Les applaudissements sont nourris, le public séduit. Les chansons millimétrées pour explorer le champ des émotions. Même si, une fois les lumières éteintes sur la représentation raphaëloise (le 10 août dernier), chacun sait, sur scène comme en coulisses, qu’il reste des détails à régler.
Sans doute plus qu’aucun autre Stéphane Brunello en est-il conscient, lui qui est l’un des deux auteurs-compositeurs de Cyrano de Bergerac, la Comédie musicale, adaptation contemporaine de l’œuvre d’Edmond Rostand, compte parmi les deux musiciens qui jouent en live sur scène, accompagnant cette troupe de chanteurs régionaux.
Parmi eux, le Toulonnais Bertrand Borgognone incarne De Guiche. Capitaine des Gascogne dans l’œuvre originale. Celui qui envoie Christian à la mort. Dans cette nouvelle version, De Guiche est producteur et il éloigne Christian, jeune chanteur, de Roxane, en l’envoyant en tournée.
C’est par amitié avec Stéphane Brunello que l’artiste varois s’est retrouvé, voilà cinq ans, à enregistrer les maquettes de ce qui allait devenir cet incroyable spectacle. « Je connaissais Stéphane de longue date, confie le Varois, et lorsqu’ils ont eu besoin avec Philippe (Hattemberg) d’interprètes, il m’a dit penser à moi pour De Guiche. J’ai enregistré avec plaisir… » Avant d’attendre que le projet ne se monte sous l’impulsion du faiseur de spectacles niçois Gil Marsalla et Directo Prod, « et qu’il me demande de reprendre le rôle. »
« Ce texte se transpose à toutes les situations »
Photo Florian Escoffier.
Cyrano de Bergerac, « je l’avais étudiée dans ma scolarité, comme tout le monde. Je connaissais aussi la version ciné avec Depardieu… » Mais il a tout de même fallu se replonger dans l’histoire « magnifique ». « Ce qui en fait la beauté, c’est son caractère intemporel. Ce texte se transpose à toutes les situations. a parle à toutes les générations, de choses que tout le monde vit: l’amour, la jalousie… »
À 46 ans, Bertrand Borgognone trouve ici un rôle à sa mesure dans un registre dont il s’est tenu éloigné jusqu’à présent. Pourtant, c’est une comédie musicale écrite par un de ses potes d’adolescence qui lui a donné le virus du chant et de la musique. « Ça s’appelait Benjamin Rêve, je devais être l’un des rares artistes non professionnels à l’époque… »
Depuis, Bertrand Borgognone qui n’a plus quitté la scène, a « la chance », dit-il, de vivre de son métier depuis 26 ans. Et se remet en question en endossant ce rôle dans un registre sur lequel, confesse-t-il, il avait « un regard un peu faussé… » Et puis, le projet et la troupe constituée ont fait le reste: « Il y a eu une vraie curiosité… Et l’envie de découvrir l’envers du décor ».
Manon Vibert, une danseuse raphaéloise dans l’aventure
Photo Florian Escoffier.
Bertrand Borgognone n’est pas le seul Varois de l’aventure: la danseuse Manon Vibert, 33 ans, a rejoint Cyrano lors d’un casting. « Ils recherchaient des danseurs qui avaient un pied-à-terre sur Nice ou qui n’habitaient pas loin… », se réjouit-elle.
Le spectacle a beaucoup évolué pour devenir une comédie musicale. La version finale, qui sera présentée au Nikaïa à Nice avant de partir en tournée, sera enrichie grâce à 4 danseurs aux côtés des 6 danseuses déjà présentes.
Le chorégraphe Olivier Matheron va une nouvelle fois bouger les lignes. Ce qui n’effraie la Raphaëloise, qui pense d’abord au collectif. » L’esprit de groupe, l’entraide », qui rend capable de tout surmonter. Surtout lorsqu’une tournée de trois ans vous attend.
De gauche à droite: Gil Marsalla, producteur et metteur en scène, Philippe Hattemberg et Stéphane Brunello, auteurs compositeurs. Photo Florian Escoffier.
Encore des évolutions d’ici le 15 novembre à Nice
Il fallait oser adapter l’un des textes classiques les plus connus dans le monde. En transposer la trame dans les années 1980 sans trahir le récit et son sujet principal. L’amour sacrificiel. Ici donc, l’histoire se déroule dans un monde sans smartphone ni réseaux sociaux (si, ça a existé!). Cyrano est un auteur compositeur qui s’interdit d’aimer Roxane parce que de 30 ans son aîné, Roxane une jeune danseuse. Christian est, lui, un jeune chanteur tourmenté. Et De Guiche son producteur.
Philippe Hattemberg et Stéphane Brunello signent cette adaptation moderne et néanmoins fidèle au récit de Rostand. Le producteur niçois Gil Marsalla (Directo Prod) en signe aussi la mise en scène. Ce qui était un spectacle musical à ses débuts il y a quelques années en arrière, est aujourd’hui une véritable comédie musicale.
Le thème est universel, « résolument moderne », relève Stéphane Brunello, et surtout féministe, où la femme tombe amoureuse des mots, et non de l’enveloppe qui les lui récite… Cyrano de Bergerac la Comédie musicale est portée par des chansons aux textes puissants, interprétées par des chanteurs de la région, et une récitante, Isabelle Servol.
D’ici le 15 novembre, « le spectacle va encore évoluer », conclut Gil Marsalla. Par petites touches, complété par un écran vidéo… juste ce qu’il faut pour affronter trois ans d’une tournée qui passera en France mais aussi en Chine et au Canada. Le trio écrit un nouveau chapitre de l’histoire de Cyrano.
Et apportent la preuve que les grands spectacles ne naissent pas qu’à Paris.