Découverte lors d’un inventaire dans un appartement, la toile de Lubin Baugin rejoint un corpus extrêmement restreint puisque seules quatre autres natures mortes du peintre sont connues. Elle sera mise aux enchères à Vichy, samedi 16 août.

Sa vente promet d’attirer passionnés et curieux. Samedi 16 août, Vichy Enchères mettra à l’encan un tableau d’exception : Nature morte aux financiers, une huile sur bois peinte vers 1630 par Lubin Baugin (1612-1663), connu notamment pour ses deux natures mortes exposées au Louvre. L’œuvre est estimée entre 200 000 et 300 000 euros.

Découverte dans un appartement parisien lors d’un inventaire pour une succession le 5 novembre 2024, la toile représente une table nappée de vert sur laquelle sont posées deux assiettes d’étain garnies de visitandines (ancêtres des financiers), fruits secs et cristaux de sucre. Un verre de vin rouge et une miche de pain complètent la scène.


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Si l’œuvre était plutôt bien mise en valeur dans un bureau de cet appartement, « la famille n’avait pas conscience de sa valeur », explique Étienne Laurent, le commissaire-priseur de la vente. Restée pendant plusieurs générations dans une famille auvergnate passionnée de patrimoine, la toile avait suivi l’une de ses branches à Paris avant de tomber dans l’oubli.

Un corpus très restreint

Nature morte aux financiers rejoint un corpus extrêmement restreint puisque seules quatre autres natures mortes de Lubin Baugin sont connues, dont deux conservées au Louvre, Le Dessert de gaufrettes et Nature morte à l’échiquier. À ces deux peintures s’ajoutent la Nature morte à la chandelle, conservée à la Galleria Spada à Rome et enfin la Nature morte à la coupe d’abricots, du Musée des Beaux-Arts de Rennes.

Le commissaire-priseur Étienne Laurent assurera la vente aux enchères du tableau samedi 16 août à Vichy.
Étienne Laurent

Restée depuis novembre dans l’atelier de l’expert en tableaux anciens René Millet, la peinture découverte a été examinée par les plus grands marchands internationaux et par des conservateurs de musées parisiens. Les comparaisons avec les autres rares natures mortes de Baugin, notamment Le Dessert de gaufrettes conservé au Louvre, ont révélé un même équilibre de composition et surtout une signature très caractéristique, en lettres bâtons, ponctuée de deux points. Dernière découverte frappante selon le commissaire-priseur : « L’œuvre est peinte sur un panneau de chêne très fin, constitué de deux planches réunies par un système d’agrafe identique à celui observé sur Le Dessert de gaufrettes. »

Peu de natures mortes de Lubin Baugin sont aujourd’hui connues car cette partie de sa carrière fut courte. Né à Pithiviers (Loiret) en 1610, il rejoint Paris en 1629, où il obtient sa maîtrise à Saint-Germain-des-Prés. À l’époque, « les jeunes peintres non affiliés à la puissante corporation des peintres et sculpteurs ne pouvaient réaliser de grandes compositions religieuses ou décoratives à l’intérieur de la ville », explique la maison d’enchères sur son site internet. Lubin Baugin se tourne alors vers la nature morte, un genre en vogue auprès de la bourgeoisie parisienne et inspiré par la présence de peintres flamands dans la capitale. Mais cette production, déjà limitée en volume, s’interrompt rapidement avec son départ pour l’Italie en 1632. 

Après sa mort en 1663, Lubin Baugin est rapidement tombé dans l’oubli avant d’être redécouvert au XXe siècle, grâce aux recherches des historiens de l’art Charles Sterling et Michel Faré, qui identifient ses natures mortes. La veille de la vente, vendredi 15 août, l’expert en tableaux et dessins anciens René Millet donnera une conférence à Vichy Enchères sur la vie et l’œuvre de Lubin Baugin.