En trois décennies, les quatre associés de l’Atelier King Kong ont construit des logements, des équipements culturels, des hôtels, des bureaux, à Bordeaux, la ville où ils vivent et où ils se sont connus, sur les bancs de l’École d’archi, ainsi que partout en France. Mais ils n’avaient encore jamais construit de gare. Il est vrai qu’une gare ne sort pas du sol tous les jours.

La leur a mis le temps, ce qui n’a rien d’inhabituel dans un projet de (très) grande envergure, en l’occurrence le Grand Paris Express (GPE), ce réseau de quatre nouvelles lignes de métro automatiques qui s’étendra sur 200 kilomètres, tout autour de la capitale. La mise en service est prévue entre 2024 et 2031 mais la gare de l’agence bordelaise, située à Vitry-sur-Seine, l’une des 68 que compte le GPE, devrait accueillir ses premiers visiteurs en fin d’année, douze ans après que King Kong eut remporté le concours.

Vue aérienne de la future gare de Vitry-sur-Seine, l’une des soixante-huit que compte le Grand Paris Express.

Vue aérienne de la future gare de Vitry-sur-Seine, l’une des soixante-huit que compte le Grand Paris Express.

King Kong

C’est en partenariat avec le bureau d’études Systra que King Kong a posé sa patte dans un projet d’envergure internationale, devenant quasiment la seule agence de province à remporter un lot. Le paquet “gares” était d’ailleurs divisé en plusieurs lots. Dans celui de King Kong, on trouvait de très grandes pointures, comme Valode et Pistre., Thomas Richez et ANMA. « Un peu comme Parcoursup, chacun avait émis son souhait d’emplacement de gare et tout le monde a obtenu satisfaction, à commencer par nous qui voulions travailler à Vitry-sur-Seine », explique Frédéric Neau, plus spécialement en charge du projet.

Comme dans une grotte

La gare de Vitry coche de nombreuses cases prisées par des architectes. Elle se trouve d’abord en centre-ville, au pied de vieux logements voués à la démolition, de l’hôtel de ville, du Musée d’art contemporain ou du Théâtre Jean-Vilar. Elle est en connexion avec un axe majeur de la commune, où circule déjà une ligne de tramway. Elle se déploie enfin sous un parc, celui du Coteau, à 30 mètres de profondeur. Seule l’entrée de la gare est visible en surface, ondulation de béton blanc, qui prolonge la pente du terrain, et percée d’oculus, grâce auxquels le sous-sol reçoit la lumière du jour, et dans lesquels seront plantés des arbres, tout le plateau devant être recouvert de terre.

Une fois dans la gare, dotée de services et de commerces, le voyageur s’enfonce sous terre par une succession d’escalators. Rien de bien inhabituel dans un métro. Si ce n’est que les architectes de King Kong ont choisi, grâce à leur partenariat avec le plasticien Abdelkader Benchamma, de donner un aspect pariétal aux parois de la station. Celles-ci se parent de dessins aux reflets ocre, bruns et bleutés. Le temps de descendre ou de monter, l’usager oubliera qu’il doit prendre son métro, pour aller au travail ou à un rendez-vous médical, et s’imaginera dans les entrailles d’une grotte au temps de Néandertal, contraste avec la modernité du Grand Paris Express qui n’est pas pour déplaire au quatuor. King Kong s’est rendu célèbre au sommet d’un gratte-ciel, espérons qu’être à 30 mètres sous le sol lui vaudra une même notoriété.

L’artiste Abdelkader Benchamma a donné un aspect pariétal aux parois de la station de Vitry-sur-Seine.

L’artiste Abdelkader Benchamma a donné un aspect pariétal aux parois de la station de Vitry-sur-Seine.

King Kong