Par
Laurent Fortin
Publié le
17 avr. 2025 à 21h55
Ce 21 février 2025, les militaires avaient été appelés vers 16 h 20 pour un « possible cambriolage en cours » rue des Landes Mortron, non loin du cimetière de Beautour, à Vertou. Un voisin avait aperçu « deux individus passant par-dessus les clôtures du lotissement », a-t-il été relaté, lors de l’audience publique du tribunal correctionnel de Nantes.
Les gendarmes avaient ensuite pu pénétrer dans la maison où « un petit pied-de-biche bleu d’une trentaine de centimètres » se trouvait « sur la table basse du salon ». Ils avaient aussi « entendu du bruit » en provenance d’une chambre d’où étaient sortis « deux individus simultanément ». L’un d’eux « dormait », leur avait-il expliqué. Le premier était toutefois porteur d’une « alliance gravée »Nicolas et Elodie »» tandis que le second avait sur lui « une boîte d’Airpods, une enceinte et un bracelet ».
L’intérieur était déjà en « grand désordre » quand eux-mêmes étaient arrivés, avaient expliqué les deux suspects : ces deux ressortissants nord-africains cherchaient en fait juste un toit pour se loger car il faisait « froid ». Or « une personne nous a indiqué que cette maison était ouverte », ont-ils expliqué par le biais de leur interprète.
L’un d’eux déjà convoqué par la justice
Seulement voilà : rue des Cantaloups, soit à « quelques centaines de mètres » de la rue des Landes Mortron, une autre maison avait elle aussi été cambriolée et ses volets portaient des traces de pesée « de couleur bleue identique à celle du pied-de-biche » retrouvé dans l’autre maison cambriolée, a expliqué la présidente du tribunal correctionnel de Nantes. Les gendarmes en avaient donc déduit que le duo était les voleurs des deux maisons.
Monsieur, vous avez dit aux gendarmes qui vous ont trouvé dans la maison que vous dormiez depuis deux heures, mais ce n’est pas cohérent avec ce que dit le voisin qui vous a vu enjamber les clôtures du lotissement.
La présidente
Elle s’adressait au premier d’entre eux, un jeune de 26 ans célibataire et sans enfant arrivé à Nantes « il y a quatre mois et demi ».
Passé par « l’Algérie » puis « l’Espagne », ce jeune « Libyen » était « venu chercher du travail » en France, pour « aider ses parents » restés dans son pays d’origine où ils n’ont « pas de logement ». Mais « plusieurs soucis de santé » l’ont empêché de continuer à « travailler sur le marché » comme il l’avait pourtant fait « les premiers jours » sans être déclaré. Il avait aussi « vendu des cigarettes à la sauvette à Commerce », a-t-il fait savoir pour démontrer son intention de travailler.
Reste que, si son casier judiciaire français jusqu’alors vierge, il avait malgré tout « une convocation » en poche pour venir au tribunal le 27 novembre prochain « pour deux tentatives de vol à La Chapelle-sur-Erdre », lui a rappelé la présidente du tribunal correctionnel de Nantes.
Pourquoi on vous retrouve à Vertou alors que vous aviez interdiction de quitter Nantes ?
La procureure de la République.
L’intéressé lui a alors répondu qu’il « ne savait pas » qu’il avait passé la limite entre les deux communes.
Six mois de prison avec sursis
J’entends les explications de ces deux messieurs – somme toute assez peu plausibles – mais vous avez un certain nombre d’éléments en procédure vous permettant d’entrer en voie de condamnation. Je pense que, dans leur pays aussi, c’est un délit de pénétrer sans autorisation dans une habitation et qu’on ne force pas les portes uniquement pour se mettre au chaud.
La représentante du ministère public à l’attention des trois juges
Elle avait donc requis huit mois de prison ferme, un maintien en détention et une interdiction de revenir en Loire-Atlantique pendant un an.
J’ai fait une recherche sur Amazon pour trouver un pied-de-biche et, le premier qui ressort dans la liste, c’est ce pied-de-biche bleu. Combien y en a-t-il donc dans la région ? Qu’est-ce qui nous fait dire qu’il n’y avait pas d’autres cambrioleurs dans le secteur ?
Matthieu Créach, l’avocat de l’un des deux cambrioleurs
S’il « s’en rapporte » à l’appréciation du tribunal concernant la culpabilité de son client sur les faits survenus dans la seconde maison cambriolée, il trouvait la plainte de l’autre propriétaire « indigente » : cette seconde victime habite « à 800 mètres » de la première et aucune « technique d’enquête moderne » (ADN, téléphonie…) n’a été mise en œuvre pour incriminer son client. Edouard Vallon, l’avocat du second prévenu, avait lui aussi mis en garde les juges contre les « très gros raccourcis » faits par les gendarmes entre ces deux vols survenus à Vertou.
Le tribunal correctionnel de Nantes a néanmoins estimé avoir « suffisamment d’éléments » pour les déclarer coupables, au vu de ce « mode opératoire similaire avec ce pied-de-biche » : ils ont écopé de six mois de prison avec sursis simple.
Quelle que soit la précarité de votre situation, elle ne peut justifier en aucune façon une atteinte aux biens.
La présidente.
Outre cet « avertissement sévère », les deux hommes devront payer 800 € de dommages et intérêts à la personne cambriolée de la rue des Landes Mortron pour « le stress » qu’ils lui ont causé.
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