Le soleil n’est pas tendre pour ceux qui vivent à la rue. Il peut même tuer. La préfecture du Bas-Rhin a déclenché l’alerte orange canicule mardi 12 août. Depuis, les bénévoles de la Croix Rouge s’activent pour distribuer chaque jour des bouteilles d’eau fraîches aux sans-abri.

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Lorsque le camion siglé Croix-Rouge s’arrête sur la Place Kleber en plein centre de Strasbourg, quelques personnes viennent spontanément. Elles savent que ces bénévoles vont pouvoir les aider. Certaines réclament un peu de nourriture, mais les maraudes d’été sont pour l’instant limitées à une distribution d’eau en bouteille. Deux par personne, trois si nécessaire.

« Ces épisodes de très forte chaleur se multiplient, observe Régis Baron, responsable de la communication de la Croix Rouge du Bas-Rhin. Pour l’instant, nous distribuons de l’eau, parfois quelques encas, et nous surveillons l’état de santé de certaines personnes parmi les plus vulnérables. Mais il faudra sans doute faire évoluer notre réponse. Peut-être des repas froids, des accessoires pour se couvrir, des lunettes. Il faut y réfléchir, ça ne s’improvise pas. » Il faudra en effet prendre en compte le changement climatique et se préparer à des températures extrêmes.

À la rue, certains tentent de s’abriter sous des porches, mais la chaleur est suffocante. Dans son bulletin d’appel à la vigilance, la préfecture conseille de « fermer fenêtres et volets, notamment sur les façades exposées au soleil, dans la journée et ouvrir le soir pour rafraîchir l’air, notamment en provoquant des courants d’air « . Encore faudrait-il avoir un logement.

Les SDF, déjà fragilisés par leurs conditions de vie, sont encore plus vulnérables lorsque les températures grimpent. Evelyne Vallin, 20 ans de bénévolat à la Croix Rouge, vient de repérer un homme, affalé le long d’un mur dans la zone piétonne de Strasbourg. Il prend les bouteilles d’eau, et elle en profite pour le questionner :  » Qu’allez-vous faire pour les blessures que vous avez à la tête ? Vous ne voulez pas aller à l’hôpital ? « . Mais l’homme n’a pas l’intention de bouger. Il n’a plus d’envie, plus de force. Vidé. Écrasé de chaleur.

Chaque maraude permet de rencontrer entre 60 et 100 personnes sans-abri. Les bouteilles d'eau sont gardées au frais dans des glacières

Chaque maraude permet de rencontrer entre 60 et 100 personnes sans-abri. Les bouteilles d’eau sont gardées au frais dans des glacières

© Cathy Huber / France Télévisions

 » La chaleur est insupportable. Vous avez vu comme j’ai maigri ?  » dit Mustapha, croisé un peu plus loin. Il n’a pas d’effet personnel, à part un sac à dos. Il est habillé d’un bermuda… Et d’une doudoune…. Pas le choix, c’est tout ce qu’il possède. Il fait 35 degrés. Heureusement dit-il, il a repéré quelques fontaines. En tout cas, il accepte volontiers les deux bouteilles proposées par la Croix-Rouge.

Les bénévoles sillonnent la ville par groupe de six habituellement. Mais ce soir-là, ils ne sont que quatre. Plus de journées de canicule, cela signifie plus de travail, alors que la plupart sont encore en congés.  » C’est normal, c’est la période estivale et les bénévoles ont le droit d’être en vacances, ils travaillent déjà toute l’année, dit Régis Baron. Mais été comme hiver, les besoins sont de plus en plus forts, alors si vous avez l’âme d’un ou d’une bénévole, vous êtes les bienvenus à la Croix-Rouge française » lance-t-il.

Selon une enquête du « Collectif des Morts de la Rue » qui recense et documente les situations des personnes sans-abri, 4 876 décès ont été dénombrés entre 2012 et 2020 : 47% surviennent en automne et en hiver, 44% au printemps et en été, et 5% sans précision. La saisonnalité n’est donc pas un facteur absolument déterminant. C’est le fait de ne pas avoir de toit sur la tête qui fragilise, jusqu’au décès.