Il fait se lever les foules. Ses paroles résonnent dans le cœur de ses fans. Jul, le plus gros vendeur de disques de l’histoire du rap français, a déjà marqué Marseille. Un port d’attache dont il s’inspire, de Señora à Bande Organisée en passant par Avant la douane. « Je connais ma ville par cœur, Marseille c’est chez moi », rappe-t-il dans Sors le Cross volé, issu de l’album Ma Paranoïa, (2014).

Jul est aussi le premier rappeur à mettre les phares sur les quartiers Est de Marseille, pas spécialement connus pour être une terre de hip-hop, à l’inverse des quartiers Nord. De son vrai nom Julien Mari, l’artiste a passé son enfance dans une cité de Saint-Jean-du-Désert (12e), située à deux pas du cimetière Saint-Pierre. « Il a grandi dans un HLM de taille moyenne plantée sur une butte et entourée de quelques pins. On raconte que, lorsqu’il était bébé, son père le mettait dans la voiture, allumait la radio et tournait autour du quartier pour l’endormir », racontait l’écrivain Hadrien Bels, en avril, dans La Revue 21.

Ordina 13, un tremplin pour les rappeurs marseillais

Sa carrière commence comme de nombreux artistes marseillais comme Kofs, Mehdi YZ ou Kamikaz avec Ordina 13. Dans les années 2000, ce dispositif du Conseil général permet aux collégiens des Bouches-du-Rhône de bénéficier d’un ordinateur portable gratuit.

Censé aider les jeunes dans leurs études, l’objet est détourné. Jul découvre la musique assistée par ordinateur (MAO), écrit ses premiers textes et enregistre ses sons en autodidacte. « J’avais un petit ordi, l’ordi du collège, j’ai téléchargé un logiciel et j’ai commencé à prendre les instrus à la fin des chansons. Je copiais, je collais. Et c’est à partir de là que j’ai commencé. J’ai écrit, j’ai fait un son… », retraçait-il dans La Provence en 2015.

Jul a donné deux concerts monstre en mai 2025 au stade Vélodrome.Jul a donné deux concerts monstre en mai 2025 au stade Vélodrome. / Photo Nicolas Vallauri

Sa musique est parfois jugée trop « populaire ». « Évidemment, Jul fait l’objet d’un mépris de classe. Cela dit, le mépris n’est pas l’apanage de celles et ceux qui disent que ses fans n’ont pas de goût. Il y a aussi une forme de mépris dans le fait de dire : ‘Waouh Jul, c’est vraiment génial, c’est authentique, il est tellement sincère et spontané.' », éclairait la sociologue Emmanuelle Carinos, chez France 3, en 2024.

En 2015, il crée son propre label D’Or et de platine pour garder le contrôle de sa musique, de son image… et de son merchandising. Dans toute la ville, ses t-shirts s’arrachent. Cette indépendance est rare dans le milieu.

Un succès international

Écrire sur ses collègues, parler de son quartier, c’est la marque de Jul qui fédère et tempère, dans un triptyque entre dance music, variété française et raï. « C’est un peu de tout, de la joie, de la haine. Avec ma musique, tu t’évades, tu danses, c’est de l’émotion. Tout le monde est servi. […] J’essaie de mettre des sons pour les filles, des sons pour les mecs qui n’ont pas de sous, pour les mecs qui font le bordel, pour les moments où on est posés… », décrivait-il au sujet de sa musique en 2015.

Depuis, c’est une machine. Un signe avec les mains que tout le monde reproduit. Deux albums par an, 24 au total, tous certifiés. Tchikita, J’oublie tout, L’ovni… Depuis 2021, Jul est chaque année l’artiste francophone le plus écouté sur Spotify. En 2025, un million de personnes s’arrachent les billets pour son concert au Stade de France et ses deux dates aux Vélodrome. Jul impose un style unique avec autotune et refrains catchy, qui renouvelle l’esthétique du rap français et rayonne désormais à l’international. Bien loin de Saint-Jean-du-Désert.