Ripaille, danses et costumes folkloriques, spectacles médiévaux… Toute l’année, et particulièrement l’été, des milliers de fêtes ambiancent les villages de France et de Navarre pour mettre à l’honneur toute la richesse de notre terroir et de nos traditions ancestrales. Célébrées dans son JT de 13 heures par le regretté Jean-Pierre Pernaut, toutes ces fêtes traditionnelles sont « un élément constitutif de notre patrimoine », selon Thomas Meslin.

Passionné depuis son plus jeune âge par ces fêtes votives, agricoles, pastorales ou gastronomiques, ce jeune trentenaire s’est d’ailleurs donné pour mission de les défendre car « elles sont en danger » avec un tiers d’entre elles qui ont disparu depuis la vague du Covid. D’où l’idée d’un label des plus belles fêtes de France, lancé il y a un peu plus d’un an, pour leur donner une visibilité, les fédérer, mais aussi leur apporter une aide financière. « L’ambition est assez simple : faire redécouvrir aux Français la richesse de nos régions », nous indiquait courant juin le cofondateur du label.

Un article de L’Humanité met le feu aux poudres

Sur le papier, rien de polémique jusque-là. Mais début juillet, le quotidien L’Humanité est venu apporter un tout autre éclairage sur l’association derrière ce label qui se dit « strictement apolitique, non lucrative et désintéressée ». On y apprend qu’elle est pilotée par Studio 496, une agence spécialisée dans la conception d’évènements festifs et dirigée par Thibault Farrenq, ancien candidat suppléant aux législatives de 2024 en Vendée sous l’étiquette LR/RN. Il est réputé proche du milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin qui est d’ailleurs entré au printemps dans le capital de la société.

De quoi jeter le trouble sur les réelles intentions de ce label et sur ses liens avec l’homme d’affaires ultraconservateur, qui met sa fortune pour faire triompher l’union des droites. Dans un communiqué publié sur son site, l’association des plus belles fêtes de France se dit victime « d’attaques mensongères et militantes » et se défend d’être sous la coupe du milliardaire, accusé par le quotidien de gauche de vouloir faire main basse sur les fêtes traditionnelles. « M. Stérin n’est pas membre de l’association, et l’association ne lui rend aucun compte », précise-t-elle, expliquant avoir juste sollicité sa fondation du Bien commun pour obtenir des subventions.

« Un combat politique qui ne nous regarde pas »

Contacté par 20 Minutes, Thomas Meslin explique que « la seule et unique mission de l’association est de valoriser et de soutenir ces fêtes traditionnelles » et assure qu’elle n’a « jamais cherché à influencer leurs lignes éditoriales, leurs choix ou leur programmation ». « Il y a derrière tout ça des détracteurs qui cherchent à s’en prendre à Pierre-Édouard Stérin pour ses idées politiques, mais c’est un combat qui ne nous regarde pas », poursuit-il.

Il n’empêche que les révélations de L’Humanité ont provoqué un gros malaise parmi les organisateurs de fêtes. Depuis plusieurs jours, l’association des plus belles fêtes de France, qui a labellisé soixante évènements, voit ainsi plusieurs d’entre elles quitter le navire. Le mouvement de fronde a démarré dans le Sud-Ouest avec cinq fêtes traditionnelles qui ont décidé de renoncer à ce label.

Vague de défections dans le Sud-Ouest et en Bretagne

C’est le cas du Lehengo Hazparne, grande fête populaire basque qui vient de s’achever à Hasparren et justifie sa décision par « les doutes soulevés quant au caractère apolitique de ce label ». « Le comité d’organisation a décidé, par principe de précaution, de se désengager purement et simplement et tient à préciser qu’il n’a à ce jour pas touché la subvention promise », explique dans un communiqué son président Patrick Coumet, refusant « toute récupération politique de l’événement quelle qu’elle soit ».

Cette vague de défections a depuis touché la Bretagne, plusieurs fêtes labellisées ayant claqué la porte comme la Fête des Islandais et des Terre-Neuvas à Paimpol ou la Pomme de terre en fête à Plœuc-l’Hermitage, son maire Thibaut Guignard dénonçant dans les colonnes de Ouest-France « une tentative d’instrumentalisation et d’infiltration de la part de l’extrême droite ».

La fédération des fêtes et festivals de culture bretonne appelle d’ailleurs « les fêtes labellisées à quitter le label et celles qui seraient sollicitées à refuser la labellisation ». « Il offre certes un soutien financier et une visibilité non négligeables en cette période compliquée pour les fêtes, mais ce lien avec l’extrême droite est dangereux pour nos fêtes et pour toutes les valeurs qu’elles défendent », indique-t-elle sur ses réseaux.

Certaines fêtes veulent conserver le label

Parmi toutes les fêtes labellisées, toutes n’ont pas encore tranché pour savoir si elles allaient prendre ou non leur distance avec le label. Certaines ont toutefois déjà annoncé leur intention d’y rester comme les fêtes de Jeanne d’Arc à Orléans ou les Historiques de Bidache (Gironde). Alors que la polémique se poursuit, l’association des plus belles fêtes de France dénonce par ailleurs « les pressions de groupuscules idéologues » qu’auraient subies certains organisateurs de fête et « les appels et messages d’intimidation » reçus par plusieurs de ses adhérents.

« Le dossier est entre les mains de nos avocats », indique Thomas Meslin, « pas inquiet » pour l’avenir du label. « On regrette bien sûr que quelques-uns soient partis pour de mauvaises raisons, mais cela ne remet pas du tout en question l’utilité et la pertinence de notre association », assure-t-il.