes, Julián tombe toujours peu et reste très
régulier dans la performance, mais le rythme, imprimé par Jorge
Lorenzo puis Marco Simoncelli était simplement trop élevé.
Heureusement pour lui, l’Espagnol toujours remarqué dans
les pelotons parvient à se dégoter une nouvelle place dorée, mais
il lui faut redescendre en 125cc.
Il s’agit du guidon laissé par Gábor Talmácsi dans
l’équipe « Bancaja » de Jorge
Martínez ! Doté d’Aprilia très performantes,
« Aspar » avait réussi à imposer le Hongrois deux ans
auparavant. Quel flair. Immédiatement, la mayonnaise prend. Julián
Simón enflamme tout sur son passage, et descend rarement du
podium ; Bradley Smith et Nicolás
Terol n’y peuvent rien. Si Talmácsi dut patienter
jusqu’à Valence, Simón fut sacré à Phillip Island. Aucune
déconcentration à déplorer, puisqu’il remporta les deux courses
suivantes et inscrivit un coup du chapeau à Valence (pole,
meilleur tour en course et victoire).
Il compte sept victoires, soit autant que Brad
Binder en 2016, et plus que Dani Pedrosa en
2003 ! Et encore, le total aurait dû être plus élevé.
En effet, à Barcelone, Simón franchit la ligne en tête et
célèbre… alors qu’il restait un tour. Des images qui ont
fait le tour du monde. Aleix Espargaró lui rendit hommage
13 ans plus tard, là, sur la même piste. Andrea Iannone,
bientôt vainqueur, ainsi que trois autres pilotes le passèrent.
Heureusement pour lui, ceci n’eut point d’incidence sur le résultat
final.
À ce moment-là, Simón est le roi du monde. Rendez-vous
compte : un espagnol issu de cette génération dorée, lui aussi
titré à seulement 22 ans. Rien ne le prédestinait à figurer dans
cette série d’articles. D’autant plus que, contrairement
à Gábor Talmácsi, ses débuts en Moto2 furent
totalement réussis ! D’abord sur châssis RSV puis Suter –
toujours sous la houlette de Aspar, Julián trouve tout de suite de
la vitesse et de la régularité sur les nouvelles 600cc. Avec huit
podiums dont cinq deuxièmes places, il termine
vice-champion du monde derrière Toni Elías, mais
devant Iannone, Lüthi et Corsi !
Simon
aurait pu réussir. Le destin est parfois cruel.
Mais où est le problème avec Simón ? Pourquoi ne se souvient-on
pas de lui comme de l’un des cadors du championnat, très ouvert au
début des années 2010 ? C’est à partir de là que ça se gâte, et
très sérieusement. Son année 2011 commençait parfaitement, sur la
lancée de la précédente. Mais lors du Grand Prix de Catalogne
(décidément), sa carrière bascule. Kenan
Sofuoğlu le découpe dans une tentative de
dépassement, qui, soyons honnêtes, était totalement non
maîtrisée et pas à la hauteur de son palmarès. Le pauvre Simón, en
plus de partir en high-side, se prend la machine du Turc dans le
dos. Double fracture de la jambe, qui, indirectement, marque
le début de la fin.
Passé chez Avintia après avoir manqué de nombreuses courses en
2011, l’Espagnol n’est plus le même. Il est vrai qu’il
arrivait, par moments, à accrocher les meilleurs et à monter sur le
podium, mais trop peu souvent pour être mentionné. Il
rejoint Italtrans Racing en 2013,
puis QMMF l’année suivante. Il n’était pas rare de le
voir peiner aux alentours de la 25e position ; une
trajectoire sans doute difficile à gérer mentalement. Lors
du Grand Prix d’Allemagne 2016, il monte une dernière fois sur la
boîte, à vingt secondes du duel
entre Zarco et Folger qui avait retenu
l’attention de toute la planète moto.
Malgré cet exploit, cet exercice est déjà celui de
trop. Simón n’y est plus, il décide
d’arrêter. Pourtant, Garage Plus Interwetten le
rappelle début 2017 pour remplacer Iker Lecuona, blessé lors
des tests hivernaux. Deux manches catastrophiques, hors des points.
Puis, Tech3 s’offre ses services en lieu et place
de Remy Gardner à Austin ; nouvel
abandon. C’est sur ces tristes termes que s’arrête
définitivement la carrière d’un champion du monde.
Pourtant, il n’a pas quitté les circuits. Coach de Tito
Rabat puis de Maverick Viñales, Julián est dans
les parages. Comme quoi, rien n’est acquis. Lui qui
était en droit de rêver aux titres mondiaux en MotoGP vit sa destinée altérée en une fraction de
seconde.
Aviez-vous oublié Julián Simón ? Dites-le-moi
en commentaires !
Simon
avec QMMF, au Sachsenring.