À quoi mesure-t-on la puissance d’un goût de reviens-y ? Peut-être à la manière qu’il a d’aimanter près de 13 613 âmes, venues de plus ou moins loin, un week-end du 15 août alors que la plupart des rues parisiennes convoquent une tranquillité qui rappelle les années Covid.

Un an après l’épopée bleue aux Jeux de Paris, stoppée au bord du rêve par les Avengers américains et leur intraitable « chef Curry », de nombreux fans s’étaient donné rendez-vous à l’Accor Arena, avec l’envie de humer (à nouveau) le parfum délicieux de cette atmosphère qui avait accompagné l’équipe de France jusqu’à une magnifique médaille d’argent.

Une perspective si séduisante que la salle a ouvert pour eux des portes qui restent traditionnellement fermées en cette période estivale.

Ils étaient des centaines à patienter sur l’esplanade, plus de deux heures avant le coup d’envoi l’avant-dernier match de préparation à l’Euro basket (27 août – 14 septembre) face à l’Espagne hier soir, faisant se côtoyer les habits de vacances, les tuniques aux couleurs des Bleus (qu’ils s’agissent de foot, de basket ou de rugby), comme celles des supporters avec leur écusson de coq enflammé propres aux Jeux. On n’aura pas non plus loupé le tee-shirt patchwork de phryges, porté par une tête blonde haute comme trois pommes qui tentait sa chance sur le panier installé dans la zone.

Pas question pour eux de manquer le retour des héros. À l’image d’Agnès, Anna et Claire, mère et filles venues de Lorraine, il s’agissait de prolonger la fête. « On était là pour les demies filles et garçons, c’était incroyable. On espère que ce sera aussi bien », se remémoraient-elles.

Les forfaits en cascade, de la nouvelle coqueluche, Victor Wembanyama (flocage le plus présent dans les tribunes, qu’il se décline aux couleurs du coq ou de son club des San Antonio Spurs), ou de cadres expérimentés comme Rudy Gobert et Evan Fournier, n’a pas du tout douché leur enthousiasme. « Mon chouchou sur la prépa, c’est (Sylvain) Francisco », glisse la mère en experte. Bien vu : le meneur de Kaunas fut, avec Matthew Strazel, le grand artisan de la victoire française. « C’est chouette de voir les pépites émerger, de se battre pour leur place », complètent les deux autres. Un sentiment partagé par l’ensemble des curieux interrogés. Malheureux de ne pas avoir pu mettre la main sur un ticket pour la finale face aux USA l’été dernier, Romain et Mylène, habitants de Seine-et-Marne, profitaient de l’occasion pour observer Bilal Coulibaly de près, tandis que l’attention des Rennais Yassine et Andréa, se portaient plus vers son coéquipier à Washington, Alexandre Sarr.

« La base est très bien pour continuer à nous faire rêver »

Une curiosité et un amour pour une nouvelle génération qui a tout d’opportun. Cette rencontre était autant l’occasion de se rappeler aux bons souvenirs de Jeux, dont il ne restait que quatre visages connus (Yabusele, Strazel, Cordinier, Coulibaly), qu’un passage de témoin. Puisque le meneur aux doigts de fée Nando De Colo (38 ans, 209 sélections) et celui qui restera dans les mémoires de beaucoup comme un contreur et un défenseur d’exception Nicolas Batum (36 ans, 177 sél.), retraités internationaux après près de vingt ans de loyaux services, étaient honorés avant le lancement des hostilités.

« C’est fini. C’est ça qui est dur à accepter. Ça clôt vraiment l’histoire. C’est une salle particulière, on a vécu un moment particulier ici pour finir, de voir Bercy rempli, de voir des images de nous jeunes, de retracer un peu tout. C’était un grand moment. C’est passé très très vite. Je leur dis d’en profiter », soulignait Batman les yeux rougis, avant de partager son regard sur le cycle suivant. « Nouveau coach, nouveaux leaders, nouveau capitaine, nouveau tout. Il en manque quelques-uns, mais on sent que ça veut jouer ensemble, défendre dur. La base est très bien pour continuer à nous faire rêver. »

Tout aussi ému, Nando De Colo (6 médailles internationales) jugeait lui que les « confrontations toujours très intenses face aux Espagnols » avaient servi sa génération pour réaliser un parcours si prolifique. Au terme de cette double confrontation, leurs jeunes cadets menés par Frédéric Fauthoux, auront assurément aiguisé leur collectif et leur caractère.

Menés 44-28 à la mi-temps, les Bleus ont vite recollé après la pause pour revenir à égalité à 5 minutes de la fin. Matthew Strazel, en patron, allait mener les siens à la victoire (78-73).

Si nul ne sait encore ce qu’il adviendra de l’escouade des 12 heureux élus qui s’envoleront pour la Grèce en vue d’un ultime match de préparation, le 24, ils s’avanceront à l’Euro avec l’énergie de ceux qui se savent soutenus chaudement par tout un peuple.